Le paddock MotoGP vient de vivre un séisme stratégique. Alors que les regards étaient tournés vers la piste, une transaction historique se concluait en coulisses : Günther Steiner, l’ancien boss ultra-médiatique de Haas F1, fait son entrée fracassante dans le monde des Grands Prix en rachetant l’emblématique équipe Tech3 à Hervé Poncharal pour 2026. Dans un entretien exclusif, le Sud-Tyrolien lève le voile sur des négociations expéditives et révèle comment Dorna a verrouillé le deal.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le plan de Steiner n’était pas initialement de reprendre une structure existante. Son ambition première était bien plus audacieuse.
« Notre idée était d’acheter une licence et de créer une nouvelle équipe », révèle Steiner. Mais Dorna a immédiatement coupé court à toute velléité de création. Le message de l’organisateur a été sans équivoque : « onze équipes sont têtes de série. Cela signifiait que la seule solution était de reprendre une équipe existante. »
Un veto stratégique qui démontre la volonté de Dorna de contrôler l’évolution du plateau et de préserver l’écosystème actuel, quitte à bloquer l’arrivée de nouveaux acteurs trop indépendants.
Le récit de Steiner sur Speedweek montre l’importance cruciale des réseaux et de l’intermédiation de Dorna dans toute opération sensible.
« Mon premier contact concret a été avec Carlos Ezpeleta. J’ai aussi connu Carmelo Ezpeleta, par l’intermédiaire de mon très bon ami Carlos Sainz », explique-t-il, soulignant le rôle d’intermédiaire joué par la famille Ezpeleta. « L’étape suivante a consisté pour Carmelo à me présenter à des personnes clés du paddock, dont Hervé Poncharal. »
La philosophie d’achat radicale de Steiner : « Pas de négociation, une offre équitable«
Une fois les présentations faites, les choses se sont accélérées à une vitesse folle : premier contact concret : Grand Prix d’Austin. Deuxième réunion et accord de principe : Grand Prix de Silverstone, deux mois plus tard. Signature : Immédiatement après, les avocats ont conclu le contrat.
Le plus surprenant dans cette transaction reste la méthode de négociation – ou son absence – de la part de Steiner. Dans un monde où l’on marchande âprement, l’homme d’affaires a adopté une approche frontale et cash.
« C’est moi qui voulais acheter. Je savais que le MotoGP suscitait un vif intérêt, alors j’ai fixé un objectif de prix […] et je lui ai fait une offre – et Hervé a accepté. »
Sa logique est implacable : « je n’ai pas entamé les négociations avec une stratégie de prix bas, pourquoi l’aurais-je fait ? Hervé n’était pas obligé de vendre quoi que ce soit, mais je voulais l’acheter, et il y avait donc une offre équitable, et c’est tout ! »
Preuve que Steiner ne vient pas pour tout casser, il a tenu à préserver l’âme de l’équipe. Lorsque Poncharal lui a demandé comment rebaptiser la structure, sa réponse a été immédiate : « Tech3. »
« J’ai un immense respect pour ce qu’Hervé et son équipe ont accompli, et je tiens à conserver la marque Tech3. C’est assurément une bonne chose pour le vendeur lorsqu’on a bâti quelque chose sur des décennies. »
L’arrivée de Steiner marque un tournant : celui de l’entrée du MotoGP dans une ère de business plus agressif, porté par des personnalités médiatiques et des méthodes héritées de la F1. Reste à savoir si ce choc des cultures fera de Tech3 un nouveau géant ou si le paddock traditionnel saura digérer ce nouvel arrivant au style aussi direct que disruptif.