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Mohammed Ben Sulayem a été reconduit à la présidence de la FIA. Une victoire officielle, acquise à Tachkent, en Ouzbékistan, mais une victoire loin d’être sereine. Réélu sans opposition formelle, le dirigeant émirati se retrouve pourtant au cœur d’une tempête institutionnelle, accusé d’avoir verrouillé le processus électoral au point d’en vider la substance démocratique.

Car si Ben Sulayem a bien conservé son poste, il l’a fait en tant que seul candidat, une situation qui alimente depuis plusieurs semaines une contestation croissante au sein du monde du sport automobile.

L’absence de concurrence n’a pas mis fin au débat, bien au contraire. Laura Villars, ancienne candidate potentielle et figure critique du système mis en place par la FIA, a décidé de porter l’affaire devant la justice française. Elle dénonce des pratiques qu’elle estime anti-démocratiques, pointant un processus électoral qui aurait découragé, voire empêché, toute alternative crédible.

Une audience est désormais fixée au 16 février, date clé qui pourrait peser lourdement sur la légitimité politique du président réélu. Si la décision judiciaire ne remet pas directement en cause son mandat, elle pourrait fragiliser durablement son autorité.

Face aux accusations, Mohammed Ben Sulayem n’a pas cherché à temporiser. Dans un entretien accordé à l’AFP, il a défendu avec vigueur sa vision du processus électoral, renvoyant la responsabilité aux candidats absents.

« Je ne comprends pas pourquoi ces autres candidats ne se sont pas rendus en Amérique latine pour défendre leurs programmes. Il faut aller sur place, rencontrer les gens et gagner leur confiance et leur soutien pour leurs candidatures. C’est ça la démocratie, bon sang ! »

Une déclaration qui fait directement référence à la polémique autour des postes de vice-présidents régionaux, notamment pour l’Amérique latine. Dans les faits, une seule candidature avait été validée : celle de Fabiana Flosi, épouse de l’ancien patron de la F1 Bernie Ecclestone, soutien affiché de Ben Sulayem.

Pour le président de la FIA, aucune manipulation n’a eu lieu. « Le processus électoral n’a pas changé car les règles étaient déjà en place, et nous les avons simplement appliquées. »

FIA

Un Président Ben Sulayem sans rival mais pas sans résistance

Loin de reconnaître un déficit de popularité, Ben Sulayem revendique au contraire une légitimité forgée dans l’adversité.

« Je ne crois pas que je sois impopulaire. Je ne serais pas arrivé aussi loin si je n’avais pas fait face à tous ces défis et attaques. Ils m’ont ciblé jour et nuit, mais qu’est-ce que j’en ai à faire ? Je les ai ignorés et me suis concentré sur la réalisation de mes promesses. »

À 64 ans, le président émirati entame un nouveau mandat qui le mènera jusqu’au 31 décembre 2029. Un second cycle qu’il aborde avec la conviction d’avoir redressé une institution qu’il jugeait défaillante.

Revenant sur ses quatre premières années à la tête de la FIA, Ben Sulayem brosse le portrait d’une organisation qu’il estime avoir profondément transformée.

« J’ai hâte de me mettre au travail pour les quatre prochaines années. Nettoyer la maison n’a pas été facile, et placer les bonnes personnes aux bons postes au sein de la FIA a été un défi. »

Il se montre catégorique quant à ses choix passés : « Mais je peux dire avec confiance que les investissements réalisés pendant mon premier mandat portent leurs fruits. Si vous me demandiez ce que je changerais si je pouvais revenir en arrière, la réponse serait ‘rien.’ »

Une posture assumée, presque provocatrice, renforcée par une dernière déclaration lourde de sens : « Avant que je ne prenne la présidence, la FIA n’assumait pas pleinement ses responsabilités. »

Si Mohammed Ben Sulayem est officiellement reconduit, la bataille politique est loin d’être close. La procédure judiciaire engagée en France, les critiques internes et le malaise persistant autour de la gouvernance de la FIA témoignent d’un climat tendu, presque fracturé.

Le sport automobile mondial entre dans une période charnière, où la question de la gouvernance devient aussi centrale que celle de la compétition. Plus que jamais, la FIA se retrouve sous surveillance, et chaque décision de son président sera scrutée, analysée, contestée.

Ben Sulayem affirme avancer sans regrets. Mais dans un univers où la légitimité ne se décrète pas uniquement dans les urnes, le plus dur commence peut-être maintenant.

Ben Sulayem