Dans une interview accordée à notre confrère Peter McLaren pour Crash.net, Paul Trevathan illustre comment Pedro Acosta est passé de l’ombre à la lumière, lors de la saison MotoGP 2025.
En quittant le team Tech3, où il avait pourtant effectué une
brillante année de rookie, pour l’équipe officielle Red Bull KTM
Factory Team, Pedro Acosta se figurait se battre avec les
meilleurs, au tout premier plan.
Hélas, les ennuis financiers de la firme autrichienne en ont décidé
autrement et, au contraire, l’Espagnol de 21 ans s’est rapidement
retrouvé plongé dans la frustration, les incertitudes quant à
l’avenir de KTM ayant gelé le développement de la RC16.
Après les quatre premiers Grands Prix, le requin de Mazarron figurait ainsi à la 11e position du classement général, et le bilan de la première moitié de saison était sans appel : aucun podium inscrit par Pedro Acosta, contre 5 durant la même période un an auparavant.
Paul Trevathan, qui veille aux bons réglages de la RC16 de Pedro Acosta depuis son arrivée en MotoGP, se rappelle…
Paul Trevathan
: « Beaucoup de
frustration, c’est le mot juste, au début, car les choses ne se
déroulaient pas comme prévu. La situation de l’entreprise,
notamment financière, suscitait beaucoup d’émotion. Personne ne
l’avait vu venir. Nous avons fait de notre mieux à l’époque pour
développer l’activité de la bonne manière, pour essayer de relancer
les choses, mais nous étions quelque peu limités dans nos
actions.
Pedro avait de si grandes
ambitions pour cette année. Et puis, pour faire simple, il a
complètement perdu le fil. Il ne comprenait plus. Il refusait
d’écouter. Il était tout simplement frustré. Extrêmement
frustré. Il voulait toujours performer,
alors il a poussé la moto à des limites qu’elle ne pouvait pas
supporter. »
Durant les quatre premières manches, le pilote et le team ont ainsi plongé dans l’impuissance…
Paul Trevathan
: « À ce moment-là, nous
ne pouvions pas vraiment évoluer. Nous avons donc commencé l’année
avec la même moto que l’année précédente. Et tous les autres
constructeurs avaient progressé.
On a
tout essayé pour trouver une solution. Mais on s’est peut-être un
peu perdus et on a trop forcé, en se demandant simplement :
« Si on arrive à faire ça, est-ce que ça pourrait aider pour
ça ? »
Je ne blâme personne.
Honnêtement, les ingénieurs n’avaient rien sur quoi travailler. On
ne pouvait rien commander. C’était la réalité. Et les gars ont
travaillé très dur pour essayer de trouver des idées, des petites
choses… « peut-être, peut-être, peut-être ».
Et puis, on a un peu perdu le fil. »
Jerez, et surtout son test, ont marqué un tournant pour les hommes en orange…
Paul Trevathan
: « De plus, il souffrait
de douleurs à l’avant-bras en début d’année. Je dirais que nous
avons fait un grand pas en avant après les essais de Jerez. Nous
avons modifié quelque chose sur la moto, ce qui a vraiment permis
de régler le problème. Ensuite, il s’est fait opérer du bras
et les choses ont commencé à s’améliorer petit à petit. C’est un
pilote qui préfère les stop and go, et sur les circuits fluides où
il a généralement eu des difficultés, comme Silverstone ou Assen,
il s’est beaucoup mieux débrouillé.
Il a aussi reçu l’aide de Carmelo Morales, qui
est arrivé comme coach pilote aux côtés de Mika (Kallio). Parce que
Pedro a toujours voulu deux pilotes en bord de piste. Plus il y a
d’observateurs, mieux c’est. »
Taciturne et peu ouvert sur l’extérieur, Pedro Acosta n’a rien lâché, continuant à vivre à 100% pour le MotoGP et poussant son équipe sans relâche, mais en changeant d’approche et en se fixant d’autres objectifs…
Paul Trevathan
: « Alors on s’est dit :
d’accord, essayons de trouver une certaine régularité, d’essayer
d’être dans les cinq premiers, d’être irréprochables et de faire de
notre mieux. Et pour être honnête, il
s’en est sorti de façon fantastique !
En tant que pilote et en tant qu’être humain, je pense qu’il
a énormément progressé. Il comprend beaucoup mieux
la MotoGP . Il
comprend peut-être mieux les étapes nécessaires pour devenir
champion. Il exploite la moto à fond. Il
nous pousse comme jamais dans le box, à chaque séance, tous les
jours. Pendant les semaines (entre les courses), c’est un rythme
effréné, il nous pousse sans relâche. »
Conjointement à l’arrivée de nouvelles pièces, cette approche fonctionne et, à défaut de victoire, donnera 12 podiums durant la deuxième partie de saison et la 4e place au classement final du championnat au terme d’une remontée spectaculaire.
Paul Trevathan
: « Honnêtement, je suis
vraiment fier. Qu’il ait pu renverser la situation après avoir
traversé une période aussi sombre, avoir été si en colère contre le
monde entier, et même contre lui-même, cela témoigne d’une grande
maturité et d’une forte volonté.
Les désirs de ce garçon sont d’un tout autre niveau
!
C’est incroyable à quel point il se
surpasse et pousse les autres à se dépasser. Et il n’est pas du
genre à critiquer les autres joueurs. Il maîtrise parfaitement ses
émotions sur le terrain. »« Il ne nous a jamais reproché
quoi que ce soit en tant qu’équipe. C’est donc un aspect très
appréciable. »
Aujourd’hui, Pedro Acosta apparaît presque serein dans le paddock, même s’il reste lucide et impute légitimement à KTM ses performances de début d’année.
On le voit même parfois sourire…

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