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Le Grand Prix d’Espagne a livré son verdict. Comme d’habitude, nous allons dresser trois enseignements relatifs à ce weekend chargé.


I) Bagnaia sur une autre planète

La prestation de Pecco est à montrer à chaque jeune intéressé par la compétition moto. Rien que la séance de qualification est d’ores et déjà historique. D’une part, il était très intéressant de noter l’absence totale de signes d’énervement. Pourtant, Francesco voit son premier tour annulé en raison de la chute de Jorge Martín au virage n°1, en plus d’être suivi par Marc Márquez, qui, comme de plus en plus souvent, joue à ce petit jeu particulièrement désagréable pour le lièvre (Mir au Qatar).

D’un calme olympien, Bagnaia réalise un premier tour rapide, battu par Quartararo. Ensuite, l’officiel Ducati nous lâche sa masterclass. 1’36’’170, tour le plus vite réalisé ici, et 0’’473 devant Fabio. Un monde d’écart, surtout à notre époque. Il s’agit de la première pole non attribuée à une Honda ou une Yamaha en 16 ans et 17 manches du côté de Jerez de la Frontera. Immense.

Puis, la course. Là encore, rien à dire. Même si Bagnaia revenait fort depuis l’Argentine, nul n’aurait pu parier sur une victoire aussi dominante. En tête depuis le début, il réalise un grand chelem, de plus en plus rare en sports mécaniques (pole, meilleur tour en course, victoire en menant tous les tours). Certes, Fabio se rapprochait inlassablement à la fin mais Pecco en avait sans doute sous le pied, en témoigne l’absence totale d’erreurs.

Cette victoire veut dire beaucoup, et « répond » directement à celle de Quarta’ au Portugal. Bagnaia a réalisé ce qu’aucun autre, au XXIe siècle, n’a pu faire : installer le doute auprès des observateurs en une seule course. Pour rappel, aucun pilote n’a été sacré champion du monde en accusant un tel retard au début de saison


II) N’oublions pas « El Diablo »

Quartararo arrivait à égalité avec Rins, et repart premier du championnat à sept points d’Aleix, avec la manière. Une excellente opération quoi qu’on en dise. Photo : Michelin Motorsport

 

Après réflexion, le weekend de Fabio Quartararo est quasi parfait. Ce dernier réalise une belle séance de qualifications avec deux gros tours, lui aussi suivi par Márquez sur la deuxième sortie. Au damier, il compte également un beau matelas d’avance sur le troisième, en la personne d’Aleix Espargaró.

Sa course est dénuée d’erreurs, et il ne s’est jamais fait distancer par Bagnaia. En l’état, pas de quoi être déçu de cette deuxième place dans une saison aussi imprévisible. Seuls deux pilotes sont montés au moins trois fois sur le podium depuis Losail, ce qui témoigne de sa régularité.

Finalement, la seule question est d’ordre psychologique. Il s’agit, statistiquement, du circuit qui réussit le mieux à Fabio, son jardin. Il ne faut absolument pas qu’il laisse cette performance a priori difficilement reproductible l’impressionner.

En effet, Bagnaia se met à remporter des courses de cette manière tous les dimanches, il faudra se poser des questions. Fabio a fait le job, a augmenté son avance et a montré, dans les derniers tours, qu’il n’était pas si loin. C’est d’ailleurs ce sur quoi il insistait (l’écart avec le troisième) durant l’interview d’après course.

Le contexte se prête à une atteinte psychologique, mais cela ne semble pas l’effleurer : mercato en bonne voie, Suzuki peut-être sur le départ (donc deux pilotes de grand talent à replacer, potentiellement), Le Mans qui arrive, là où les Yamaha, comme les Ducati, sont fortes. En l’état, il ne s’agit pas d’un tournant de la saison. Le vent est encore dans le sens du français qui est, sur le plan mental, l’un des meilleurs depuis 2021. Mais il faut continuer à se montrer solide – exactement comme à Jerez ou à Termas – même à plus de deux secondes du premier.

Bénéficiant du « faux » statut de favori ou de « favori trop précoce », Bagnaia n’a plus tant la pression ; c’est à Fabio de jouer, et donc de dicter les règles. Mais en sports mécaniques, il est bien plus aisé d’être chasseur que chassé si l’on joue un championnat en duel (Rossi 2015 et 2006, Kent 2015, Gardner 2021…) C’est pour cette raison que l’Italien ne doit pas être oublié au vu de sa position au général, bien anecdotique à ce moment de la saison.

Le podium était le même que la première ligne. Cela n’était plus arrivé depuis le Grand Prix de Malaisie 2016. Photo : Michelin Motorsport


III) Avertissement pour Pramac


Terminons sur une toute autre note. Alors que l’équipe était décrite comme « sœur » plutôt que « fille » par Davide Tardozzi au Portugal, Pramac connaît un début de saison très moyen. À Jerez, la formation ne marque aucun point, ce qui n’était pas arrivé depuis le Grand Prix de Teruel (Aragón) 2020.

Jorge Martín a chuté pour la quatrième fois en six courses, soit le pire bilan de tout le plateau. Zarco, lui aussi à terre, connaît un début de saison en dents de scie mais se maintient à flot. Pramac souffre peut-être de ce statut d’équipe presque à égalité avec l’usine. Les pilotes, habituellement, sentent moins la pression dans les plus petites structures mais avec la prolifération de Ducati de l’année en cours, les « petits » n’existent plus. Tous les teams équipés de Desmosedici peuvent potentiellement aller chercher le podium.

Martín est jeune, dans une équipe satellite : sa place n’est pas encore sur la plus haute marche du podium ni en pole position à chaque course, il ne devrait pas avoir à viser aussi haut. Cette situation est directement liée au nivellement de la performance, politique entamée et assumée depuis 2016.

C’est tout pour aujourd’hui ! Nous reviendrons sur le cas Aleix Espargaró séparément, un peu plus tard. Que pensez-vous de la bataille pour le championnat et de la performance de Bagnaia ? Dites-le-nous en commentaires !

 

Revoir un Marquez incisif (quoique tardivement) fait plaisir. Photo : Michelin Motorsport

Photo de couverture : Michelin Motrosport

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