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Marquez

Les images sont terribles. Lors du Grand Prix d’Indonésie, Marc Marquez a très lourdement chuté, emporté par Marco Bezzecchi dans le premier tour de course. Même si le diagnostic n’est pas encore certain à l’heure où ces lignes sont écrites, on suspecte une grosse blessure à l’épaule – peut-être aux tendons de la clavicule. C’en est trop, ça doit s’arrêter.

 

L’ancien Marquez

 

Avant de passer au sujet qui fâche, j’aimerais rapidement revenir sur le week-end de Marc Marquez. Sans compter la chute, c’était, assez facilement, sa pire prestation de l’année. Dès le vendredi, le nonuple champion du monde était en grande difficulté, et a même subi deux chutes, dont une assez conséquente, qui aurait pu mal tourner. Globalement, j’ai trouvé Marc Marquez assez imprudent. Certes, il disait pouvoir se contenter d’une septième place, conscient qu’il ne pouvait jouer la gagne, mais, dans ses actes, il me paraissait trop incisif, trop agressif. J’avais comme l’impression de revoir le Marquez de 2023, qui, lorsqu’il savait qu’il ne pouvait pas gagner, tentait le tout pour le tout, quitte à chuter.

 

Marquez

Des pilotes ont affirmé qu’il devrait y avoir de l’asphalte où Marquez est tombé. Photo : Michelin Motorsport

 

Lors du Sprint, il percuta Alex Rins, et reçut un long lap de pénalité – justifié, à mon sens. De toute évidence, s’il ne pouvait pas s’imposer, il désirait quand même faire bonne figure. C’est louable, en un sens. Le problème, c’est qu’il avait un niveau d’engagement disproportionné par rapport à ses capacités sur ce circuit, et les performances de sa machine. Pour une raison inconnue, mais nous y reviendrons plus tard dans la semaine, la Desmosedici GP25 était totalement hors-jeu à Mandalika, aucune des trois motos n’a fait de bon résultat. M’est avis que tout cela n’était pas nécessaire, au vu de son statut de champion et de sa nouvelle philosophie. D’ailleurs, il s’en voulait pas mal d’avoir chuté deux fois lors de la Practice.

Malheureusement, ça n’a finalement pas changé grand-chose, car il s’est fait harponner par Marco Bezzecchi dans le premier tour du GP. L’Italien, piégé dans l’aspiration de Marquez, n’a pas pu éviter l’accrochage après un départ raté. Le « Bez » s’en sort apparemment sans dommage – miraculeusement d’après Joan Mir –, mais mérite quand même de recevoir une pénalité au prochain Grand Prix pour cette action.

 

Jusqu’à quand va-t-on tolérer ça ?

 

 

Revenons-en au sujet principal de cet article. Combien de blessures va-t-on tolérer avant de changer les règles ? Cela devient un véritable problème en MotoGP, et dans la sphère médiatique, personne n’ose en parler ; ça me gêne terriblement. Je me souviens qu’à la fin de l’ère 800cc, en 2011, tout le monde disait au revoir sans regret à ces motos traîtres au possible. Si ma mémoire ne me fait pas défaut, Sport Bikes avait même titré Rot in peace (pourris en paix) avec, pour photo principale en tête de l’article, un violent highside de Casey Stoner. Mais désormais, il y a autant de blessés qu’à l’époque !

De nos jours, c’est l’hécatombe. Ces motos bien trop puissantes, dotées des dispositifs Holeshot device et Ride height device que tout le monde qualifie de dangereux, causent perte et fracas sur la grille. Si l’on prévoit l’absence de Marquez à Phillip Island, pas moins de onze pilotes auront manqué au moins une course pour blessure. Onze, soit la moitié des titulaires ! C’est inadmissible, et en plus, ça nuit au sport.

Pourquoi cette épidémie ? Plusieurs théories existent, et toutes sont probablement vraies. Premièrement, les motos en elles-mêmes. Ces dragsters sont bien trop puissants, bien trop sophistiqués et assistés électroniquement, ce qui fait parfois du pilote un dangereux passager – c’était l’avis de Casey Stoner. L’aérodynamique pose aussi problème, car il n’est pas rare, pour nos héros, de se faire aspirer sans ne rien pouvoir y faire. Il y aura un changement de réglementation en 2027, d’accord, mais pourquoi attendre cette date pour bannir les RHD et Holeshot device, critiqués de tous, et éminemment dangereux lorsqu’ils se déclenchent – les motos deviennent de vrais top fuels –, comme lorsqu’ils ne se déclenchent pas. Ce n’est pas comme s’il n’y avait jamais eu de grave accident au départ depuis l’introduction de ces dispositifs !

 

Marquez

Cela écourte aussi des carrières, ce qui fait que l’on a moins le temps de s’attacher aux pilotes. C’est perdant perdant, mais bon, les millions pèsent lourd. Photo : Michelin Motorsport

 

Approuver et encourager le développement de tels facteurs de danger est inconscient. Attend-on un drame pour enfin se pencher sur le sujet ? D’ici à début 2027, il reste une cinquantaine de courses, bien assez pour imaginer le pire.

 

Le mauvais chemin

 

Bon, ça, tout le monde s’accorde à le dire. Mais le deuxième point qui, lui, n’est jamais évoqué, est le nombre de courses. Il y a bien trop d’épreuves par an. Tout le monde y trouve son compte, car, plus d’événements signifie plus de revenus. Le problème, c’est que ces gens ne comprennent pas que cela nuit gravement au sport. Plus de courses, c’est plus de stress pour le corps, une probabilité de se blesser accrue, et une attente moindre entre les Grands Prix, ce qui tue l’intérêt. Le pire, c’est que c’est une constante qui se vérifie dans d’autres disciplines.

Prenons la NBA, le championnat nord-américain de basketball. Il y a 82 matchs de saison régulière, sans compter les play-offs. Adam Silver, le boss, pousse pour rajouter plus de matchs (comme cet affreux tournoi hivernal), se préoccupant davantage de l’artiche que de la santé de ses joueurs. Résultat : chaque année, les phases finales sont ruinées par des blessures, et l’équipe victorieuse n’est pas nécessairement la meilleure, mais celle qui a le moins de joueurs à l’infirmerie. Idem en football, avec la création de la Nations league, entre autres. Lorsque les joueurs se plaignent légitimement du nombre de matchs, la foule leur dit : « au vu de ce que vous êtes payés, vous pouvez jouer plus ». Mais ce sont les mêmes qui se lamentent sans cesse que le football meurt à petit feu, qu’il n’y a plus de grands joueurs, etc. Ils n’ont rien compris.

Eh bien, c’est pareil en MotoGP. Avoir moins de courses permettrait d’avoir un meilleur spectacle à chaque épreuve, car un Grand Prix revêtirait d’une importance décuplée s’il y en avait moins au calendrier. Revenons à la NBA. Qu’ont trouvé les équipes pour faire face à ce problème ? Le load management, cancer qui touche désormais toutes les superstars. En gros, c’est le fait de prétexter une blessure mineure pour économiser le joueur sur des matchs moins importants. Ainsi, ils peuvent arriver en meilleure forme quand ça compte.

En continuant sur ce chemin, le MotoGP s’expose à une mascarade similaire. Si, dans dix ans, le championnat est long de 24 à 26 GP – comme c’est le cas en F1 actuellement –, on peut très bien imaginer que celui qui le remporte ne soit pas le plus rapide, mais celui qui s’est le plus préservé en attaquant moins. Imaginez l’interview d’après course : « J’ai préféré rouler pour une cinquième place, car la saison est très longue ». Ridicule, n’est-ce pas ?

Qu’avez-vous pensé de la chute de Marc Marquez en Indonésie ? Ne trouvez-vous pas, comme moi, qu’un drame est imminent au vu du nombre de blessés que nous avons tous les ans ? Dites-moi tout en commentaires !

Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.

 

Pas moins de 44 départs sertont au programme en 2026. C’est beaucoup trop. Photo : Michelin Motorsport

 

Photo de couverture : Michelin Motorsport

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