pub

Après la saison 2022, ils sont 128 : c’est le nombre de champions du monde différents qui ont marqué l’histoire des Grands Prix motos, toutes catégories confondues. Ce nombre peut paraître énorme, bien qu’il ne tienne pas compte des side-cars, trop souvent oubliés. Pourtant, une bonne partie des patronymes sont familiers. Être champion du monde, peu importe la cylindrée, est l’accomplissement d’une vie. D’ailleurs, la majorité des élus, sur les 74 ans d’histoire de l’organisation, ont aussi performé au plus haut niveau, ou au moins, ont laissé une trace suffisamment importante pour que l’on se souvienne d’eux. Mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Ensemble, revenons sur les oubliés, ceux qui n’ont laissé que leur sacre mondial.

Dans l’épisode précédent, nous avons observé le cas unique de Mario Lega, champion du monde avec une seule victoire en carrière. Aujourd’hui, penchons-nous sur un pilote qui en dénombre huit, et à qui l’avenir était promis.

Issu de la génération dorée espagnole, Julián Simón se fait repérer très tôt. Doté d’un talent avéré, il réalise sa première wildcard en mondial 125cc à 15 ans, preuve de sa précocité. Lors de cette saison 2002, il est propulsé par le team junior de la formation Telefonica Movistar, alors l’une des plus importantes. Ces quatre courses disputées lui permettent de trouver un guidon à temps plein pour 2003 sur Malaguti. Tout débute comme dans un rêve.

Deux ans plus tard, et après une saison 2004 réussie sur une machine de milieu de grille, Julián intègre l’équipe Red Bull KTM. Dès lors, c’est l’explosion. Il affiche une régularité impressionnante pour son jeune âge, et n’est pas ridicule face à ses deux coéquipiers d’élite que sont Gábor Talmácsi et Thomas Lüthi. Par ailleurs, il remporte même son premier Grand Prix en carrière lors de la manche britannique. C’est certain : Julián Simón rejoindra les meilleurs dans la plus petite des catégories.

 

Avec Repsol, à Valence en 2008. Photo : Box Repsol



Sa saison 2006 est tout aussi, voire plus,impressionnante de régularité malgré l’absence de victoires et une blessure intervenue à mi-saison. Qu’importe ; Repsol Honda l’approche pour un passage en 250cc, à 20 ans seulement. Une occasion en or, qu’il saisit immédiatement. Cependant, cette période de deux ans ne lui réussit pas tant que ça. Certes, Julián tombe toujours peu et reste très régulier dans la performance mais le rythme, imprimé par Jorge Lorenzo puis Marco Simoncelli était simplement trop élevé. Heureusement pour lui, l’Espagnol toujours remarqué dans les pelotons parvient à se dégoter une nouvelle place dorée, mais il lui faut redescendre en 125cc.

Il s’agit du guidon laissé par Gábor Talmácsi dans l’équipe « Bancaja » de Jorge Martínez ! Doté d’Aprilia très performantes, « Aspar » avait réussi à imposer le Hongrois deux ans auparavant. Quel flair. Immédiatement, la mayonnaise prend. Julián Simón enflamme tout sur son passage, et descend rarement du podium ; Bradley Smith et Nicolás Terol n’y peuvent rien. Si Talmácsi dut patienter jusqu’à Valence, Simón fut sacré à Phillip Island. Aucune déconcentration à déplorer, puisqu’il remporta les deux courses suivantes et inscrivit un coup du chapeau à Valence (pole, meilleur tour en course et victoire).

Il compte sept victoires, soit autant que Brad Binder en 2016, et plus que Dani Pedrosa en 2003 ! Et encore, le total aurait dû être plus élevé. En effet, à Barcelone, Simón franchit la ligne en tête et célèbre… alors qu’il restait un tour. Des images qui ont fait le tour du monde. Aleix Espargaró lui rendit hommage 13 ans plus tard, là, sur la même piste. Andrea Iannone, bientôt vainqueur, ainsi que trois autres pilotes le passèrent. Heureusement pour lui, ceci n’eut point d’incidence sur le résultat final.

À ce moment là, Simón est le roi du monde. Rendez-vous compte : un espagnol issu de cette génération dorée, lui aussi titré à seulement 22 ans. Rien ne le prédestinait à figurer dans cette série d’articles. D’autant plus que contrairement à Gábor Talmácsi, ses débuts en Moto2 furent totalement réussis ! D’abord sur châssis RSV puis Suter – toujours sous la houlette de Aspar, Julián trouve tout de suite de la vitesse et de la régularité sur les nouvelles 600cc. Avec huit podiums dont cinq deuxièmes places, il termine vice-champion du monde derrière Toni Elías, mais devant Iannone, Lüthi et Corsi !

Mais où est le problème avec Simón ? Pourquoi ne se souvient-on pas de lui comme de l’un des cadors du championnat, très ouvert au début des années 2010 ? C’est à partir de là que ça se gâte, et très sérieusement.

 

Une année 2010 plus que réussie. Ici à Aragon, après un podium. Photo : Willtron


Son année 2011 commençait parfaitement, sur la lancée de la précédente. Mais lors du Grand Prix de Catalogne (décidément), sa carrière bascule. Kenan Sofuoğlu le découpe dans une tentative de dépassement, qui, soyons honnête, était totalement non maîtrisée et pas à la hauteur de son palmarès. Le pauvre Simón, en plus de partir en high-side, se prend la machine du Turc dans le dos. Double fracture de la jambe, qui, indirectement, marque le début de la fin.

Passé chez Avintia après avoir manqué de nombreuses courses en 2011, l’Espagnol n’est plus le même. Il est vrai qu’il arrivait, par moments, à accrocher les meilleurs et à monter sur le podium, mais trop peu souvent pour être mentionné. Il rejoint Italtrans Racing en 2013, puis QMMF l’année suivante. Il n’était pas rare de le voir peiner aux alentours de la 25e position ; une trajectoire sans doute difficile à gérer mentalement. Lors du Grand Prix d’Allemagne 2016, il monte une dernière fois sur la boîte, à vingt secondes du duel entre Zarco et Folger qui avait retenu l’attention de toute la planète moto.

Malgré cet exploit, cet exercice est déjà celui de trop. Simón n’y est plus, il décide d’arrêter. Pourtant, Garage Plus Interwetten le rappelle début 2017 pour remplacer Iker Lecuona, blessé lors des tests hivernaux. Deux manches catastrophiques, hors des points. Puis, Tech3 s’offre ses services en lieu et place de Remy Gardner à Austin ; nouvel abandon. C’est sur ces tristes termes que s’arrête définitivement la carrière d’un champion du monde.

Pourtant, il n’a pas quitté les circuits. Coach de Tito Rabat puis de Maverick Viñales, Julián est dans les parages. Comme quoi, rien n’est acquis. Lui qui était en droit de rêver aux titres mondiaux en MotoGP vit sa destinée altérée en une fraction de seconde.

Aviez-vous oublié Julián Simón ? Dites-le nous en commentaires !

 

Ici au Sachsenring en 2015, chez QMMF. Photo : Neuwieser

Photo de couverture : TOM

Tous les articles sur les Pilotes : Julian Simon

Tous les articles sur les Teams : Aspar Moto3, Avintia Racing, Italtrans Racing Team, QMMF Racing Team