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Le XXIe siècle n’est pas celui qui a proposé le plus de spectacle au cours de l’histoire. Même si des courses magnifiques se sont tenues, les batailles pour le championnat ont en général été expédiées. Tout d’abord sous l’ère Rossi de 2001 à 2005, puis Lorenzo (2010-2012). Au milieu de cela, l’on trouve des performances de Casey Stoner, en 2007 et 2011 qui n’ont laissés aucun suspens. Marc Márquez n’a lui non plus pas plaisanté, enchaînant les saisons jouées au Japon.

Mais au milieu de tout ça, quelques années magnifiques subsistent. Voici le conte de l’une des plus grandes saisons de l’histoire des Grands Prix moto, où cinq pilotes prétendant à la victoire chaque week-end s’affrontaient. Voici l’histoire d’un duel entré dans la légende.

Avec le recul, la saison 2013 débute au Grand Prix de France 2012, plus précisément lors de la conférence de presse. La superstar Casey Stoner fait une annonce invraisemblable. Dans l’année de ses 27 ans, il prendra sa retraite sportive, « ne s’amusant plus ». Deux choses sont à retenir du coup de massue délivré par le champion du monde en titre. Premièrement, une tête d’affiche, l’un du « fab four » s’en va, et laissera sans doute un grand vide qui profitera à Jorge Lorenzo.

 

 

Dani Pedrosa fait logiquement partie des favoris de cette saison 2013. Sur la toute nouvelle Honda RC213V, il espère faire mieux que 2012 où il a lutté comme il a pu contre un Jorge Lorenzo en feu. Photo : Box Repsol.

 

Stoner était le seul, depuis 2010 à pouvoir contenir le majorquin. La voie semble royale pour ce dernier. Mais deuxième question importante : qui remplacera le prodige ? Casse tête. Trois candidats majeurs se démarquent. D’un côté, le choix de la sûreté : Álvaro Bautista. Il est très bon, et prend même deux podiums sur une Honda satellite en 2012. Sa régularité joue en sa faveur, et sa nationalité aussi. Mais son âge déjà avancé – il est plus vieux que Stoner – l’élimine de la conversation, Repsol Honda ne peut se trouver avec deux pilotes sans préparer l’avenir.

Stefan Bradl semble donc l’option judicieuse. Il sera dans sa deuxième saison, et pourra donc rouler pour une équipe d’usine. Son talent naturel n’est plus à démontrer, champion du monde Moto2 2011 et futur rookie de l’année 2012, auteur d’une saison correcte. Mais sa nationalité peu courante en Grand Prix ne l’aide pas, pour les sponsors et l’image de Repsol, qui a toujours préféré les gros marchés (Espagne, Japon, Australie en tête). Enfin, un dernier prétendant pointe le bout de son nez. Son nom : Marc Márquez. Il est déjà bien connu, c’est un crack. Champion du monde 125cc 2010 et futur couronné en Moto2.

Tout joue en sa faveur : lui et son frère sont issus de la formation espagnole, sont sponsorisés par Repsol depuis toujours et surtout, sont très forts. Finalement c’est lui qui est sélectionné. Bradl s’estimait légitime, et ne manquera pas de refaire parler de lui au cours de cette histoire, chez LCR Honda. Son destin est similaire à celui de Cal Crutchlow.

Justement : passons de l’autre côté. Valentino Rossi décide, après deux ans de galères, de revenir chez Yamaha aux côtés de Jorge Lorenzo, son meilleur ennemi. Exit Ben Spies donc, mais Crutchlow se sent quelque peu lésé. Le britannique fait une année très correcte en 2012, mais devra rouler de nouveau sur l’ancienne YZR M1 Monster Yamaha Tech3.

 

 

En réalité, tout le monde a vu que Márquez n’était pas un pilote banal dès les essais hivernaux à Valencia en 2012. Mais après la manche sur le Circuit of the Americas, il changea de dimension. Photo : Box Repsol.

 

Telles sont les forces en présence à l’entame du championnat. La manche du Qatar était donc très attendue, pour voir où ce petit monde allait se placer, et dans quel ordre. Finalement, le podium est une surprise sans en être une. Jorge Lorenzo fait une course « à la Lorenzo », gagnant avec six secondes d’avance, suivi de Rossi et Márquez. Pedrosa, éternel outsider, termine quatrième. D’ailleurs, ce dernier n’était pas si loin du titre en 2012, et espère tirer son épingle du jeu, mais cela semblait mal engagé.

Conclusion : Rossi est toujours rapide, et Márquez est un futur problème. Cependant, l’écart avec « Por Fuera » est énorme. Vient l’introduction d’un nouveau circuit, le COTA, dessiné par Hermann Tilke et Kevin Schwantz. Le circuit n’a rien d’exceptionnel, mais plaît à un Honda boy en particulier : Marc Márquez. Ses longues lignes droites et accélérations offrent un avantage naturel à la RC213V, nouvellement introduite cette année également. Lorenzo a même précisé avant la course que ça ne serait pas pour lui, sauf miracle. Et en effet, il termina troisième, prenant les points nécessaires.

Cependant, il n’a pas du être aussi joyeux que ça en constatant qu’il n’était plus le seul leader du championnat. Márquez n’a fait qu’une bouchée de la course, prenant pole, tour le plus rapide, et victoire. Ce n’est pas anodin. À 20 ans, il bat le record de précocité pour une victoire en catégorie reine, effaçant « fast » Freddie Spencer des tablettes. Le comportement de Lorenzo change un peu, et une autre ambiance s’installe. Il tente de relativiser en clamant que si Estoril était arrivé si tôt dans sa carrière, ou que Shanghai s’était présenté à Dani Pedrosa à la même époque, eux aussi auraient gagné très tôt dans leur première saison. Pour lui, cela relève plus du concours de circonstances donc.

Des commentaires de-ci de-là, deux hommes avec le même nombre de points… Tout ne pouvait se dérouler mieux pour les spectateurs. Mais la saison ne faisait que commencer.

 

Photo de couverture : Smudge9000