Le directeur de l’équipe VR46, Alessio “Uccio” Salucci, s’est confié à Moto Sprint pour faire le point sur la tournée asiatique, ses pilotes, son rôle de manager et les perspectives pour 2026. Fidèle bras droit de Valentino Rossi, Uccio a livré une interview riche, mêlant passion, admiration et lucidité sur l’avenir du MotoGP.
Uccio brosse d’abord le portrait de ses deux pilotes, Fabio Di Giannantonio et Franco Morbidelli, qui composent l’âme de l’équipe VR46.
« Fabio est plus calme, plus condescendant : on parle un peu plus avec lui. Franco est plus brutal, je l’apprécie beaucoup car il est optimiste : quand il doit vous dire des choses, il le fait en vous regardant droit dans les yeux. J’ai une relation de grand frère avec eux deux et ils sont formidables. »
Pour lui, gérer deux caractères aussi différents est une richesse : « c’est une valeur ajoutée pour l’équipe, nous nous compensons mutuellement. Nous sommes des passionnés et, même si c’est absurde, nous aimons parfois les difficultés. Nous les prenons comme de l’expérience. Bref, nous ne manquons de rien, nous sommes bien pourvus. »
Salucci reconnaît que le partenariat avec Ducati a transformé la structure :
« Elle a beaucoup changé grâce à l’arrivée des bons ingénieurs. Du côté de Fabio, le package d’usine est vraiment incroyable. Ducati maintient le niveau des deux motos rouges officielles. Nous avons les éléments au bon endroit, au bon moment : nous sommes une véritable équipe d’usine. »
Concernant Morbidelli, qui roule sur une GP24, Uccio souligne que Ducati n’a jamais fait de différence :
« Même s’il possède la moto de l’année dernière, en cas de panne, les pièces détachées adéquates arrivaient toujours. Ce sont des gens vraiment sérieux. »
Revenant sur son parcours, Uccio avoue qu’il n’avait pas prévu de devenir un jour directeur d’équipe :
« Tout a commencé en 2014, lorsque Carmelo Ezpeleta nous a appelés pour nous dire que Sky souhaitait créer une équipe Moto3. Valentino m’a dit que si nous acceptions, il nous suivrait. Je me suis immédiatement senti à l’aise dans ce rôle. »
Du Moto3 au MotoGP, la progression fut naturelle : « entre 2020 et 2021, j’ai dit à Vale que j’aimerais faire du MotoGP. L’équipe est jeune, on s’amuse, on grandit, on a reçu le soutien de Ducati, et ce n’était pas facile. C’est un honneur pour nous. »

Uccio Salucci : “Acosta et Aldeguer sont le futur : ils ne laisseront rien aux autres”
Uccio cite volontiers ceux qui l’ont inspiré : « Davide Brivio, bien sûr, mais aussi Carlo Fiorani, Maio Meregalli et Lin Jarvis. Brivio a été notre maître : un vrai visionnaire. J’ai parfois demandé son avis avant de prendre une décision, puis j’ai appris à écouter les plus expérimentés sans être présomptueux. »
Interrogé sur les rumeurs liant Pedro Acosta à VR46 pour 2026, Uccio reste prudent mais admiratif :
« Pedro est très fort et très jeune. Il doit encore faire ses preuves, mais il a quelque chose de plus que les autres, il a de l’éclat. Il est un peu effronté, mais cette effronterie est nécessaire. Il n’a pas peur d’avoir Marc Marquez à ses côtés. »
Et d’ajouter : « il freine fort, accélère tôt. Il est très fort, comme Fermin Aldeguer. S’ils restent concentrés, ces deux jeunes pilotes ne laisseront pas grand-chose aux autres dans quelques années. »
Uccio a également évoqué Marc Marquez, désormais une référence technique pour tout le paddock :
« En pilotage, il est très fort à gauche. En dehors de la piste, il dit toujours ce qu’il a à dire, sans jamais se laisser intimider. Il est intelligent, rusé, doté d’un immense talent. C’est incontestablement le plus fort. »
À propos de Pecco Bagnaia, actuellement en difficulté, Uccio se montre fraternel :
« Je le connais très bien, mais pour lui donner des conseils, il faudrait que je sois toujours avec lui. Je lui dirais simplement d’essayer de s’amuser, de ne pas se décourager et de faire de son mieux. Ce n’est pas le Pecco qu’on connaît : il n’a pas le feeling à l’avant. Il doit travailler avec son équipe, reformer un groupe. »
« Pecco vient souvent au VR46 Hospitality le soir ; c’est comme un membre de la famille pour nous. »
Impossible de conclure sans évoquer Valentino Rossi. Pour Uccio, il reste bien plus qu’un patron :
« Valentino est un homme fantastique, unique. C’est une épaule, une référence, une béquille dont j’ai toujours eu besoin. C’est un ami, un frère. »
Et de conclure avec émotion : « j’espère que beaucoup s’inspireront de lui. J’ai rencontré Michael Jordan, Ronaldo, Federer… ils sont tous comme Vale : des gens d’un certain niveau, confiants, intelligents, humains. Nous avons besoin de plus de personnes comme ça dans le monde. »
Uccio Salucci incarne à lui seul l’esprit VR46 : une combinaison d’amitié, de passion et d’exigence. Avec un œil sur l’avenir (Acosta, Aldeguer) et une fidélité intacte à Valentino Rossi, il trace la voie d’une équipe qui rêve déjà d’un futur en or.































