Dans un paddock où chaque pilote rêve de briller, un homme plane au-dessus du lot : Marc Marquez. L’Espagnol, désormais paré de rouge chez Ducati, est en train d’écrire un nouveau chapitre de sa légende. Pour le meilleur ou le pire de la discipline ? Une question que se pose Carmelo Ezpeleta…
À 32 ans, le champion au regard intense vit une renaissance. Passé maître dans l’art de dompter la Desmosedici GP25, il est devenu presque intouchable. Treize victoires sur dix-huit courses — sprints compris — ponctuent sa saison. Il a creusé un écart de 40 points sur son frère Alex et laissé Francesco Bagnaia à 110 points derrière lui. Le rêve d’un septième titre mondial se rapproche, et avec lui la perspective d’égaliser Valentino Rossi dans la légende.
Pour Davide Tardozzi, boss respecté chez Ducati, ce n’est pas seulement le pilote qui impressionne, mais aussi l’homme : « dès le premier jour, Marc m’a bluffé. Il est simple, sans fioritures. Tout ce qui l’intéresse, c’est la piste » .
Cette humilité tranche avec le tumulte qu’il génère. Car si Marquez vole sur la piste, il bouscule aussi l’équilibre du MotoGP. Sa domination est telle qu’elle déclenche presque un malaise chez certains observateurs.
Marc Marquez ou l’ennui du roi au moment de l’arrivée de Liberty Media
Même les légendes s’en inquiètent. Kevin Schwantz, champion du monde 1993, le dit sans détour : « voir Marc dominer ainsi, c’est… ennuyeux. Il est trop au-dessus, Et pourtant, la critique est paradoxale. Il y a peu, les fans et les promoteurs réclamaient une star. Aujourd’hui qu’ils l’ont, la même question revient : où est le suspense ?
Carmelo Ezpeleta, le grand patron de Dorna, soupire presque face à cette schizophrénie du public. Interrogé par El Pais, il lâche : « c’est étrange. Quand 14 pilotes différents gagnaient, on me disait qu’il nous manquait une star. Et maintenant que Marc domine, c’est l’inverse. »
Ezpeleta, conscient de l’importance des stars mais aussi de l’attrait d’un plateau équilibré, sait qu’il marche sur un fil.
Pendant ce temps, les coulisses bouillonnent. Liberty Media, géant américain déjà propriétaire de la F1, a finalisé son rachat du MotoGP. Avec une ambition : transformer le championnat en spectacle mondial, comme ils l’ont fait avec la série Netflix Drive to Survive.
Des bruits courent déjà : Massimo Rivola, actuel patron d’Aprilia, pourrait devenir le nouveau PDG du MotoGP. Le chantier est colossal. Entre la domination des Ducati — aucune moto d’une autre marque n’a encore foulé le podium en sprint cette saison — et la précarité financière des jeunes pilotes, il y a fort à faire. Jack Miller s’est récemment indigné de voir les rookies mal payés, un autre symptôme des déséquilibres du paddock.
Marc Marquez, lui, continue son œuvre. Chaque virage, chaque freinage à la limite, repousse un peu plus les frontières de l’ordinaire. Marco Rigamonti, son chef d’équipe, le sait : « s’il maîtrise totalement les virages à droite, Marc peut redevenir imbattable. »
Et à Assen tous se demandent : la furia Marquez trouvera-t-elle un adversaire à sa hauteur ? Ou assistera-t-on à un cavalier seul jusqu’à la ligne d’arrivée… et jusqu’au titre ?
Car sous le casque rouge, derrière ce numéro 93 légendaire, il y a un homme en mission. Et tant que cette mission ne sera pas achevée, le MotoGP vivra au rythme de Marc Marquez — que cela plaise… ou non.