Après des années d’errance technique, de communication confuse et de résultats à la dérive post-Marquez, Honda est enfin en train de retrouver le chemin de la compétitivité. La saison 2025 a marqué un tournant silencieux mais radical : la maison aux ailes dorées est passée de la survie… à la reconquête.
C’est Johann Zarco qui a été le premier à envoyer un signal fort. Avec une quatrième place à Doha, un podium à Silverstone et une victoire monumentale au Mans, le Français a prouvé que la RC213V avait de nouveau des crocs.
Son début de saison tonitruant a remis Honda dans le viseur… et la victoire dans l’Hexagone a servi de déclencheur psychologique autant qu’industriel. « Les premiers signes positifs étaient déjà visibles en mai et juin », confirme Stefan Bradl, témoin et acteur du redressement. « La victoire de Zarco au Mans a marqué un cap. »
Dans le box officiel HRC Castrol, Luca Marini et Joan Mir ont aussi fini par sortir de l’ombre. Le premier enchaîne les top 6 depuis le Sachsenring, tandis que le second a brillé avec un podium précieux au Japon.
Un an plus tôt, cela aurait relevé du fantasme. En 2025, cela ressemble à un projet structuré.
Stefan Bradl : « l’accélération a fait un bond, la vitesse de pointe est là. Avant, c’était exaspérant chez Honda »
Dans les coulisses, un homme a encaissé les coups et préparé le terrain du renouveau : Stefan Bradl. Pilote d’essai, mémoire vivante du HRC depuis 2011, il a vécu toutes les déroutes, du chaos post-Marquez aux expérimentations malheureuses (bras oscillants hybrides, châssis Kalex…).
Mais aujourd’hui, il se dit optimiste, notamment depuis l’arrivée du nouveau moteur en septembre : « l’accélération a fait un bond, la vitesse de pointe est là. Avant, c’était exaspérant. » Et surtout, le carénage brûlant – cauchemar thermique des pilotes – est enfin résolu.
Mais il y a aussi et peut-être aussi surtout ça : exit l’ère du pilote unique autour duquel tout tournait. Fini le dogme “tout pour Marquez”.
En 2025, le HRC a changé de logiciel. On écoute Zarco, Marini, Mir. Les retours sont croisés, les validations collectives. Bradl le résume : « il n’y a plus de numéro un. Et c’est une très bonne chose. »
Mais ce revirement, on le doit surtout à Romano Albesiano, ancien cerveau technique d’Aprilia, aujourd’hui responsable du projet RC213V. Son arrivée a structuré l’aéro, rationalisé les essais, et intégré Aleix Espargaró comme nouvel atout du programme test. Une révolution discrète, mais efficace.
Bradl ne le cache pas sur motosan : « si on accroche encore un podium en 2025, ce sera un énorme signal. Et en 2026, on pourra regarder Aprilia dans les yeux. En 2027 ? Se battre pour le titre. » Cela semble fou ? Peut-être. Mais on aurait dit la même chose de Ducati il y a dix ans.
Honda n’a pas juste réparé une moto. Il a reconstruit une équipe, une méthode, un cap. Et même si les résultats ne sont pas encore flamboyants, la courbe est clairement ascendante. La RC213V n’est plus une punition. C’est à nouveau une promesse.