Depuis hier, nous dressons un bilan de la saison MotoGP 2025. Après avoir évoqué le cruel manque de spectacle en piste, il est temps de se pencher sur le vrai problème que représente le calendrier, beaucoup trop chargé à mon goût. D’après moi, ce paramètre n’est pas étranger à l’ennui ressenti cette année.
Pourquoi c’est un problème ?
C’est un sujet qui me passionne, car il ne concerne pas que le MotoGP, loin de là. Non, l’excès de divertissement est une véritable question de société, qui touche tous les domaines ou presque : les séries, la musique, les sports, l’information. Il n’y en a jamais assez pour ceux qui encaissent, et, forcément, ça dénature tout, ou presque. L’art, coupé à l’eau pour en faire plus, ne touche plus de la même manière ; l’authenticité en pâtit, et le MotoGP n’échappe pas à la règle.

Quand on voit la dextérité nécessaire pour piloter ces dragsters, la question du nombre de course importe forcément. Plus frais, est-ce que le « Bez » aurait pu éviter Marquez en Indonésie ? Photo : Michelin Motorsport
Si le nombre de courses n’a fait qu’augmenter jusqu’en 2022, il y eut vraiment un tournant début 2023, avec l’introduction des Sprints. Il s’agissait là d’une preuve que ceux qui décident du sort de notre discipline favorite ne nous écoutent pas, car personne ne les avait demandés. D’ailleurs, les Sprints exaspéraient les fans de Formule 1, et ça n’a pas empêché leur implantation en MotoGP.
Depuis 2023, nous dépassons allégrement les 40 départs par saison. Ce millésime 2025 détient désormais le record, avec 22 Grands Prix pour 44 départs. D’après moi, il est absolument impossible de maintenir le même niveau d’intérêt sur une saison aussi longue. Pour qu’il y ait spectacle, tension, il faut qu’il y ait investissement du spectateur. Plus on a de courses, plus nos émotions sont divisées, plus notre attention diminue au fil du temps. La preuve : lors du GP de Valence, avez-vous ressenti ce petit stress avant le départ, à l’idée de voir une bataille entre Marco Bezzecchi et Alex Marquez ? Nous ne pouvons plus nous attacher aux pilotes, car, sur autant de manches, d’autres ont le temps de gagner, de prendre leur place sous le feu des projecteurs. J’ai d’ailleurs écrit un article sur ce sujet précis il y a un peu plus d’une semaine, cliquez ici pour le retrouver.
Étant donné que ce phénomène touche plus ou moins tous les domaines, laissons les acteurs s’exprimer. En football, de loin le sport le plus lucratif, la question du nombre de matchs par an est récurrente. De nombreux joueurs s’élèvent contre la multiplication des rencontres, qui nuisent, sur le long terme, au spectacle. Que disait Jules Koundé, défenseur de l’Équipe de France à ce sujet ? « Il y a une surconsommation du football, des matchs tous les jours, donc il y a moins d’intérêt. On trouve aussi des joueurs qui sont plus fatigués, on ne peut pas toujours donner le spectacle attendu aux spectateurs » affirmait-il dans une récente interview. Il a tout dit, et ses propos s’appliquent aussi au MotoGP.
Le titre à qui restera sur ses roues
En moins de dix ans, nous sommes passés d’un calendrier de 18 courses à 44. Oui, les Sprints sont plus courts, certes, mais l’intensité est strictement la même que pendant le Grand Prix. Il est d’ailleurs aussi facile de se blesser sur le format court que le dimanche. Forcément, les pilotes sont impactés par cette augmentation drastique du nombre d’épreuves.
Ce n’est pas encore arrivé – fort heureusement, mais dans combien de temps verra-t-on un pilote affirmer ouvertement qu’il préfère gérer chaque course pour ne pas prendre le risque de se blesser ? Après tout, peut-être que, dans ce système destructeur, c’est la solution à adopter.

Ce n’est pas le cas qu’en MotoGP ? La fin d’année Moto3 a été une véritable hécatombe, avec une dizaines d’absents dont le champion José Antonio Rueda. Photo : KTM Ajo
Cette année, plus de la moitié des pilotes se sont blessés, et dix ont manqué au moins une course. Je ne tiens pas compte de l’absence de Luca Marini, car il est tombé lors d’essais en vue des 8 Heures de Suzuka, mais son exemple pourrait parfaitement convenir à l’évocation des calendriers trop chargés. Ne croyez-vous pas que cela influence le spectacle ? Regardez Franco Morbidelli, ailleurs de trop nombreuses fois en 2025. Repensez à sa bourde avant le départ à Valence. N’y a-t-il pas de la fatigue là-dedans ? C’est juste une supposition, mais, avant les blessures et ce nouveau calendrier, « Morbido » n’était pas comme ça. Sans parler de son erreur, il suffirait que la fatigue physique et la peur de manquer des courses rapprochées empêchent ne serait-ce qu’un dépassement pour que cela influence notre intérêt, car une seule joute peut changer la physionomie d’une course. Ne croyez-vous pas que ces questions ont traversé l’esprit d’au moins un pilote sur la grille ?
Il faut comprendre qu’en plus des courses, c’est du temps de vol qui s’ajoute, du temps loin des siens, aussi. D’après moi, c’est trop, pou eux et pour nous. Oui, les motos ont aussi leur part de responsabilité là-dedans, j’en suis conscient, mais lorsque je regarde du MotoGP, j’ai envie de voir les meilleurs à leur meilleur niveau. Pas le meilleur gestionnaire, et c’est malheureusement là où on se dirige à l’horizon des dix prochaines années, quand tous les pilotes en auront marre de passer un tiers de la saison à l’infirmerie.
Conclusion
C’est trop peu souvent discuté, mais, selon moi, le calendrier actuel joue un grand rôle dans l’absence de spectacle, exactement comme l’a souligné Jules Koundé pour le football. Alors, maintenant, c’est encore vivable, mais qu’en sera-t-il quand nous aurons 24 ou 25 Grands Prix et une fin de saison le 7 décembre, comme en Formule 1 ?
Je suis curieux de connaître votre avis par rapport à ce sujet. D’ailleurs, je regrette d’être le seul rédacteur/journaliste, en France, qui l’évoque aussi clairement. Dites-moi tout en commentaires !
Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.

L’importance de chaque victoire est ainsi diminuée. Photo : Michelin Motorsport
Photo de couverture : Michelin Motorsport




























