L’histoire avait tout pour être belle. Jorge Martin, auréolé de son titre mondial conquis de haute lutte face à Pecco Bagnaia, devait incarner la nouvelle ère d’Aprilia. En rejoignant la marque de Noale, il semblait promis à un rôle de héros, suivant la trace de Max Biaggi pour devenir une légende sur la RS-GP.
Mais en ce milieu de saison 2025, l’idylle s’est muée en feuilleton à rebondissements. Et Martin, plutôt que de briller en piste, est plongé dans une tempête contractuelle qui commence à lui coûter cher sur le terrain le plus imprévisible : celui de la popularité auprès des fans.
Blessé à répétition depuis le début de l’année, Martin n’a quasiment pas roulé sur la RS-GP. Il est apparu à peine en course, avant de chuter à Losail, et n’a pu défendre son titre sur la piste. Une série noire, certes, mais qui suscite la compassion de nombreux passionnés : tout le monde espère revoir celui qui, l’an dernier, avait fait vibrer le championnat par son panache et ses poles à répétition.
Sauf que depuis quelques semaines, le scénario a pris une tournure bien moins glorieuse. Martin, via son manager Albert Valera, brandit une clause de libération inscrite dans son contrat avec Aprilia. Selon lui, l’Espagnol serait libre pour 2026 car il n’a pas atteint une certaine place au championnat à la date butoir. Problème : Martin n’a pas roulé, donc impossible de figurer dans le classement.
L’histoire rappelle furieusement 2020, lorsque Martin, alors pilote KTM en Moto2, avait tenté d’invoquer une clause similaire après que la saison eut été stoppée net par la pandémie. À l’époque déjà, l’Espagnol voulait partir avant terme.
Jorge Martin joue avec le feu, et ses fans commencent à sentir la brûlure
Au dernier Grand Prix d’Assen, Valera a remis de l’huile sur le feu devant les caméras, répétant que Martin était « libre pour 2026 ». Une manœuvre délibérée, perçue comme une tentative de pression publique sur Aprilia.
Du côté de Noale, Massimo Rivola reste inflexible : pour lui, Martin est sous contrat jusqu’à fin 2026. Une bataille juridique paraît inévitable. Et pendant ce temps, Martin, absent des circuits, laisse ses mécaniciens travailler pour une machine qu’il ne veut peut-être même plus piloter l’an prochain. L’ambiance risque d’être glaciale dans le box lors de son retour prévu après sa visite médicale.
Pendant que Martin se débat dans ces affaires, Marco Bezzecchi trace son chemin. L’Italien, arrivé chez Aprilia la même saison, vit une trajectoire radicalement opposée. Il s’est fondu dans l’équipe, salue le travail de l’usine à chaque week-end, et a même offert à Noale de magnifiques coups d’éclat cette saison.
« La situation de Jorge Martin ?Je m’en fiche complètement. Ma relation avec Aprilia est fantastique. Ils m’ont accueilli chaleureusement. Je ne peux que leur rendre la pareille en donnant toujours le meilleur de moi-même », déclare Bezzecchi, symbole de loyauté et d’esprit d’équipe.
Bezzecchi est en train de devenir la figure que Martin aurait pu incarner : l’outsider charismatique prêt à défier Marc Marquez, la superstar. Là où Martin, à la moindre difficulté, semble vouloir claquer la porte, Bezzecchi construit patiemment son histoire chez Aprilia.
Sur les réseaux sociaux, les fans ne pardonnent pas. Les commentaires sur Instagram, Facebook ou les forums MotoGP sont sans appel : la sympathie dont jouissait Martin l’an dernier fond à vue d’œil. Ceux qui vibraient pour lui face à Bagnaia le voient désormais comme un pilote plus préoccupé par ses contrats que par la piste.
« Regagner la confiance des fans sera très difficile, voire impossible », analyse un suiveur du paddock. « Au-delà de la performance, un pilote doit aussi soigner son image, car c’est un visage du sport et un argument marketing. »
Martin a-t-il compromis sa carrière ? Peut-être pas sportivement, tant son talent est grand. Mais son image, elle, a pris un sérieux coup. Au point que ce conflit contractuel risque d’être plus durable dans la mémoire collective que son titre mondial.
Un sacré gâchis, pour un pilote qui, rappelons-le, est l’un des plus rapides de sa génération. Mais qui, pour l’instant, semble se battre dans la mauvaise arène.
MotoGP, Assen : classement course
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