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Comme tous les passionnés, nous avons été très déçus de vivre cette journée sans aucune séance de Grands Prix. Cependant, nous comprenons parfaitement que les organisateurs se sont retrouvés confrontés à une situation exceptionnelle, et qu’ils ont donc joué la carte de la sécurité.

En effet, outre l’interrogation sur la bonne visibilité d’un roulage de nuit en conditions de pluie, ce qui était anticipé par la Dorna qui avait pris les mesures dont nous vous avions déjà fait part, est venu s’adjoindre la découverte d’un circuit totalement impraticable devant la violence des intempéries.

Face à ces deux réactions, la déception et la compréhension, nous avons souhaité recueillir le sentiment d’un autre passionné, mais lui-même impliqué dans les décisions de l’organisation, à savoir Hervé Poncharal, président de l’IRTA.


Hervé, nous comprenons très bien les questions de sécurité qui ont amené à annuler toutes les séances de cette journée, mais comprenez-vous également la déception de tous les passionnés de MotoGP français qui ont été privés de la première qualification de Johann Zarco en MotoGP ?

Hervé Poncharal :  » je comprends tout à fait la déception de tous les gens qui suivent le MotoGP et qui attendaient impatiemment, après cette très longue période de pause hivernale, cette première séance qualif avec l’intensité, dans la classe MotoGP, de la Q1 et de la Q2. On avait la chance d’avoir nos deux pilotes, après la FP3, d’être dans le top 10 donc directement en Q2, et très sincèrement, pour parler au nom de tout le monde, sauf peut-être Iannone, tout le monde avait envie de faire une séance qualif, y compris Johann Zarco et y compris Jonas Folger. Ça c’est clair !

Surtout que, bien évidemment quatre c’est très bien, et huit c’est bien, mais je pense que l’on pouvait faire un résultat très similaire, et peut-être même mieux, qui sait, si ça s’était passé dans des conditions normales.

Ceci étant dit, à un moment donné, on est obligé, heureusement ou malheureusement, de faire avec les conditions météo. Et moi, ce qui m’a fait, à un moment donné, un peu de mal pour tous les gens qui étaient sur le circuit ou devant leur écran, c’est qu’il n’y ait pas de décision de prise assez rapidement. Et ça, ça s’est fait parce que, justement, on a fait le maximum aussi longtemps qu’on a pu, avec notamment Loris Capirossi et Franco Uncini, pour faire tout ce qu’on pouvait pour essayer de rouler et d’avoir une séance qualif, vis-à-vis de tous les gens qui l’attendaient. C’est pour cela que cela a duré si longtemps. Malheureusement, à un moment donné, il a bien fallu se rendre à l’évidence et cela a été, de toute façon, supporté par l’intégralité des pilotes, même ceux qui n’étaient pas très bien placés sur la grille, parce que c’était très très dangereux. Non seulement il y avait des grosses rivières qui traversaient la piste, mais cela nous aurait emmené a roulé très tard, et l’on sait que les conditions sont très problématiques le soir après 22 heures.

Donc oui, je comprends leur déception, mais honnêtement il n’y avait pas d’autre solution. Le gros problème qu’on a vu et qu’on n’avait jamais rencontré, c’est que a priori, depuis qu’il y a des statistiques météo au Qatar, jamais il n’a plu aussi fort, jamais !

C’est donc quand même quelque chose qui est rarissime. Maintenant, ça peut arriver et le pendant de cette situation, c’est que le drainage du circuit est très mauvais. Les bacs à graviers étaient des réservoirs d’eau. Et donc, on a beau avoir fait tout ce que vous avez vu à la télé, envoyer des pompes et mettre des gens en quantité importante partout, ça continuait de couler, de couler, de couler. Cela faisait des résurgences, comme des sources, et c’était impossible.

Nous aussi, nous étions déçus. Franchement, que ce soit au niveau du team Tech3 MotoGP, mais aussi du team Moto2, parce que Xavi Vierge avait fait son temps tout seul hier et il était confiant de pouvoir améliorer sa position. Remy Gardner n’avait pas passé le pneu tendre, donc il était 23 et il attendait la qualif. Mais, à un moment donné, il faut avoir la capacité de passer outre son intérêt personnel, et il n’y avait pas d’autres solutions.

D’ailleurs, honnêtement, l’intégralité des teams et des pilotes, et même un gars comme Lorenzo qui s’est retrouvé 12e et pensait faire beaucoup mieux en qualif, tout le monde a dit que c’était la bonne décision. Tout le monde était d’accord car il n’y avait rien d’autre à faire : on n’allait quand même pas envoyer tout le monde au carnage ! »

Si nous comprenons bien, à l’interrogation sur la possibilité de courir en cas de pluie la nuit, vous vous êtes retrouvés avec un circuit dans l’incapacité totale d’évacuer une forte pluie par manque de drainages ?

« Oui, oui. Je pense que de toute façon, on avait déjà eu une bonne averse en 2009 quand le Grand Prix avait été reporté au lundi, mais malgré cette pluie qui était exceptionnelle, il n’y avait eu aucun problème car elle était certes importante mais plus ou moins normale. Mais là, pour se rendre compte de la situation, hier soir, les teams dont le nôtre ont été bloqués et sont partis du paddock à trois heures du matin. Il ne pouvaient pas partir du circuit. Il y avait quelque chose comme 50 cm d’eau sur le paddock. Les voitures ne pouvaient pas sortir. Dans notre hôtel, il y avait 20 à 30 cm d’eau dans le hall d’entrée. Ça a été incroyable ce qu’il a plu cette nuit. C’était incroyable. Donc oui, cela a montré que le circuit n’était pas suffisamment drainé, ça c’est clair, mais reste aussi la question du ressenti des pilotes quant à la faisabilité de rouler sous la pluie de nuit. Et ça, on ne l’a toujours pas eu.

De ces deux choses là, on en sortira toujours plus fort. Le circuit, et ce n’est pas un manque de moyens quand on connaît les moyens qui sont investis pour avoir un beau Grand prix ici, le circuit a vu, a compris et a pris la décision de refaire le drainage. Et quand on voit ce qu’ils ont fait au niveau de l’éclairage, on peut leur faire confiance pour que ce soit très bien fait. Donc ça, cela va être fait suite à cette malheureuse expérience que l’on vient de vivre. De plus, on a maintenant décidé que l’on va arrêter de tergiverser avec ces roulages ou pas roulages, et l’année prochaine, lors des trois jours de tests pré Grand Prix, il y aura une journée qui sera dédiée à des essais sur le mouillé de nuit, quitte à tremper la piste avec des camions-citernes. Puis, on se positionnera définitivement. De toute façon, la course au Qatar restera de nuit, c’est la volonté de tout le monde, non seulement du Qatar mais également du paddock. Mais si d’aventure les pilotes décident qu’il n’est pas possible de rouler sous la pluie de nuit, à ce moment-là, en décalera exceptionnellement les courses de jour. »

Changeons de sujet. Quel est l’état de stress du team manager de deux Rookies qui vont s’élancer demain de la quatrième et de la huitième position sur la grille de départ de ce premier Grand Prix de la saison ?

 » Écoutez, il y a déjà une bonne chose, c’est que le plus stressé c’est le team manager, ce qui prouve que je suis mieux à ma place de team manager que celle de pilote (rires). Parce que les deux pilotes sont étonnamment relax, tranquilles et confiants. Alors peut-être que cela arrivera demain, mais honnêtement j’ai cherché des traces de fébrilité, de nervosité, et je n’en ai vu ni chez l’un, ni l’autre. »

Cela vous rassure…

« Bien sûr que cela me rassure. Maintenant, je sais que la course va être difficile, je sais qu’on va découvrir des choses. On a fait des essais, comme les essais de départ, et ça se passe pas mal, mais comment cela va-t-il se passer quand ils vont tous être côte à côte sur la grille ? On va découvrir ça. On sait que notre point faible, même quand on avait fait des super qualifs avec Pol ou Bradley, c’était toujours les premiers tours ou là on perdait énormément de positions car on n’était pas assez agressif sur les premiers tours. Là, on va voir comment nos pilotes vont réagir et ça va être très important. Et puis, il faut bien que ça se passe, donc nerveux, grosse attente parce que les deux pilotes peuvent faire un beau résultat. Maintenant… j’allais dire qu’il faut qu’on se dépucelle (rires), mais voilà, il faut y aller. Mais quoi qu’il en soit les deux pilotes sont vraiment tranquilles et je dirais qu’ils ont l’attitude de confiance de vieux briscards. Ils m’impressionnent vraiment, même au niveau de leur attitude cool et détendue, et même quand il y avait des discussions sur l’annulation de la séance qualif, ils ont toujours été détendus en annonçant qu’ils suivraient la majorité, quelle que soit la décision prise. »

Et bien nous penserons à vous pendant la course, en imaginant aisément votre état de joie ou de tristesse…

« Ecoutez, de toute façon, quoi qu’il arrive, on peut faire un pâté demain en course, les deux pilotes peuvent faire une course très décevante quelles qu’en soient les raisons. Mais quoi qu’il arrive, on sait que l’on a deux pilotes qui sont hypers performants, on en est sûr, et même si ça ne se transforme pas sur le premier Grand Prix, on a devant nous une super saison. Comme je vous l’ai déjà dit, à Valence, Sepang, Phillip Island et au Qatar, ils ont été rapides, en chronos et en simulation de course, ils ont parfois roulé sous la pluie, et ça c’est pas mal passé, donc bien sûr que l’on aimerait bien que dès la première course cela se transforme en un beau résultat, mais quoi qu’il arrive, je pense que l’on est à l’aube d’une vraiment belle saison. Il y a pas mal de Français qui sont venus ici au Qatar pour faire l’ouverture du championnat de nuit car c’est un format plutôt sympa, il y a un engouement qui est fort. Ça fait donc plaisir de voir que les gens ont un peu le même feeling que l’on a, nous, c’est-à-dire que l’on est à l’aube d’un truc qui peut être très très fort.  »

FOLGER Jonas (GER) Monster Yamaha Tech 3 Yamaha MotoGP GP Qatar 2017 (Circuit Losail) 23-26/03.2017 photo: MICHELIN

FOLGER Jonas (GER)
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GP Qatar 2017 (Circuit Losail)
23-26/03.2017
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