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Pecco Bagnaia

Quelques heures après le Grand Prix de France, Pecco Bagnaia affirmait que ce week-end était dans le top 3 de ses pires en MotoGP. Certes, je ne suis pas dans sa tête, mais je connais assez bien sa carrière à force d’écrire dessus et je peux dire avec une certaine confiance que cette déclaration est un poil inexacte : c’est le pire, sans débat possible.

 

Rien n’allait

 

Pecco Bagnaia, que je croyais capable de se remotiver suite au Grand Prix d’Espagne, n’a pas été à la hauteur du challenge, tout simplement. Ça me fait mal de le dire, car les lecteurs de cette rubrique savent combien j’apprécie le pilote italien. Pour la confiance, il fallait absolument marquer quelques points sur ce circuit maudit, qui ne lui a encore jamais réussi au plus haut niveau. À vrai dire, il essuie désillusion sur désillusion depuis plusieurs années au Mans. Terrible abandon en 2022 juste après s’être fait doubler par Enea Bastianini, et nouvelle chute lors de la course dominicale en 2023, à la suite d’un accrochage avec Maverick Vinales. Puis, en 2024, un problème mécanique mit fin à son Sprint, avant que Marc Marquez ne le batte dans les derniers instants du Grand Prix pour le gain de la deuxième place.

 

Pecco Bagnaia

Pecco Bagnaia n’avait jamais marqué aucun point sur un week-end depuis l’introduction du format Sprint début 2023. Photo : Michelin Motorsport

 

Depuis sa victoire en Moto2 lors de la saison 2018, il n’a jamais vraiment brillé au Mans. Mais là, c’est plus grave que tout ce que j’ai pu mentionner avant. D’abord, il n’était pas dans le coup sur le plan de la vitesse. Comme c’est le cas depuis le début de l’année, il n’arrive pas à attaquer au guidon de la Desmosedici GP25. Cela faisait deux manches qu’il s’en sortait mieux avec des performances plus respectables en qualifications, mais là, Quartararo lui colle sept dixièmes sur un tour. Il s’élançait sixième derrière le Français, les deux frères Marquez, Aldeguer qui n’en était qu’à sa sixième course, et Maverick Vinales, tant qu’à faire.

Pendant le Sprint, il essuya sa première chute lors d’une épreuve cette saison. Le problème de « jouer la régularité » – ce qui est une sorte de mythe, il aimerait aller plus vite -, c’est qu’un seul abandon est tout de suite très pénalisant statistiquement parlant. En plus de ça, son moral, déjà proche de zéro, n’a pas dû être impacté positivement.

 

Le dimanche noir de Pecco Bagnaia

 

Allez, on se reconcentre. Après tout, ses adversaires aussi ont déjà fait des bourdes cette année. Le problème, c’est que, dans des conditions tortueuses, Bagnaia a tout perdu le dimanche. D’une part, il n’a pas capitalisé sur la bonne dynamique qu’aurait pu lancer le Grand Prix d’Espagne. De l’autre, il s’est enterré tout seul, avec des erreurs que l’on ne peut pas se permettre de faire à ce niveau de compétition.

J’en ai vu beaucoup défendre l’Italien en se basant sur deux arguments. Premièrement, qu’il a fait le bon choix de pneus, et, deuxièmement, qu’il s’est fait mettre par terre par Enea Bastianini. Pour moi, ces deux affirmations sont fallacieuses et je vais tenter de vous convaincre.

 

Des gommes empoisonnées

 

Pecco Bagnaia

Les frères Marquez ont affirmé, a posteriori, qu’ils avaient fait le bon choix pneumatique. Je suis surpris que Fermin Aldeguer, un rookie, ait beaucoup mieux géré cette situation que Bagnaia, présent en MotoGP depuis 2019. Photo : Michelin Motorsport

 

D’abord, je pense que le bon choix, pour les favoris, était bel et bien l’option slick au départ. Chausser ce pneu pluie empoisonné était une autre manière de courir à sa perte. Vous pensez peut-être que je suis fou, mais j’ai une explication. Au départ, la piste était plutôt sèche. Dès lors, Marc et Alex Marquez ont fait le choix de passer les slicks pour pouvoir bien attaquer dans les premiers tours, se mettre en confiance, avoir le contrôle sur la situation. Bagnaia, en restant en pneus pluie, était de ceux qui tentaient un pari, avec Zarco, Oliveira et les autres. Ainsi, il n’avait pas la meilleure gomme au meilleur moment, ce qui n’a pas été le cas de Marquez qui s’est adapté à ce que la piste lui disait. Et ça constitue une erreur.

L’année dernière, j’avais, légitimement, je crois, reproché à Martin de ne pas avoir suivi la stratégie de Bagnaia lorsque des gouttes s’abattaient sur le tracé de Misano. Mais là, pourquoi Bagnaia n’a-t-il pas imité Marquez, qui, en plus d’être son rival, est historiquement la référence dans de tels moments ? Oui, la météo annonçait de la pluie continue, mais ceux qui connaissent l’âme du Mans savent qu’il ne faut se fier qu’à son instinct. C’est facile de constater cela après la victoire de Zarco. Il aurait très bien pu arrêter de pleuvoir à tout instant, et les frères Marquez, entre autres, n’auraient pas été plus pénalisés que ça, contrairement à Johann qui ne jouait rien d’important au général et dont on aurait pas parlé s’il avait abandonné ou terminé hors du top 10.

Son tour d’installation me donne raison, car, comme l’a souligné Dani Pedrosa, on l’a vu lever les bras, comme s’il se disait qu’il avait fait une nouvelle erreur dans son choix pneumatique. Ce n’est pas la meilleure manière d’aborder une course, surtout au vu de sa situation au championnat.

 

Un accrochage prévisible

 

Ce bon choix stratégique, qui s’est avéré être une erreur tactique, ne le mettait pas dans les meilleures conditions au départ. Aussi bien sur le plan des sensations au guidon que mental. Du coup, son envol fut totalement raté, et son approche du premier virage catastrophique. Il a freiné beaucoup trop tôt, et pointait 12e au moment de sa chute.

 

 

Derrière arrivait Enea Bastianini, donc, beaucoup plus rapide et à l’intérieur. Le pilote Tech3, sur le vibreur, percuta Bagnaia et traça sa route. Bien évidemment, il est en tort, je n’essaie pas de vous convaincre du contraire. Mais Bagnaia sait pourtant que les premiers virages sont cruciaux à notre époque, et que partir de si loin revient à s’exposer à des risques majeurs. C’est valable sur le sec, mais d’autant plus lorsque la piste est illisible et que certains sont en slicks alors que d’autres ont des gommes rainurées. Il s’est lui-même mis dans une situation beaucoup trop délicate pour son statut et il était le premier à l’avouer en conférence de presse.

Êtes-vous d’accord avec mon analyse ? Je reviendrai ultérieurement sur ses chances au championnat, car l’article est déjà assez long. Dites-moi ce que vous en avez pensé en commentaires !

Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.

 

Après la course, il n’a même pas incriminé Bastianini car il sait que le jugement était compliqué, mais qu’il était aussi anormalement lent au point de corde. Photo : Michelin Motorsport

 

Photo de couverture : Michelin Motorsport

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