Le MotoGP vient d’être racheté par Liberty Media ; DORNA Sports n’est plus actionnaire majoritaire depuis le début du mois de juillet, ce qui laisse les commandes à l’entreprise américaine. On évoque souvent son nom, mais en moto, on a parfois du mal à se rendre compte de ce qui peut changer sous l’égide de ce nouveau propriétaire. Dans cet article, nous allons émettre des hypothèses quant à la possible évolution de notre sport.
Nous avons déjà un exemple de la gestion by Liberty Media. En effet, la F1 a été rachetée en 2017 par la même boîte, qui possède désormais les droits d’exploitation des deux plus gros sports mécaniques sur terre. Pour ce papier, je vais me baser sur l’évolution de la Formule 1 ces dernières années, et essayer de transposer ces enseignements dans un futur imaginaire sur deux roues.

Il faudrait une superstar pour porter le MotoGP sauce Liberty Media. Est-ce Pedro Acosta ? Photo : Michelin Motorsport
I. L’américanisation
Ce qui m’a le plus interpellé, personnellement, est l’américanisation du sport. Depuis le rachat en 2017, la F1 n’a jamais autant eu l’accent américain : le pays de l’Oncle Sam compte pas moins de trois Grands Prix sur son sol, alors qu’avant, seul Austin était au programme. Liberty Media a réussi à intéresser les Américains à un sport qu’ils avaient un temps délaissés. Mais désormais, le NASCAR connaît des baisses d’audience et de popularité, même dans les états du Sud. La F1, après le phénomène Drive to Survive – série Netflix à succès sur les coulisses de la Formule 1 –, a passionné tout le continent, ce qui a même poussé les promoteurs à la création de nouveaux circuits insipides au possible, mais situés dans de gros marchés – Las Vegas et Miami.
En un sens, si ça reste maîtrisé, le MotoGP aurait bien besoin de se faire américaniser lui aussi. De la fin des années 1970 au milieu des années 1990, personne n’était aussi fort que les représentants de ce pays. Mais depuis Nicky Hayden, aucun n’a réussi à s’imposer durablement en MotoGP, pas même l’éclair Ben Spies au début des années 2000. Même constat dans les catégories inférieures, et forcément, cela se vérifie en tribunes : Austin est loin de faire salle comble. Regardez le GP des Amériques en Formule 1 et comparez-le au même événement en MotoGP, vous serez sidéré par les images des gradins.
C’est pour ça que j’ai choisi ce thème comme premier point. Ça me paraît assez inévitable : Liberty Media doit déjà être en train de plancher sur de nouvelles idées pour passionner le public américain, comme à l’époque.
II. Des calendriers dépassionnés
Le deuxième point va de pair avec le premier. La Formule 1 sauce Liberty Media n’hésite pas à tromper la tradition. Que ce soit dans la communication ou dans le calendrier, on sent une volonté d’actualiser un sport autrefois poussiéreux à l’ère Ecclestone. Ainsi, chaque année, la légitimité du Grand Prix de Monaco est remise en question, alors que Spa-Francorchamps ne sera couru qu’une année sur deux dès 2027. Hockenheim, Zandvoort, le Paul Ricard, le Nürburgring et bien d’autres ? À la poubelle. Tout ça au profit de courses dans le golfe persique et au Moyen-Orient (cinq GP), des USA, comme dit plus haut (trois GP), et des nouveaux marchés. Dans quelques années, il y aura au calendrier, par exemple, le circuit urbain de Madrid, que personne n’a demandé.
C’est là l’une de mes principales craintes : voir le MotoGP quitter ses temples (Assen, Mugello, Misano, Valence), pour des lieux plus sexy, mais totalement dépassionnés. Pour l’instant, nous n’avons qu’une course disputée dans le désert, à Losail, mais cela pourrait bien changer dans quelques années.
Petite précision concernant le calendrier : celui-ci va sans doute devenir encore plus long. La F1 dispute actuellement 24 courses, contre 21 en 2016. Actuellement, nous en sommes à 22 en MotoGP, avec deux départs à chaque fois. On vous laisse imaginer jusqu’où cela peut aller si les décisionnaires décident de rajouter pléthore de nouveaux circuits dénués d’âme, qui s’accompagnent, bien sûr, de juteux cachets.

Bagnaia, avec son profil discret, n’est pas celui sur lequel les nouveaux fans vont tomber amoureux. Photo : Michelin Motorsport
III. Une volonté de faire connaître le sport
Le dernier point de cet article concerne la promotion du MotoGP. Nous ne sommes pas encore au niveau de la Formule 1, mais, de toute évidence, certains semblent absolument vouloir anéantir ce complexe d’infériorité dont nous souffrons depuis toujours. Tout le monde dit que le MotoGP est le sport le plus spectaculaire, « plus encore que la Formule 1 » d’après le nouveau PDG de KTM Gottfried Neumeister. Pourtant, on copie tout, absolument tout sur eux : des Sprints aux communications radio actuellement à l’essai.
Ainsi, j’ai bien peur que Liberty Media veuille faire du MotoGP une Formule 1 sur deux roues, si vous voyez ce que je veux dire. Prendre tout ce qui a marché et permis à la F1 de bénéficier d’un rayonnement mondial, et bêtement l’appliquer à notre championnat adoré, qui n’a pourtant pas les mêmes codes, et encore moins le même public.
Conclusion
Oui, effectivement, il y a du travail à faire quant à la popularisation du MotoGP. Mais cela vaut-il qu’on supprime l’accent espagnol et italien de nos paddocks ? Cela vaut-il qu’on américanise à tout prix la discipline, jusqu’à faire appel à des showmen de l’UFC pour annoncer l’arrivée des pilotes en grille ? Je ne pense pas. J’espère simplement que Liberty Media ne va pas appliquer la même recette, car croyez bien que la F1 est méconnaissable depuis quelques années.
Je suis curieux de savoir ce que vous en pensez, alors, dites-le-moi en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.

Une bataille Acosta-Marquez, voilà qui pourrait créer de nombreuses storylines juteuses. Photo : Michelin Motorsport
Photo de couverture : Michelin Motorsport