Alex Marquez réalise un début de saison fantastique, que personne n’aurait pu prédire. En effet, le pilote Gresini roule plus ou moins comme un champion du monde ; largement meilleur que Pecco Bagnaia et tous les autres à l’exception de son frère Marc. Si ce dernier n’était pas là, il mènerait tranquillement ce championnat. Et pourtant, quelque chose cloche.
Incroyable, mais…
Pour que vous ne m’accusiez pas de minimiser ses exploits, je vais me répéter : Alex Marquez est juste exceptionnel sur cette première moitié de saison. Je trouve que ce qu’il fait est sous-coté, car il s’agit d’un véritable exemple de régularité. De mémoire, dans l’histoire récente, je crois n’avoir jamais vu une telle entame de la part d’un pilote, que ce soit un favori ou un outsider. Mais justement, mon problème avec le petit frère Marquez concerne son statut.

Je pense que l’absence de bagarre cette saison aide davantage Alex Marquez que l’inverse. Photo : Michelin Motorsport
Malheureusement, je crois que, si ça finit ainsi, nous n’allons pas nous souvenir de sa saison 2025. Alex Marquez est tellement fort qu’il a quitté le rang des outsiders, ceux qui peuvent créer la surprise, en somme. Il est devant tous les week-ends, donc c’est maintenant un favori, au même titre que Marc ou Pecco. Les favoris, eux, sont censés gagner, au moins de temps en temps, s’imposer de manière mémorable. Et Alex Marquez, en accumulant ces deuxièmes places, banalise l’exceptionnel. Oui, il s’est imposé à Jerez, c’est vrai, mais son grand frère n’était pas là pour lui contester la victoire.
Pour bien comprendre, une comparaison s’impose. À de maintes reprises, j’ai répété que la saison 2022 d’Enea Bastianini était sans doute la meilleure jamais réalisée par un outsider au XXIe siècle. On pourrait aussi parler de l’exercice 2013 de Cal Crutchlow, ou jeter l’année 2023 de Marco Bezzecchi dans le débat. Je suis convaincu que les trois susnommés étaient moins forts qu’Alex Marquez cette saison, et pourtant, ils resteront davantage dans les mémoires. La différence se fait sur des coups d’éclat, des moments de brillance extrêmes, des victoires acquises grâce à une rare maestria. Alors, bien sûr, Alex Marquez en a gagné aussi ; il est trop bon pour n’en prendre aucune. Mais rien à voir avec les triomphes de Bezzecchi en Inde, ou de Bastianini à Aragon, à la bataille avec le futur champion du monde Pecco Bagnaia.
Alex Marquez a-t-il la bonne mentalité ?
Nous sommes bientôt à la moitié de la saison et je ne comprends toujours pas l’objectif d’Alex Marquez. Une fois les feux éteints, il est géant, et me fait un peu penser à Andrea Dovizioso face à Marc Marquez. Mais quand on l’interroge sur sa volonté de viser le titre, il répond un peu à côté, dit qu’il est heureux de sa place actuelle. C’est comme s’il ne voulait pas croire à ses propres chances alors qu’il a le talent pour y penser. À l’issue du Grand Prix d’Italie, il a fait une déclaration qui m’a interpellé : « être au niveau de Marc Marquez, que je considère comme l’un des meilleurs de l’histoire, est plus gratifiant que d’être le leader du championnat ». Ce n’est pas ce qu’aurait dit quelqu’un qui vise plus haut.
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— MotoGP™🏁 (@MotoGP) June 22, 2025
Enfin, on arrive au sujet Marc Marquez. Le fait que son frère soit toujours devant n’aide pas Alex, car c’est comme s’il se satisfaisait de ces deuxièmes places à répétition. Donnez treize deuxièmes places en neuf courses à n’importe quel favori de ces vingt dernières années et il pétera sûrement un câble à force de toujours perdre. Alex, dans le parc fermé, est toujours sport, célèbre, fête avec son frère. Si c’était Bagnaia à la place de l’octuple champion du monde, je suis prêt à parier plusieurs choses : premièrement, qu’il n’agirait pas comme ça sur la piste, car Alex est bien plus doux avec Marc qu’avec n’importe quel autre homme. Pour rappel, le petit frère Marquez s’est accroché avec plus ou moins tous les pilotes MotoGP depuis son arrivée en catégorie reine début 2020, mais Marc échappe constamment à son agressivité exacerbée. Deuxièmement, qu’il n’aurait pas du tout la même approche au moment de s’exprimer sur ses chances de titre.
Au vu de ses performances, je trouverais dommage qu’il se contente de ces deuxièmes places à répétition. J’aimerais qu’il tente davantage, quitte à pousser au-delà de la limite. S’il continue ainsi jusqu’à la fin de l’année, il terminera deuxième du général – c’est presque déjà acté – sans jamais avoir fait trembler le champion du monde. Oui, Marc Marquez est très fort cette saison, mais il n’est pas imprenable partout ; j’adorerais voir Alex montrer qu’il a vraiment envie de le battre.

Par exemple, Alex Marquez n’a pas profité des courses un peu moins bonnes de son frère, comme en USA, en Grande-Bretagne, ou au Mans. Il a autant de victoires dominicales que Bagnaia ou Bezzecchi alors qu’il est trente fois meilleur. Photo : Michelin Motorsport
Conclusion
Depuis le début de l’année, je n’ai jamais vu l’instinct de tueur qu’animait Alex Marquez dans les plus petites catégories ou en 2020, chez Honda Repsol. J’aimerais qu’Alex bouscule son frère, le fasse douter, car je crois qu’il en est tout à fait capable. Ainsi, on pourrait, dans dix ans, se rappeler de cette saison où le petit frère en a eu assez de se faire battre par le grand. Il mérite qu’on se souvienne de lui.
Que pensez-vous de cette épineuse question ? Dites-le-nous en commentaires !
Alex Marquez est génial cette saison, mais il est dans une espèce d’entre-deux étrange. Il banalise l’exceptionnel, et c’est un problème.

J’aimerais qu’il capitalise davantage sur sa forme exceptionnelle, car rien ne garantit qu’elle continuera ainsi les prochaines années. Photo : Michelin Motorsport
Photo de couverture : Michelin Motorsport