C’est l’Arlésienne. Depuis plusieurs années, la rumeur Toprak Razgatlioglu revient toujours sur le tapis ; tantôt avec Yamaha en MotoGP, tantôt avec Honda, comme c’est le cas ces derniers temps. Personnellement, je ne pense pas que celle-ci soit réaliste et je ne crois pas qu’un tel transfert servirait ne serait-ce qu’une des deux parties. Voici pourquoi.
Un niveau d’écart ?
Mon plus gros problème avec Toprak ne le concerne pas directement. J’adore ses célébrations, je respecte son talent et, surtout, j’admire sa personnalité. J’aimerais voir plus de pilotes comme lui en MotoGP, mais, malheureusement, je ne crois pas que sa place soit ici.
Ce que je vais vous dire n’engage que moi, mais je trouve que le niveau en Superbike a considérablement baissé, et ce, depuis assez longtemps. Quel est le dernier transfuge qui a vraiment fait son trou en GP ? À la fin des années 1990 et au début des années 2000, nous avions des monstres en provenance du WSBK, à l’image de Troy Bayliss et Colin Edwards. Mais depuis Cal Crutchlow, qui a réussi ? Ben Spies, petit prodige de la discipline, n’a pas marqué les esprits, c’est le moins que l’on puisse dire.

Je n’ai rien à dire sur son talent en Superbike. Photo : BMW
Toprak est assez dominant en Superbike : il a déjà remporté deux titres de champion du monde, avec Yamaha puis BMW. Cette année, il est encore dans le coup, oui… mais contre qui ? Intéressons-nous à sa compétition de plus près, car, après tout, c’est ce qui détermine la grandeur d’un pilote.
Le premier au championnat n’est autre que Nicolo Bulega, ce qui en dit long, sans vouloir lui manquer de respect. Effectivement, ce dernier bénéficie d’une Ducati très performante, mais on ne peut pas réécrire l’histoire : Bulega a quitté le mondial, car il n’y arrivait pas. Après une première année réussie en Moto3, il a stagné deux ans dans le ventre mou de la plus petite des catégories. Puis, il est passé en Moto2, sans succès.
Sa dernière saison en Grand Prix s’est achevée avec une 26e place au classement général, fin 2021, pour Gresini. Puis, en 2022, il est passé en Supersport, et instantanément, est devenu l’un des meilleurs. Il a même remporté le titre mondial de cette classe en 2023, en triomphant de 16 courses sur l’année ! Début 2024, passage en Superbike, toujours sur Ducati. Et le voilà qui gagne sa première course dès la manche d’ouverture. Un an plus tard, il est le favori pour le titre mondial. Je ne dénigre pas son talent, car j’ai déjà défendu Bulega lorsqu’il était en Moto3, je pense qu’il est très bon. Mais il ne joue pas dans la même division que les pilotes MotoGP, je suis désolé de le dire.
Je pourrais aussi vous parler d’Alvaro Bautista, 40 ans, qui se bat toujours contre Toprak. Lorsqu’il a franchi le pas, cela faisait plusieurs printemps qu’il n’était plus compétitif en MotoGP. On retrouve également Andrea Locatelli, qui a échoué en Moto2, mais aussi Danilo Petrucci, 34 ans, ou Andrea Iannone. La simple énumération de ces patronymes doit vous faire comprendre que la comparaison ne tient pas.
Que peut y gagner Honda ?

Toprak a meilleur temps de devenir, tranquillement, une légende du Superbike. Photo : BMW
Honda n’aurait même pas grand-chose à y gagner. Choisir Toprak, c’est faire un immense pari sur l’avenir, car qui sait si le Turc peut être rapide au guidon d’une MotoGP ? Lors d’un test réalisé par Yamaha à Jerez en 2023, il pointait à sept dixièmes de Cal Crutchlow, et à une seconde et demie de Dani Pedrosa, qui n’est pas non plus une référence actuelle. C’est énorme, et c’est sans doute déjà trop. De plus, Toprak a déjà 28 ans ! Il n’est plus un jeune loup avec une immense marge de progression.
Honda a besoin d’un leader rapide, jeune, capable de porter l’écurie, que ce soit maintenant, ou après 2027, une date à ne pas manquer. Je pense être en mesure de citer dix pilotes qui conviendraient mieux pour cette mission, même si je sais que le marché turc est énorme et que sa nationalité peut jouer dans les négociations.
Sur la grille, la firme ailée peut se tourner vers Pedro Acosta – c’est l’autre rumeur du moment, qui, selon moi, fait plus de sens. Dans un futur proche, Honda peut aussi espérer recruter Fabio Di Giannantonio, ou même, Ai Ogura. Et pour plus tard, pourquoi ne pas rêver d’un Pecco Bagnaia en quête d’un nouveau challenge, ou, plus alléchant encore, d’un retour de Marc Marquez après avoir tout gagné en rouge. Malgré sa méforme récente, la puissance financière de Honda et son prestige lui confèrent une légitimité forte, qui saura attirer tous les pilotes – un peu comme Ferrari en Formule 1.
Quitte à faire venir un nouveau, autant miser sur l’un des cadors du Moto2, un championnat bourré de talent en raison de l’accumulation des pilotes qui ne peuvent pas prétendre à mieux faute de place en MotoGP. Alonso Lopez, Aron Canet, Manuel Gonzalez et leurs concurrents sont autant de candidats bien plus crédibles, à mon sens, que Toprak.
Encore une fois, tout cela n’engage que moi. Je suis curieux d’avoir votre avis sur ces rumeurs incessantes. Qu’en pensez-vous ? Dites-le-moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.

J’aurais aussi pu évoquer Johann Zarco ou Fermin Aldeguer pour les guidons officiels. Photo : BMW
Photo de couverture : BMW