Oui, nous n’avons disputé que six Grands Prix. C’est vrai que l’année est encore longue, bien sûr, mais la situation est telle qu’il est déjà l’heure de se poser cette question. Pecco Bagnaia peut-il encore prétendre au titre MotoGP cette année ? Mathématiquement, oui, bien sûr, mais qu’en dit la piste ? C’est ce que nous allons essayer de déterminer ensemble.
Un retard conséquent
À l’heure où ces lignes sont écrites, Pecco Bagnaia accuse un retard de 51 points. Face à n’importe quel pilote dans l’histoire, ça serait très difficile de le remonter à motos égales, mais là, il s’agit de Marc Marquez : le niveau est encore relevé d’un cran. À raison de 37 points par week-end, il peut toujours s’imposer, bien sûr, mais je dois reconnaître que je ne sais pas comment Bagnaia ou n’importe quel autre animateur de ce championnat pourrait remonter autant de terrain sur un tel adversaire.

Marc Marquez a fait preuve d’une intelligence rare au Mans. Photo : Michelin Motorsport
Marc Marquez n’a fait que deux erreurs cette année, et, pas de chance, c’est arrivé lors de Grands Prix. Mais Le Mans nous a montré, pour la première fois en 2025, le Marquez calculateur, celui qui gère, qui ne se laisse pas submerger par le désir de victoire. Et ça, ce n’est pas bon pour Bagnaia. L’Italien n’est déjà pas à l’aise avec sa Desmosedici GP25, alors, s’il veut gagner de nouveau, il doit soit trouver une solution miracle pour redevenir aussi dangereux qu’avant au freinage et sur les dépassements, ou soit espérer une défaillance de Marquez. Mais pourtant, des deux, Bagnaia a le plus de chance de chuter.
Depuis 2022, Bagnaia n’a jamais été capable d’imprimer un rythme régulier toute l’année. À chaque fois, depuis trois saisons, le titre se joue à la dernière manche. Marc Marquez, en revanche, a prouvé à de multiples reprises qu’il était capable d’écraser une saison et de scorer de très hautes moyennes de points. J’aime voir Bagnaia chasser, mais Marquez est d’un tout autre niveau que Martin, et pas nécessairement du point de vue de la vitesse : c’est la régularité dans la performance qui fait la différence, et c’est, je crois, ce que Bagnaia va payer cette année.
Ce constat aurait fait suffisamment peur si les deux étaient à égalité. Le problème, c’est que Bagnaia doit composer avec ce point faible tout en reprenant 51 points à l’un des meilleurs pilotes de tous les temps, qu’il n’a pas encore pu chatouiller cette année. Il doit être plus régulier que Marquez, et aussi plus rapide ; un paradoxe pour un pilote qui n’est pas habitué à gérer une saison de cette manière.
Une différence incroyable
Deuxième point qui doit faire trembler Bagnaia, l’écart de vitesse entre lui et Marc Marquez. Je persiste à dire que l’Italien n’est pas à son aise avec cette GP25, et je crois Davide Tardozzi, qui affirme que les succès de Marquez n’impactent pas le moral de Bagnaia. D’accord. Mais pour gagner un titre mondial, il faut d’abord gagner. Et Bagnaia n’a jamais ne serait-ce qu’approché Marc Marquez cette année. Il y a ces deux, trois tours à Jerez, mais peut-être ai-je surestimé leur importance, a posteriori. Mon analyse n’était peut-être pas la plus pertinente sur ce point et je m’en excuse.

Le problème d’être régulier sans être en capacité de jouer devant, c’est qu’une erreur met en grande difficulté sur le plan comptable. Photo : Michelin Motorsport
Après tout, même à Jerez, on a vu que Marquez était assez nettement au-dessus du point de vue du rythme suite à sa chute. Sur les autres circuits, plusieurs secondes séparaient les deux hommes à chaque fois. Notez que je n’ai même pas évoqué Alex Marquez, mais Bagnaia ne l’a jamais inquiété non plus. GP25 ou pas, je ne m’attendais pas à une telle différence de niveau entre les deux, je le confesse.
Gardez en tête le thème de cet article, la victoire au général. Comment voulez-vous que Bagnaia triomphe alors qu’il ne peut pas mettre la moindre pression sur Marquez une fois les feux éteints ? Certains me répondront peut-être que nous ne sommes qu’au sixième Grand Prix, d’accord, mais je vois la situation à l’envers : en six Grands Prix (soit douze courses), Bagnaia, double champion du monde et onze fois vainqueur la saison passée n’a pas embêté Marc Marquez une seule fois ! Dans les faits et, compte tenu de la dynamique post Le Mans, cet écart de 51 points est plus susceptible d’augmenter que l’inverse.
Conclusion
Ceux qui suivent cette rubrique depuis longtemps savent à quel point j’adore Pecco Bagnaia. Il est l’un de mes pilotes préférés, et je trouve souvent les gens injustes avec lui. Mais, malgré l’attachement que je lui porte, je ne vois pas comment il peut revenir à la régulière. Marc Marquez peut toujours se blesser, d’accord, on le sait tous. Mais, hormis cette triste éventualité, il y a un tel écart de niveau entre les deux, et ce, peu importe le profil du tracé que ça ne laisse que peu d’espoir au n°63.
Bagnaia se bat contre l’histoire. Partager le box avec Marc Marquez maintenant, c’est comme affronter Ayrton Senna en 1991, ou Nadal à Roland en 2010. Ça donne l’impression d’être écrit à l’avance. Cependant, je continue de penser que des tracés favorables à Bagnaia arrivent, comme le Mugello, historiquement difficile pour Marquez, ou Assen. Puis, il y a cette tournée outre-mer où tout peut basculer, et où j’aurais tendance à donner avantage Bagnaia sauf à Motegi. Mais que dire du Sachsenring, de Brno, et de tous les autres ? En étant réaliste, Marquez se dirige droit vers son neuvième sacre.
Qu’en pensez-vous ? Dites-le-moi en commentaires !

Marc Marquez est un monstre qui ne laisse rien passer. Photo : Michelin Motorsport
Photo de couverture : Michelin Motorsport