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MotoGP championnat

Hier, nous avons analysé les mesures réalisées par Liberty Media ces dernières semaines. Si elles portaient sur des détails du championnat MotoGP, le sujet que nous allons aborder aujourd’hui est bien plus grave. Cet épisode fait directement suite au précédent ; la lecture de ce dernier est donc fortement recommandée. Pour le retrouver, cliquez ici.

 

Le championnat MotoGP n’est pas la F1

 

Hier, nous avons prouvé la différence entre le modèle du championnat MotoGP et celui de la Formule 1, en s’appuyant sur l’analogie de la boxe. Historiquement, les petites catégories ne sont pas uniquement destinées à la formation des champions. La Formule 1, elle, règne seule sur le monde des monoplaces. La Formule 2 et la Formule 3 ne sont et n’ont toujours été que des catégories de passage pour les pilotes, rien de plus, et c’est pourquoi ces titres sont souvent oubliés à l’évocation du palmarès des plus grands. Voilà pour le résumé.

 

MotoGP championnat

L’histoire est partout en MotoGP… et Gresini ne l’a pas écrite qu’en MotoGP, loin de là. Photo : Michelin Motorsport

 

C’est pour cette raison qu’en suivant les Grands Prix, vous avez droit, chaque week-end, à trois courses passionnantes, alors que les spectateurs de la F1 ne regardent, en grande majorité, que la F1. Mais cela pourrait bien changer, et pas dans le bon sens pour nous, fans de MotoGP.

En effet, des décisions annoncées récemment me font très peur pour l’avenir des petites catégories. Dès 2026, Liberty Media changera la physionomie du paddock, et séparera l’espace réservé aux équipes MotoGP de l’espace prévu pour les écuries Moto2 et Moto3. Mais pourquoi ça ? Dans le but de moderniser et rendre plus attractif le paddock MotoGP, de le sublimer, d’en faire une étendue où les VIP pourront justifier, par quelques photos prises avec leur téléphone, les prix exorbitants de leur pass. Ainsi, cela permettra également de renforcer le côté exceptionnel de la catégorie reine et de valoriser d’autant plus ses champions.

Il faut savoir que cela a déjà été essayé il y a un peu plus de dix ans, mais ça n’avait pas tenu. DORNA avait vite fait machine arrière pour des raisons très simples : le paddock MotoGP n’attirait pas tant de monde que ça, et le tout paraissait un peu vide, finalement. Bien sûr, la volonté est de s’inspirer clairement du modèle F1, qui propose un paddock rempli d’hospitalités assez hallucinantes, il faut le dire. Mais pourquoi cela révolte-t-il notre petit monde ?

 

La fausse bonne idée

 

Pour répondre à cette question, il faut se pencher sur le rôle d’un paddock. C’est l’endroit où les équipes s’organisent, où bat le cœur de la discipline. Certes. Mais c’est également un espace privilégié pour les personnes accréditées et les sponsors. En Formule 1, par exemple, le paddock de Monaco est reconnu pour être un lieu de rencontres entre personnes influentes, où peuvent parfois s’établir de juteuses connexions. Si l’on isole le MotoGP, je doute que cela change réellement quelque chose pour la catégorie reine. L’aspect luxueux désiré pourrait carrément aider à conquérir ceux qui allongent l’artiche et qui veulent découvrir une catégorie « sensations fortes ». En ce sens, d’un pur point de vue business, on peut comprendre la volonté de Liberty Media.

 

MotoGP championnat

Le problème, c’est que les stars sont à la fois très proches des petits qui montent. Ça risque de casser. Photo : Michelin Motorsport

 

Le problème, c’est que cela se fait au détriment des deux autres catégories, qui sont, de mon point de vue, l’âme du MotoGP. Isoler la catégorie reine, c’est empêcher les gros bonnets de s’intéresser aux petites cylindrées, c’est faire de l’ombre à des équipes valeureuses qui ont souvent besoin de beaucoup d’argent pour fonctionner. Quel sponsor serait tenté de figurer sur les Moto2 ou les Moto3 si elles sont délaissées par le promoteur ? Un membre de l’une de ces équipes s’est même gravement exprimé sur ce sujet : « S’ils nous mettent hors du paddock principal, nous sommes finis … »

 

Un futur encore plus sombre

 

Entre les hymnes, l’effacement de l’histoire et maintenant la séparation claire des paddocks, ça commence à faire beaucoup. Mais à quoi pourrait bien ressembler le futur des petites catégories ? Ma crainte, c’est qu’elles soient totalement dissociées des week-ends de MotoGP, exactement comme l’est la Formule 2 pour la Formule 1. Pour rappel, lors de certaines manches du championnat de F1, les F2 ne courent pas ; ça n’a rien à voir avec notre discipline favorite. Et si le Moto2 et le Moto3 devenaient des catégories uniquement réservées à la promotion de talents, sans but de compétition ? C’est actuellement le cas en F2, où il n’est pas rare que le champion ne passe pas en F1, car déjà trop vieux, ou pas assez talentueux malgré sa victoire au général.

Loin de moi l’idée de jouer les pessimistes, mais ça serait la mort du championnat MotoGP, dans son ensemble. On copie la F1 parce que ça marche, qu’un nouveau public regarde, mais pourquoi la sauce prendrait-elle une deuxième fois consécutive en quelques années avec la même recette alors que le public visé, les acteurs, l’histoire et la philosophie du paddock sont radicalement différents ? Tout cela me fait très peur.

Cette invisibilisation des petites catégories vous effraie-t-elle également ? Dites-le-moi en commentaires !

Pour rappel, cet article ne reflète que la pensée de son auteur, et pas de l’entièreté de la rédaction.

 

Certains des meilleurs pilotes du monde sont loin d’être assez extravagants pour devenir des stars. Photo : Michelin Motorsport

 

Photo de couverture : Michelin Motorsport