Paradoxe cruel pour Enea Bastianini : au moment où il redressait enfin la barre chez Tech3, son chef d’équipe, Alberto Giribuola, a préféré plier bagage. Destination ? Pramac, pour travailler avec Toprak Razgatlioglu en 2026. Une décision qui a mis le feu aux poudres chez KTM, Tech3… et dans la tête du pilote italien.
Il y a des séparations qui laissent des traces. Celle entre Enea Bastianini et Alberto Giribuola en est une. Leur duo venait tout juste de retrouver une forme de cohésion, après des mois de galères sur la RC16. En Catalogne, Enea signait son premier podium avec Tech3. Et pourtant, à peine ce souffle retrouvé, le couperet est tombé.
Difficile de faire plus clair. Selon GPOne, Bastianini aurait lancé un ultimatum à Giribuola après avoir appris son départ vers Pramac : « soit tu restes avec moi jusqu’à la fin de 2026, soit tu pars tout de suite. »
Le chef d’équipe n’a pas eu à réfléchir longtemps. Moins de deux semaines plus tard, il n’était plus dans le box Tech3. Le pilote italien, lui, se retrouvait orphelin de l’homme qui l’avait accompagné lors de sa première montée en MotoGP. Un second divorce, après une première séparation à la fin de la saison 2023, déjà chargée en regrets.
La saison 2025 de Bastianini était jusque-là en demi-teinte. L’ancien pilote usine Ducati peinait à trouver sa place dans le projet KTM, au point que certaines rumeurs le disaient prêt à casser son contrat à mi-saison. Puis, il y a eu l’Autriche (5e), la Catalogne (podium), Brno (chute alors qu’il visait le top 3) et une sensation de renouveau.
Hervé Poncharal : « Enea Bastianini a été déçu par cette séparation. C’était douloureux pour lui »
Giribuola y était pour beaucoup. Comme le rappelle Hervé Poncharal, patron de Tech3 : « Enea et Alberto se comprenaient parfaitement. Ils formaient une équipe bien coordonnée. Je comprends pourquoi Enea a été déçu par cette séparation. C’était douloureux pour lui. »
Poncharal ne cache pas son désarroi : « il est impossible de reformer une telle alchimie en quelques jours. Il n’y avait aucun plan B. Cette séparation a eu lieu presque du jour au lendemain. »
Le départ de Giribuola pour travailler avec Razgatlioglu chez Pramac en 2026 ne surprend personne dans le paddock. Le Turc est l’un des rookies les plus attendus des prochaines années, et un staff technique de haut niveau se positionne déjà autour de lui.
Mais pour KTM, cette manœuvre tombe au plus mauvais moment. Après une première moitié de saison laborieuse, la marque autrichienne commençait enfin à rivaliser avec les Ducati sur certains circuits. La dynamique était enclenchée.
Ce que cette histoire révèle, c’est aussi l’importance capitale du lien humain et technique entre un pilote et son chef d’équipe. Dans un MotoGP où les motos se ressemblent de plus en plus, ce sont les binômes stratégiques qui font la différence.
Bastianini, avec Xavi Palacin, entame une nouvelle (énième ?) reconstruction, à un moment charnière. À bientôt 28 ans, il joue plus qu’une saison : il joue sa légitimité pour rester dans le projet KTM à long terme.
Si la perte de Giribuola est une tuile à court terme, elle ne doit pas être le prétexte d’un effondrement en 2026. KTM a misé gros sur Bastianini après l’avoir récupéré du giron Ducati. À lui de prouver qu’il peut encore performer sans filet, sans mentor, et sans excuse. La moto est en progrès. Le mental est là. Mais la pression, elle, est totale.