Comme le temps passe vite. La saison dernière, Enea Bastianini s’imposait avec la Ducati officielle, en tenant un guidon qu’il avait décroché suite à sa merveilleuse saison 2022. Il revenait d’une très difficile année 2023, où, blessé à de multiples reprises, il n’avait jamais su faire fonctionner la Desmosedici. À peine moins d’un an plus tard, le voilà en perdition, totalement largué au classement général. La situation est très préoccupante.
Des résultats inquiétants
Rappelons le contexte. Arrivé chez KTM Tech3 suite à la promotion de Marc Marquez au sein de l’équipe officielle Ducati, Bastianini a subi un premier déclassement important. Tech3 reste l’une des institutions du paddock, mais, si l’on omet la formidable saison 2024 de Pedro Acosta, l’écurie ne joue plus grand-chose depuis 2020. La chute, depuis la meilleure place en MotoGP, fut rude, et ce qui est malheureux, c’est qu’il n’a jamais pu démontrer l’ampleur de son potentiel en rouge. À l’heure actuelle, il n’a encore pas fait mieux qu’en 2022, cet exercice fou, où il nous avait gratifiés de quatre victoires exceptionnelles avec Gresini Ducati.

Bastianini qui signe la casquette qu’il avait porté suite à sa victoire à Silverstone en 2024. Image cruelle. Photo : Michelin Motorsport
Je pense que, mentalement, c’est assez difficile à gérer. Il faut se rappeler qu’à l’époque, beaucoup en parlaient comme du parfait « anti-Bagnaia », celui que Pecco allait craindre. Résultat, le voilà dans une équipe satellite – et pas l’une des mieux positionnées pour rebondir –, aux côtés de Maverick Vinales. Ce n’est sûrement pas la trajectoire qu’il imaginait après son titre mondial Moto2 en 2020.
Vinrent donc les tests hivernaux, et déjà, de ce que l’on entendait après Sepang et Buriram, il était en difficulté. La KTM RC16 ne lui convenait pas, et malheureusement, ça ne s’est pas amélioré depuis. Alors, étonnement, il était assez convaincant lors du GP de Thaïlande, qu’il achevât neuvième. Puis, il y eut cette septième place aux États-Unis, aidée par les chutes devant lui. Mais, hormis cela, il n’y a rien à se mettre sous la dent. Avec deux résultats blancs et sept courses, dont deux dernières manches très difficiles tant au niveau de la position en piste que des sensations, « Bestia » pointe actuellement 15e du classement général. Certes, il n’est que quelques points derrière Brad Binder, mais il ne faut pas oublier deux choses. Premièrement, le Sud-Africain est décevant lui aussi, ce n’est pas forcément un bon point de comparaison. Et deuxièmement, il fut assez malchanceux : il n’a pas vu l’arrivée au Mans à cause d’une erreur qu’il était facile de commettre et a subi un problème mécanique à Austin.
Le pire, c’est que cette 15e place pourrait bientôt se transformer en 17e. Derrière lui figurent Jack Miller et Alex Rins, deux pilotes qui sont susceptibles de réaliser de belles performances en raison du regain d’énergie de Yamaha récemment. Dans le cas de Bastianini, c’est de pis en pis.
Des circonstances atténuantes pour Bastianini ?
Même si je n’ai pas d’affinité particulière avec ce pilote, il faut reconnaître qu’il arrive chez KTM au pire moment ; oui, je crois qu’il a des circonstances atténuantes. Je ne vais pas m’étendre sur la question des concessions, car j’y ai déjà consacré un long article hier. Je vous invite d’ailleurs à le retrouver en cliquant ici. Mais il est clair que KTM et Aprilia ne sont pas franchement favorisés par ce système cette saison, surtout par rapport à Yamaha et Honda. Ensuite, il faut aussi rappeler l’ambiance morose chez KTM, qui, forcément, touche les pilotes. Je ne suis pas dans leur tête, mais je pense qu’entendre des rumeurs toutes les semaines concernant les finances de son employeur n’a rien de drôle, et n’aide pas à se projeter, à développer un véritable lien avec celui-ci.

Après, il n’y a eu que sept courses disputées, mais ses déclarations font assez peur. Photo : KTM
Forcément, on doit le comparer à Maverick Vinales, son coéquipier, qui a réussi quelques courses magnifiques, notamment au Qatar et en Espagne. « Top Gun » est monstrueux, pas loin de Pedro Acosta si ce n’est meilleur, et cela décrédibilise d’autant plus Bastianini. C’est une vérité, mais il faut rappeler que Viñales est un très bon pilote, premièrement, et qu’il bénéficie d’une qualité d’adaptation seulement égalée par Marc Marquez sur cette grille, à mon sens. Après tout, il est le seul pilote MotoGP à avoir triomphé avec trois marques différentes. Ce n’est pas rien. Mais voyez-vous, ce n’est même pas cette comparaison qui m’inquiète.
Des déclarations perturbantes
Ce qui m’a alerté, ce sont ses déclarations à la presse. Suite au Grand Prix de Grande-Bretagne, il affirmait qu’il venait de disputer la pire course de sa carrière, qu’il ne trouvait aucune solution. C’est comme s’il n’avait pas d’issue, et, en ce sens, on peut établir un parallèle avec Pecco Bagnaia. Ça fait peur, car ça rappelle précisément ce qu’il affirmait durant la saison 2023, où il était totalement perdu.
J’espère sincèrement qu’il pourra revenir très rapidement, car, si l’on peut s’interroger sur son pessimisme en conférence de presse, il ne faut pas oublier qu’il nous avait tous choqués en remportant le Grand Prix de Malaisie à la fin de cette maudite saison 2023. Qu’il garde la confiance, car c’est un pilote exceptionnel. J’espère franchement que, dans dix ans, on ne parlera pas de lui comme d’un potentiel gâché.
Qu’avez-vous pensé du début de saison d’Enea Bastianini ? Dites-le-moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.
Par ailleurs, j’en profite pour vous dire qu’il n’y aura pas d’épisodes de Parlons MotoGP la semaine prochaine, en raison d’un déplacement professionnel. Je vous retrouve donc la semaine du 16 juin pour de nouvelles analyses !

Le contrat de Bastianini court jusqu’à la fin de l’année. Peut-il rebondir ailleurs ? Espérons que sa cote ne baisse pas trop. Photo : Michelin Motorsport
Photo de couverture : Michelin Motorsport