Les essais de Valence ont confirmé ce que tout le paddock commençait à murmurer : l’Aprilia 2025 est une arme, et la version 2026-2027 pourrait bien faire trembler Ducati. Fabiano Sterlacchini, directeur technique d’Aprilia, a livré une analyse rare, lucide et ambitieuse — un véritable décryptage stratégique du présent et de l’avenir de Noale.
Dès l’entame, Sterlacchini ne cache pas sa satisfaction : « honnêtement, c’est un peu plus que ce que nous avions prévu. (…) Nous avons dépassé nos objectifs. C’est excellent, et même mieux que ce que nous espérions. »
L’Aprilia a été compétitive avec plusieurs pilotes, preuve que la base technique fonctionne indépendamment des styles de pilotage.
Sterlacchini confirme que les tests de Valence étaient bien plus qu’une simple session de transition :
« Nous avons apporté des solutions à certains problèmes aérodynamiques, et nous avons également testé un châssis différent avec Jorge. »
Une approche bien plus agressive que les ajustements classiques d’intersaison :
« Nous avons effectué des modifications plus radicales que celles habituellement réalisées le week-end. »
Et sur l’aérodynamique, le directeur technique ouvre complètement le capot :
« L’objectif est l’amélioration globale. (…) La vitesse de pointe aide les dépassements, la traînée aide le freinage. Nous cherchons à optimiser tous les aspects pour obtenir le coefficient dynamique optimal à chaque étape du pilotage. »
Avec la nouvelle réglementation, Aprilia peut optimiser ses ressources : « le gel du moteur est un atout majeur. (…) Nous pourrons arrêter le développement du moteur 2026 en avril et commencer celui du moteur 2027. »
En clair : Aprilia développera deux motos en parallèle pendant les premiers mois de 2026. L’usine de Noale peut prendre de l’avance sur ses rivaux.
Une situation idéale, surtout après une saison où la RS-GP a été considérée comme la deuxième meilleure moto du plateau, voire la meilleure sur certains circuits.
À la question « à quel pourcentage êtes-vous de Ducati ? », Sterlacchini coupe court : « la question n’est pas pertinente. (…) Il n’y a qu’une seule façon d’améliorer : perfectionner la moto précédente. »
Puis il nuance en élargissant le scope : « nous observons aussi les performances de Honda et KTM, notamment Acosta, Mir, et parfois Marini. Ils progressent. » Un rappel qui signale que la concurrence ne se limite plus à Ducati.
Fabiano Sterlacchini : « il nous faut trouver la bonne alchimie avec le style de pilotage de Jorge Martin »
Supporter un pilote en difficulté fait partie du jeu, et Sterlacchini ne se défile pas sur le cas Jorge Martin :
« Il nous faut trouver la bonne alchimie avec le style de pilotage de Jorge. (…) Son style actuel ne permet pas de corriger le problème. » Ainsi, la RS-GP est ultra performante… mais exigeante. Martin doit évoluer — comme Bezzecchi et Raul Fernandez l’ont fait.
Car s’il y a un point du test qui semble avoir bluffé tout le monde, c’est Raul Fernandez : « honnêtement, non, je ne m’attendais pas à ce qu’il soit à ce niveau. »
Et Sterlacchini insiste sur moto.it : « le MotoGP est d’une complexité énorme : freinage, traction, pneus, accélération… Je ne m’attendais pas à ce qu’il gère les courses comme à Valence et Phillip Island. »
Le ton est clair : Raul a surpris… et il a gagné son ticket pour être considéré comme une pièce maîtresse du futur projet.
Fabiano Sterlacchini détaille aussi l’approche collaborative — rare dans un paddock où les données sont souvent verrouillées :
« À la fin de chaque journée, nous avons une réunion avec les deux équipes et tous les techniciens. (…) Nous attribuons différents tests à différents pilotes selon leurs sensibilités. » Soit une structure technique souple, adaptée à un programme multi-pilotes.
Aprilia sort de Valence plus forte que jamais. Entre des innovations aérodynamiques radicales, un nouveau châssis prometteur, un gel moteur qui libère du temps pour 2027, une équipe de pilotes solide, un Raul Fernandez en pleine explosion, et une lucidité rare quant à la concurrence, Aprilia confirme sa place parmi les leaders du MotoGP moderne.
Et tout indique que Noale prépare déjà la moto qui pourrait attaquer Ducati frontalement en 2026-2027.
