Avec l’acquisition de Dorna par Liberty Media, la rumeur d’un événement commun F1/MotoGP n’a jamais été aussi sérieusement envisagée. Et à en croire Carlos Ezpeleta, directeur sportif de Dorna : « tout vaut la peine d’être essayé une fois. » Un feu vert prudent, mais révélateur d’une dynamique nouvelle dans les coulisses du sport auto et moto mondial.
Liberty Media détient désormais les rênes des deux plus grands championnats mécaniques de la planète. L’idée d’un week-end commun F1/MotoGP titille naturellement les esprits. D’un point de vue marketing, c’est le jackpot : visibilité internationale décuplée pour le MotoGP, accès au grand public, via la puissance de diffusion de la F1, synergie des fans, souvent passionnés par les deux disciplines. Alors, une opération « Drive to Survive 2.0 » pour la moto ? C’est tentant…
Une idée séduisante… mais truffée d’obstacles. Si l’idée excite les fans, la réalité est en effet terriblement complexe.
Il y a d’abord la sécurité et infrastructures. Les exigences F1/MotoGP sont incompatibles à bien des égards : protections gonflables à retirer et remettre. Vibreurs différents (cf. l’accident de Jorge Martin à Losail). Surfaces asphaltées abîmées par la F1 (résidus de gomme, freinages). Nettoyage quotidien de la piste. Et pas de place au programme pour les catégories intermédiaires. Soit un dommage collatéral lourd.
La logistique technique n’est pas en reste : chronométrage, limites de piste, pressions de pneus, tous ces protocoles sont divergents. Et on ne parle pas des sponsors, droits TV, signal international … Un véritable nœud de vipères.
Enfin, il y a l’aspect billetterie et fan expérience. La capacité pour les spectateurs est forcément limitée. Alors, comment répartir les billets F1/MotoGP ? Et surtout : qui aura la priorité sur la grille, dans les paddocks, à l’écran ?
Silverstone : seul circuit réellement capable de réunir la F1 et le MotoGP de Liberty Media ?
Le MotoGP, bien que moins mainstream, n’a jamais été un “petit championnat”. Il dispose d’un contenu sportif exceptionnel (races serrées, duels épiques), de circuits mythiques (Mugello, Assen, Jerez) et de figures charismatiques (Marquez, Acosta, Bagnaia…).
Mais ce qui lui manque, c’est l’emballage. Liberty le sait. Mieux vaut créer des événements premium autour du MotoGP, à la Monaco ou Las Vegas, plutôt que de le diluer dans un événement hybride.
Alors quel circuit serait ici choisi ? Silverstone semble être le seul circuit réellement capable. Pourquoi ? Il est long, rapide, large, sécurisé avec deux paddocks séparés, soit une infrastructure prête pour les deux séries. Par ailleurs, le MotoGP y souffre d’un déclin d’affluence inquiétant (seulement 40 000 le dimanche cette année). Organiser un double événement là-bas *sauverait potentiellement la manche britannique MotoGP*, tout en offrant un terrain d’expérimentation.
Réunir le même jour les deux catégories est une « super idée » … mais à manier avec prudence. Un événement F1/MotoGP commun n’est pas impossible, mais il ne doit pas devenir le Saint Graal. Le MotoGP ne doit pas vivre dans l’ombre de la F1, mais à ses côtés, avec ses propres codes et ses propres légendes.
Liberty Media a les clés pour moderniser la série. Reste à savoir s’ils veulent en faire un bijou autonome… ou un satellite de la Formule 1.