Il y a 61 ans, Honda dévoilait une création quasi-parfaite. À la fois belle, mélodieuse, et ô combien performante, la Honda Six reste encore aujourd’hui une référence dans le monde motocycliste. Le six cylindres japonais est indissociable de Mike Hailwood, certes, mais connaissez-vous son histoire ? C’est parti pour un voyage dans le temps, à la recherche de l’exception.
Par ailleurs, nous avons déjà publié une rétrospective concernant l’aspect technique de cette moto, alors que cet article traitera davantage de ses résultats en compétition. Nous vous invitons à la retrouver en cliquant ici.
Un ténor apparaît
Nous sommes à la fin de la saison 1964, à Monza. Dans le cadre du très important Grand Prix des Nations, Honda prépare un coup dévastateur. À l’époque, le constructeur à l’aile dorée n’a pas encore connu le succès qui le caractérise aujourd’hui, mais ça ne veut pas dire que les ingénieurs manquent d’idées. Afin de lutter avec le concurrent Yamaha en 250cc, Honda met à l’essai un modèle six cylindres, nommé RC165. Le secret est préservé jusqu’au bout : la moto est transportée dans un avion différent du reste de l’équipe, et demeure bâchée jusqu’aux derniers instants. Cette configuration atypique met en émoi les Italiens présents en tribunes. Une douce musique résonne autrement dans le cœur des adversaires, qui perçoivent déjà l’innovation portée par ces notes inconnues.

La Honda RC166, dans ses plus belles couleurs.
Sa première sortie n’est pas concluante. Pilotée par le non moins grandiose Jim Redman, elle ne peut rien face aux redoutables Yamaha de Phil Read et Mike Duff. Read remporte ce titre mondial, le premier pour la firme aux diapasons. Mais ce n’est que partie remise. Au Japon, du côté de Suzuka, Redman impose la Honda « Six » une course plus tard. Cependant, la moto n’est pas encore au point. Redman, bien qu’il gagne assez souvent – notamment en 350cc –, peine à contenir le duo Yamaha en quart de litre sur la campagne 1965. Peut-être la RC165 (devenue RC166) a t-elle été dévoilée trop tôt, ce qui permit aux rivaux de créer une toute nouvelle 250cc quatre cylindres.
Hailwood entre en scène
Au Grand Prix du Japon se trame une étonnante invitation. Mike Hailwood, pilote MV Agusta, connaît quelques désaccords avec le comte Agusta qui lui préfère Giacomo Agostini. Ainsi, Honda le convie à prendre part à la course 250cc, sur l’une de ces Honda six cylindres. C’est le coup de foudre. Alors que Jim Redman n’est pas là pour lui donner la réplique, Hailwood survole l’épreuve et triomphe, pour sa toute première manche disputée avec Honda depuis son titre mondial 250cc en 1961.
Hailwood est déjà une légende ; vainqueur des quatre derniers championnats 500cc avec MV Agusta, il n’a plus rien à prouver. Pourtant, la Honda Six lui permet d’étendre sa renommée. En 1966, l’Anglais écrase le championnat en remportant toutes les courses auxquelles il participe. Dix sur dix, sans autre forme de procès. La domination est totale, et la RC166, déjà dans l’histoire.

Mike Hailwood sur Honda Six en 1966, à Assen. Photo : ANEFO
Les ingénieurs Honda apprécient particulièrement ces moteurs avec un nombre important de cylindres. Après avoir confié un cinq cylindres à Luigi Taveri en 125cc pour 1966, ils continuent en 1967, avec, cette fois, un nouveau six cylindres en catégorie 350cc. La RC174, évolution de la RC166 250cc, est tout aussi redoutable. En 350cc, Hailwood s’impose à chaque fois qu’il prend le départ, c’est-à-dire à six reprises. Au terme d’une année plus disputée en 250cc, il s’adjuge, pour la deuxième fois d’affilée, les deux titres mondiaux. La couronne 500cc lui échappe pour un rien : Agostini et lui partageaient le même nombre de points et de victoires ! L’Italien fut récompensé au nombre de deuxièmes places, occurrence unique dans l’histoire. Les six cylindres Honda ont offert un septième, huitième et neuvième titre à Mike Hailwood, qui égale, fin 1967, Carlo Ubbiali au palmarès.
Un nouveau règlement met fin à la récréation. La FIM décide d’interdire les cinq et six cylindres, ce qui pousse Honda et Suzuki à stopper leur engagement en mondial. Hailwood, qui avait pourtant prévu de poursuivre sur les RC, se voit contraint d’arrêter. Même sur la touche, Honda le paye 50 000 £ (soit près de 900 000 € actuels) pour qu’il ne signe avec personne d’autre. Les Honda « Six » quittent ainsi le paysage, après deux années d’exploitation réussies seulement. Cette courte période de succès marqua à jamais le paysage motocycliste : elle sont aujourd’hui unanimement considérées comme des bijoux d’ingénierie.
Connaissiez-vous l’histoire de la Honda Six en Grands Prix ? Dites-le-nous en commentaires !

Mike Hailwood (gauche) et Giacomo Agostini, une étonnante histoire croisée.































