Il est l’heure de débriefer cette saison. Comme tous les hivers depuis deux ans, cette chronique analyse en détail la campagne de chaque pilote, du moins bien classé au champion du monde. Il s’agit là d’apporter un point de vue argumenté sur la performance de chacun de nos héros, afin d’en discuter tous ensemble. Vous êtes prêts pour ce nouveau volet, consacré à Fabio Quartararo ? C’est parti !
L’épisode d’hier était consacré à Raul Fernandez ; retrouvez-le en cliquant ici.
Une année à retenir…
Un peu comme pour Johann Zarco, il est assez difficile d’analyser la campagne 2025 de Fabio Quartararo. D’un côté, le Français a montré une vitesse incroyable, et s’est même permis de rafler cinq pole positions, dont quatre face à l’un des meilleurs Marc Marquez de tous les temps. C’est non négligeable. Franchement, en qualifications, très peu dans l’histoire peuvent rivaliser avec « El Diablo ».

Trois poles d’affilée, ça force le respect. Photo : Michelin Motorsport
De l’autre, les résultats, eux aussi, étaient corrects. Il a performé au bon moment, et s’il était moins efficace qu’en 2023 où il n’avait gâché aucune occasion, il a tout de même montré une régularité extrême, de très bons rythmes, et une capacité de revenir à l’échelle d’un week-end hors norme. De nombreuses fois, on l’a vu peiner le vendredi, puis monter en puissance et finalement accrocher une bonne place le dimanche.
Côté accomplissements, ça se limite à un podium dominical et deux top 3 en Sprint, ce qui est assez peu, finalement, mais il a souvent gravité autour du top 5 avec, de facto, la pire moto du plateau si l’on s’en tient aux chiffres. Il termine cette année neuvième, loin, très loin devant ses collègues, avec 201 points, assez proche des 214 de Fermin Aldeguer, huitième. Personnellement, je l’avais vu 11e, à peine plus bas : je ne m’étais pas vraiment trompé à son sujet, même si intégrer le top 10 fait quand même une différence.
Alors, oui, cette année est à retenir, car c’est assurément sa plus belle depuis 2022, et sa vitesse m’a vraiment marqué. Même si ça fait débat, j’ai aussi beaucoup apprécié sa communication agressive, son assurance, son charisme. Ce sont des paramètres qui font la légende d’un athlète et trop peu de sportifs osent affirmer leur statut comme lui, malheureusement. Personnellement, j’étais fan de Jorge Lorenzo aussi, car il savait assaisonner ses interviews d’une petite pointe d’arrogance bien placée, comme le fait Quartararo de nos jours.
… mais est-ce vraiment l’objectif de Fabio Quartararo ?
Si je m’en tiens au verdict de la piste, que je prends en compte son matériel, son évolution, et sa vitesse, alors, oui, c’était une année satisfaisante. J’aurais félicité un Fermin Aldeguer ou un Enea Bastianini pour une saison de ce type, mais là, il s’agit de Quartararo. Je trouve qu’il est en train de gâcher sa carrière chez Yamaha, je ne peux pas mieux le formuler. Fabio, qui n’a que 26 ans à l’heure où ces lignes sont écrites, a déjà passé trois de ses meilleures années en carrière (de 2023 à 2025) à composer avec du matériel moyen, à tricoter, à essayer de sauver les meubles et trouver des solutions. Pendant ces trois années, avec une très bonne moto, il aurait peut-être pu jouer tout devant.
Si, à l’époque de sa prolongation avec Yamaha, mon article qui détaillait mes regrets quant à cette décision avait fait polémique, je ne peux m’empêcher de croire que j’avais raison. Imaginez seulement où il serait avec Aprilia, à la place de Bezzecchi. Bien sûr, le projet Yamaha était vendeur, et moi-même, je n’avais pas pensé que la firme d’Iwata puisse planifier un développement aussi ambitieux pour 2026. Mais l’histoire nous l’apprend : les meilleurs pilotes sont au meilleur endroit, au meilleur moment. Les promesses, ça ne fait que retarder le succès. Demandez à Fernando Alonso ce qu’il en pense, sans doute le meilleur exemple de l’histoire moderne, qui s’est toujours trompé au moment de signer alors qu’il avait la possibilité d’aller partout. Demandez également à Sébastien Ogier, qui, sans manager, réussissait à « sentir » les bons baquets après sa période Citroën en WRC.
Je suis désolé, mais je ne peux pas me contenter de voir un talent comme Quartararo jouer le top 10 au championnat MotoGP. Lui non plus, d’ailleurs, et son énervement au cours de cette saison trahissait ce sentiment. Il me fait beaucoup penser à Charles Leclerc en Formule 1.
La théorie que personne n’ose évoquer
Vient maintenant le moment d’évoquer un sujet que personne n’ose aborder. C’est une réflexion que je nourris depuis quelques semaines, maintenant. Imaginez que Fabio Quartararo, en réalité, ne soit pas si bon qu’on le prétend. Ça paraît fou, car, pendant des années, vous avez entendu des gens vous dire qu’il serait champion du monde sur une Ducati. Mais prenez l’exemple de Brad Binder, que j’ai évoqué il y a quelques jours de cela.

L’année prochaine, il devra se frotter à Toprak, mais je ne crois pas trop au Turc. Photo : Yamaha
Binder, quand il est arrivé chez KTM, était considéré comme un crack. Pendant plusieurs saisons, il a totalement annihilé la concurrence au sein du garage autrichien. Mais qui composait les rangs de la firme de Mattighofen ? Miguel Oliveira ? Augusto Fernandez ? Jack Miller ? Un vieillissant Pol Espargaro ? Quand Pedro Acosta a débarqué, qu’est-il arrivé à Brad Binder ? Il est tombé de son piédestal.
Quand on réfléchit bien, Quartararo est le seul pilote de premier plan chez Yamaha depuis longtemps, très longtemps même : Il faut remonter à Maverick Vinales au début de la saison 2021 pour retrouver un pilote capable de s’imposer durablement à ses côtés, et encore : on connaît l’irrégularité chronique de « Top Gun ». Qui Quartararo a-t-il dominé ? Un Franco Morbidelli moyen après sa blessure, Darryn Binder, un Andrea Dovizioso en bout de carrière, Alex Rins et Miguel Oliveira sur la fin également, tous deux minés par les blessures, et, finalement, un Jack Miller essoufflé (regardez ses résultats depuis la mi-saison 2023).
Je ne dis pas que Quartararo ne dominerait pas des pilotes plus forts à matériel égal, mais factuellement, nous n’avons jamais pu le constater. J’ai vu passer, ici et là, des comparaisons entre sa situation chez Yamaha et celle de Pedro Acosta chez KTM. Effectivement, ils écrasent leurs coéquipiers sur des machines inférieures à la Ducati. Mais ceux de Quarta’ sont Miller, Oliveira et Rins, alors que ceux d’Acosta sont Binder, Bastianini et Vinales. Ne voyez-vous pas une différence ?
Ce n’est là qu’une théorie que je me permets d’émettre, et d’ailleurs, je n’y crois pas totalement. Notamment, car Quartararo est un champion du monde ; il a montré qu’il pouvait se battre tout devant, qu’il avait les épaules pour assumer ce statut. Et puis, sa vitesse reste impressionnante, coéquipiers ou pas. Je dis simplement que Yamaha, par ses choix, n’a jamais pu nous permettre de comparer Quartararo à un pilote de sa trempe. Je garde ça dans un coin de ma tête, car qui peut anticiper le verdict de l’avenir ?
Que pensez-vous de ma théorie ? Est-elle complètement fumeuse ? Dites-le-nous en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.

Si Fabio Quartararo peut revenir au top ? Bien sûr. Photo : Michelin Motorsport
Photo de couverture : Michelin Motorsport




























