Les circuits modernes ne passionnent pas tout le monde. Aujourd’hui, je désirais vous présenter l’un des responsables de cette tendance, qui reste assez méconnu malgré son influence considérable sur certains des plus grands championnats mondiaux. Penchons-nous donc sur Hermann Tilke.
Très largement critiqué, l’architecte allemand Hermann Tilke a pourtant dessiné la majorité des circuits qu’emprunte la Formule 1. Mais depuis longtemps, la MotoGP pose ses roues une fois par an sur bon nombre de ses constructions. En 2025, pas moins de six circuits comptant pour le calendrier ont été conçus ou modifiés dans leur histoire par Tilke. Mais au final, sont-ils si mauvais que ça ?

Photo : Michelin Motorsport
Des circuits qui se ressemblent étrangement
Le public est loin d’être tendre avec l’Allemand. En effet, les fans de Formule 1 le considèrent comme étant le responsable du spectacle ennuyant qui « aurait tué » la catégorie durant les années 2000. La principale critique est la nature même des circuits. Ceux-ci sont « sans âme ». Le choix de ne pas donner de noms aux virages n’aide pas, tout comme les larges bandes de bitume aux abords de la piste.
Ces échappatoires sont le fruit du travail de Tilke. Si vous avez un circuit de ce type en tête, il y a de fortes chances pour qu’il soit impliqué. Il est aussi accusé de faire toujours la même chose, ce qui, dans les faits, est vérifiable. Tout d’abord, prenez un circuit large, très large, Sepang par exemple. Ajoutez-y un virage à l’angle, ou une épingle au bout d’une très grande ligne droite – le dernier virage du circuit malaisien -. N’hésitez pas à mettre des virages à 90° et de très grosses accélérations, puis pensez à rajouter un ‘escargot’ ou un pif paf très serré, comme les deux premiers virages à Sepang. Assaisonnez le tout avec une courbe très rapide, qui génère beaucoup de G latéraux et vous obtenez le ‘Tilkedrome’ parfait.
Maintenant que vous l’avez en tête, intéressons-nous aux tracés en question. Sepang, dans un premier temps : ouvert en 1999, la première œuvre de Tilke est considérée comme sa meilleure. Le circuit est beau, se marie bien avec l’environnement … et a toujours convenu aux motos. La chaleur étouffante habituelle rend la manche extrêmement physique. D’ailleurs, les Grands Prix y passent depuis l’année d’ouverture, mais le spectacle y est assez rare.
Citons rapidement le Red Bull Ring et Catalunya. Ces derniers n’ont pas été créés par Tilke, mais rénovés respectivement en 1995 et 2007. Les deux circuits ne présentent donc pas les caractéristiques d’un tracé « à la Tilke », mais sont néanmoins assez plaisants ; la bagarre y est souvent présente. Spielberg nous a offert d’excellentes batailles depuis 2016 ; le tracé catalan, un peu moins.

À quand remonte la dernière belle course en Catalogne ? Photo : Michelin Motorsport
Pour l’instant, rien de bien méchant. Continuons avec Aragon, bouclé pour 2009. Nous retrouvons tous les ingrédients du « Tilkedrome », et, pour le coup, je ne me souviens que d’une belle course depuis toutes ces années (le duel Bagnaia/Marquez en 2022). Le Moto3 propose toujours de belles joutes ; mention spéciale à l’édition de 2015, un véritable classique de la petite catégorie.
Vient ensuite le Circuit Of The Americas, à Austin, sans doute le pire, de mon point de vue. Ce dernier a été conçu en collaboration avec son bras droit, Tavo Hellmund. Ce n’est clairement pas sa meilleure réalisation. Depuis la première édition du Grand Prix en 2013, les pilotes se plaignent de l’énorme freinage au bout de la plus longue ligne droite du calendrier (plus d’un kilomètre) et des bosses jonchant la piste. L’écrasante domination de Marc Márquez de 2013 à nos jours n’a pas aidé à la réputation du tracé. Dessiné pour la Formule 1, il ne fait l’unanimité dans aucune des deux catégories. D’ailleurs, comme pour Aragon, je n’ai en tête qu’une seule épreuve mémorable, le Grand Prix de 2024 et la victoire de Maverick Vinales.
Le dernier en date n’est autre que le circuit de Chang, en Thaïlande. Un des tracés les plus simples de la longue carrière de l’architecte, mais pas le moins intéressant. Les éditions 2018 et 2019 ont tenu leur rang et ont offert un très beau spectacle. Seul petit bémol : les interminables lignes droites, au nombre de trois.
Au cours de leur histoire, les Grands Prix motos sont également passés sur deux autres de ses ‘enfants’, mais ne sont plus au calendrier. Il s’agissait de l’Istanbul Park en Turquie (le GP s’y étant tenu de 2005 à 2007) et du Shanghai International Circuit qui accueillait des courses de 2005 à 2008. Dans les deux cas, de très belles manches s’y déroulaient même si les tracés étaient dessinés pour la Formule 1.
Alors, si mauvais que ça ? De toute évidence, non. Les circuits en eux-mêmes sont certes moins jolis, car bordés de bitume et de dégagement aux couleurs ternes. Il manque clairement une âme aux circuits d’Hermann Tilke, et force est de constater que le spectacle est rarement au rendez-vous. Paradoxalement, il fait largement moins débat en Grands Prix motos qu’en Formule 1, qui est pourtant sa vocation première.
Avez-vous remarqué ces patterns au fil de la saison ? Que pensez-vous des circuits cités, et voyez-vous des similitudes ? Dites-le-moi en commentaires !

J’aime bien la dernière mode, celle des tracés un peu plus tortueux et originaux comme Mandalika ou le Balaton Park. Au moins, ça change de la même recette. Photo : Michelin Motorsport
Photo de couverture : Michelin Motorsport