On ne vous apprendra rien en vous disant que le team MotoGP Tech3 d’Hervé Poncharal et Guy Coulon est en train d’écrire une page capitale de son histoire avec l’arrivée, entre autre, de Günther Steiner et Richard Coleman, et en tant qu’observateurs privilégiés, ne pas la raconter serait ne pas accorder l’importance que mérite cet évènement majeur pour la plus grande équipe française de compétition moto.
Alors placer le curseur au juste milieu entre confidentialité et information ne sera à coup sûr pas facile, mais tout au long de l’hiver, et peut-être même après, nous vivrons et tenterons de vous faire vivre cette transition qui bouleverse le panorama du MotoGP hexagonal.
Nous nous en faisons un devoir en tant que média, mais surtout en tant que passionnés qui avons toujours reçu un accueil incroyable de la part de toute l’équipe Tech3, à quelque niveau que ce soit.
Alors, pour ne pas citer les dizaines de prénoms que nous devons remercier, disons simplement « Un Immense Merci Tech3 ! » et lançons-nous dans cette narration, sans savoir vraiment par quel bout commencer, puisque nous avons eu la chance de partager l’histoire de Tech3 durant la dernière décennie…
Après l’émouvante célébration du samedi soir, nous avons pu recueillir les propos d’Hervé Poncharal dimanche, avant qu’il ne se prépare pour sa dernière épreuve du week-end, la cérémonie officielle qui clôt la saison 2025.
Richard Coleman, le futur Directeur de la
structure Tech3, dont nous avons déjà retracé le
parcours, était présent à Valence, y compris à certaines de ces
festivités, et nous avons eu la chance de pouvoir lui poser nos
questions.
Discret, abordable et modeste dans son rôle d’observateur, l’homme
n’en est pas moins formidablement cartésien et très habile…
🎤 Vous venez du monde de l’automobile, et désormais vous êtes aussi dans celui de la moto. Qu’est-ce qui vous a le plus surpris, quelles sont les différences ?
« Il y a clairement une plus grande camaraderie entre les pilotes. Et il y a peut-être une raison psychologique à cela : il est évident que les pilotes moto prennent bien plus de risques que les pilotes automobiles professionnels. Ces pilotes mettent littéralement leur corps en jeu, et je pense que cela crée un lien plus profond avec eux.
Par ailleurs, je viens à
l’origine du rallye, et en rallye aussi… tout est basé sur les
datas et la théorie, mais au final, la confiance du pilote est
essentielle. L’ordinateur peut vous dire une chose, mais si le
pilote ne se sent pas en confiance, vous n’obtiendrez pas un bon
temps dans la spéciale.
Et c’est un peu la même chose en course moto. Oui, c’est
extrêmement théorique, nous sommes à la pointe de l’ingénierie,
mais au final, le facteur humain est encore plus important. Parce
que si le pilote ne se sent pas en confiance, il ne fera jamais un
bon tour.
Il existe donc peut-être une interaction plus forte entre l’aspect
humain et l’aspect technique qu’en automobile. Bien sûr, cet aspect
existe aussi en voiture, mais d’après ce que je peux voir
jusqu’ici, il est beaucoup plus marqué en moto. »
🎤 Je ne vais pas directement vous demander si vous avez déjà des idées pour améliorer Tech3, parce que vous ne me répondriez peut-être pas, mais indirectement avez-vous du stress à l’idée que, le 1er janvier, vous serez le Directeur ?
« Oui… Tout d’abord, je l’ai déjà dit publiquement, mais 2026 sera une évolution, pas une révolution. Au final, en ce qui concerne le box et l’équipe opérationnelle pour la piste, ce sera une évolution : Comment nous pouvons regarder les choses ensemble, rendre le travail plus facile pour les gars, analyser peut-être les domaines où nous sommes moins forts ? Mais nous n’allons pas faire de grands bouleversements. Et puis, c’est aussi la dernière année du cycle réglementaire pour ces motos…
En revanche, en dehors du box, en matière de marketing, de communication et de relations publiques, cette équipe doit grandir très vite. Peut-être que, pour de nombreuses raisons, ce n’était à juste titre pas la priorité d’Hervé, mais au regard de nos actionnaires et de l’évolution du sport d’ici cinq ans, c’est clairement un domaine dans lequel nous devons investir immédiatement. Donc, de ce côté-là, on verra de grands changements en 2026.
En ce qui concerne mon bureau,
je pense être quelqu’un qui apprend vite, mais il y a énormément de
choses à assimiler. Nous arrivons en MotoGP à un moment où il y a
beaucoup de politique en jeu. Évidemment, Carmelo et les
constructeurs ont un certain nombre de sujets qu’il faut résoudre.
Le statut des équipes indépendantes est en train d’évoluer, et il y
a désormais onze équipes, disons, à parité sportive du point de vue
du promoteur.
Nous sommes également à la fin d’un cycle réglementaire, donc le
marché des équipes, de leurs contrats et de leurs affiliations peut
changer. Il peut y avoir des mouvements dans le paddock, ou non,
mais c’est clairement une période de renouvellement, de
renaissance, de renégociation des contrats.
Dans ce contexte, je pense aussi que le marché des pilotes sera incroyablement intéressant l’an prochain, parce que 90 % des pilotes seront en fin de contrat à la fin de l’année prochaine. Il y a de grands noms qui pourraient chercher à changer de monture. Et quand cela arrive, tout le monde doit s’adapter. Habituellement en sport, et en sport mécanique en particulier, on a une assez bonne idée de la hiérarchie sportive. Mais pour 2027, c’est totalement inconnu. Personne ne sait qui sera fort, qui sera faible, qui aura fait les bons choix ou non. Les pilotes devront donc prendre davantage de risques quant à l’endroit où ils rouleront en 2027. Et à cause de cela, ils n’en sauront pas plus en septembre qu’en mars. Je prédis donc que le marché des pilotes va bouger très vite l’an prochain !
Si l’on combine le fait que nous devons avoir un impact immédiat en matière de relations publiques, de marketing et de communication, que nous devons décider très rapidement du renouvellement de notre engagement avec KTM, ce qui est le plan A, que nous devons choisir quels pilotes rouleront sur ces motos, et qu’il y a énormément de paramètres à comprendre très vite… sans compter que certains éléments sont hors de mon contrôle, comme les discussions entre Dorna et les constructeurs, même si les décisions prises ont évidemment un impact sur l’équipe… Oui, j’aurai un bureau très, très chargé à partir du 1er janvier (rires). »
🎤 Avez-vous des craintes concernant le côté latin de l’équipe et, disons, le côté non latin du management ?
« Non, pas du tout. Je pense qu’il existe effectivement une grande différence culturelle, parce que soyons honnêtes : Tech3 n’est pas seulement une équipe française, c’est aussi une équipe française méditerranéenne. Et culturellement, c’est assez différent de KTM en Autriche. Mais moi, en tant qu’Anglais, je me situe peut-être quelque part entre les deux, et cela peut justement aider à jouer un rôle de lien.
Quoi qu’il en soit, cette équipe
a un cœur français. Et elle continuera d’avoir un cœur français.
Nous nous sommes engagés à maintenir l’équipe basée dans le sud de
la France, et cela ne changera pas.
Peut-être que l’équipe aura une couleur un peu plus internationale,
mais elle gardera une âme française bien vivante. »
Merci à Richard Coleman pour le temps consacré à nos questions.

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