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Au cours des 18 dernières saisons, depuis le passage de la catégorie reine de la vitesse moto au MotoGP en 2002, Honda a remporté 22 championnats du monde de pilotes et constructeurs ainsi que 153 victoires en Grand Prix. En plusieurs parties, nous allons retracer de manière non exhaustive l’histoire des RC211V, RC212V et RC213V, en étudiant comment l’ingénierie du HRC a été parfaitement combinée avec le talent de ses pilotes.

Le sort a été jeté : la dernière année de la catégorie 500cm3 était 2001. A partir de 2002, la catégorie reine s’appellerait MotoGP et passerait au moteur à 4 temps. Les motos à moteur 500cm3 à 2 temps ont rapidement été éclipsées par celles à moteur 990cm3 à 4 temps, qui se conformaient au changement de réglementation. Alors que Yamaha et Suzuki ont développé des V4, Honda a pris le parti de développer un… V5 ! Mais surtout, les ingénieurs du HRC n’ont pas fait la même erreur que les concepteurs du NR500 de la fin des années 70, en mélangeant trop de nouvelles technologies à la fois.

 

Le moteur 2 temps du NSR500

 

Un peu d’histoire…

Les premiers règlements étaient clairs et visaient à éviter toute perte de vitesse ou de prestige. Les motos devaient être de véritables prototypes de course, ne pouvant en aucune façon être dérivées de moto de série. Pour le souligner et pour séparer le MotoGP du Championnat du Monde Superbike, une cylindrée maximale de 990cm3 (au lieu de 1.000 en SBK) a été imposée. Il y avait également différentes limites de poids minimum selon le nombre de cylindres.

Au cours des 18 dernières saisons depuis le passage du MotoGP au 4 temps en 2002, Honda a remporté 22 titres de championnats du monde de pilotes et constructeurs et pas moins de 153 victoires en Grand Prix.

La domination de Honda a été une récompense appropriée pour l’audace dont la société a fait preuve en choisissant de développer un V5 en 2000, après que le changement de règle autorisant les 990 cm3 à quatre temps avait été confirmé. Mais elle est aussi le résultat de la combinaison des talents d’ingénieurs de génie et de pilotes légendaires, car l’un ne va pas sans l’autre !

La course a en effet toujours été extrêmement importante pour Honda, et le travail que Honda a fait sur le circuit a eu un effet énorme sur la moto. De nombreuses technologies dont les motards profitent chaque jour trouvent leur origine dans l’esprit des ingénieurs Honda, qui travaillent toujours non seulement pour gagner des courses, mais aussi pour développer de nouvelles technologies.

Gestation du RC211V

Dans la perspective de 2002, l’attention de tout le monde était concentrée sur Honda. Les maîtres incontestés da la catégorie reine. Honda avait déjà mis en place des éléments clés pour être la force dominante de la nouvelle série.

Non seulement l’entreprise avait l’expérience la plus récente en course avec un moteur à quatre temps au niveau de celui qu’était la 500 – la NR500 au début des années 1980 – mais elle était également la seule à avoir à sa disposition la technologie actuelle des F1, étant le motoriste de l’équipe BAR depuis 2000 (écurie qu’Honda a racheté par la suite).

 

La Honda NR500 des années 1980

 

Il fallait aussi prendre en compte l’ascension fulgurante d’un jeune pilote italien et assez prometteur du nom de Valentino Rossi qui avait spectaculairement gagné le dernier titre en 2 temps sur la Honda NSR500.

A l’origine du 5 cylindres… un V6 !

Le V5 exotique de Honda trouve ses origines dans un prototype de V6 prometteur appelé FXX, sur lequel le chef du projet RC211V, Tomoo Shiozaki, a participé au développement en 1988. Il a été conçu avec des objectifs de compacité et de centralisation de masse. Il a surpassé le RC30, le fameux V4 sportif de Honda, et a été superbement manié. Mais avec le marché de l’époque, friand des répliques de course, et Honda rivalisant avec succès avec les RC30 dans la nouvelle série World Superbike, tout en développant de nouvelles technologies en Formule 1 et en endurance (automobile), le V6 n’a jamais atteint le stade de la production.

Il a donc fallu attendre plus d’une décennie, et l’arrivée des moteurs 4 temps dans la catégorie reine de la compétition moto, pour que Shiozaki et son équipe apportent leur expérience et adaptent des propriétés similaires au RC211V. Pour la petite anecdote, un des ingénieurs en chef de la RC211V s’appelle Yoshimura (sans aucune relation avec les échappements), et l’expression de l’époque pour le saluer était “Give me Five Yoshimura”, en rapport au 5 cylindres.

La configuration du moteur V5 a été inspirée par la règle MotoGP qui limite les prototypes à 4 et 5 cylindres au même poids minimum de 145 kg. Un six cylindres aurait été globalement aussi puissant qu’un V5, mais avec un embonpoint de 10 bons kilos. Cinq cylindres donneraient plus de puissance que quatre. En effet, le moteur 990cm3 du RC211V produit non seulement près de 220 ch à 14.000 tr/min, mais malgré cette puissance et ce couple impressionnant, celui-ci est contrôlable à bas régime, ce qui réduit l’usure prématurée du pneu arrière.

Étonnamment, les constructeurs étaient assez partagés sur leurs décisions en termes de nombre de cylindres. À la suite de ces études de faisabilité technique, Honda a opté pour un V5. Aprilia a opté pour la légèreté avec un moteur à 3 cylindres, quant à Yamaha et Suzuki, ils ont choisi de développer des moteurs plus conventionnels en compétition, des 4 cylindres en ligne ou des V4. Des projets à 2 et à 6 cylindres ont également été étudiés, même s’ils n’ont jamais atteint la piste.

Le RCV211V était donc né. Et ce nom de code a une signification : RC est la désignation de course traditionnelle de Honda (Racing Corporation), 211 signifie le premier prototype du 21e siècle et le V correspond à la fois au type de moteur et au nombre de cylindres en chiffres romains.

Avantages techniques du V5

Il y avait plusieurs avantages à ce choix technique. L’un était parce qu’un 5 cylindres avait le même poids minimum réglementé qu’un 4 cylindres, tandis que des pistons plus légers, puisque plus petits, donneraient accès à des régimes plus élevés, conformément à la philosophie de course de longue date de Honda.

La configuration – avec trois cylindres en avant et deux à l’arrière – a permis de créer une moto relativement étroite, tandis que la largeur supplémentaire du vilebrequin par rapport à un 4 cylindres était négligeable.

Enfin, un angle en V de 75,5° a permis un équilibre primaire parfait. C’était effectivement un V4 avec un piston supplémentaire équilibrant le reste. Il n’était pas nécessaire d’avoir un arbre d’équilibrage. Le calage moteur était, déjà à l’époque, de type Big Bang.

 

Le superbe V5 Honda avec vue sur les 3 cylindres avant et le V à 75.5°

 

Une autre des améliorations introduites était un carter d’huile sec, permettant à la cavité de la boîte de vitesses d’être utilisée comme réservoir d’huile. Cela signifie que la moto pourrait être encore plus compacte et éviter les fuites qui sont si courantes dans les systèmes de carter humide. En outre, le carter sec évite les pertes de puissance, stabilise la pression de l´huile et renforce le carter de vilebrequin.

Il y a eu de nombreuses rumeurs à l’époque quant à la taille des cylindres, avec la possibilité d’avoir les 2 cylindres arrière légèrement plus petits, notamment pour des questions de centrage de masses. Honda néanmoins confirmé que les 5 cylindres sont de la même dimension.

Des fonctionnalités complexes et coûteuses telles que les rappels de soupapes pneumatiques se distinguent par leur absence, en partie parce qu’elles ne sont pas nécessaires (pas encore du moins, le régime moteur maximum étant encore « raisonnable »).

Les nouvelles règles ont introduit une technologie étrangère aux deux temps, technologiquement plus simples : c’était l’apparition des embrayages à glissement limités pour contrôler le frein moteur, et améliorer la stabilité au freinage. Celui-ci a d’ailleurs handicapé Rossi dans certaines courses de fin de saison avant que le problème ne soit résolu.

Côté technologie, on a aussi vu apparaître l’injection électronique. Sur la RCV, chaque cylindre a un injecteur placé en dessous du papillon d’admission, pour une souplesse à bas et moyen régimes, et un autre injecteur, à plus gros débit, au-dessus du papillon d’admission, utile pour délivrer toute la puissance du moteur.

Avec l’utilisation d’un ECU (« Electronic Command Unit » ou calculateur moteur), diverses stratégies ont été développées pour améliorer le contrôle des gaz, notamment avec un mapping différent selon les rapports de boites. La gestion électronique du frein moteur est devenue possible, avec une augmentation du ralenti pendant le rétrogradage, encore une fois pour réduire le frein moteur très puissant comparé aux 2 temps.

Le système d’échappement en titane complexe se termine par deux silencieux, l’un sous la selle, et l’autre sur le côté droit de la moto.

L’objectif à long terme de Honda avec le RCV a toujours été de produire des moteurs pour les équipes satellites, comme ce sera le cas lors de la saison 2003, quand au moins 8 pilotes utiliseront le V5. Les moteurs coûteront plus cher que les 500cm3 à 2 temps équipant les NSR, mais dureront plus longtemps.

Afin de patienter avant la deuxième partie de ce dossier, qui est désormais accessible, vous pouvez admirer les magnifiques pièces de ce moteur.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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