Un nom inconnu du grand public. Une ambition démesurée. Une équation à haut risque. Avec sa nouvelle 820RR-RS, la jeune marque chinoise ZXMoto s’apprête à faire ses débuts en Championnat du monde Supersport en 2026. Et cette arrivée pourrait déclencher un véritable jeu de dominos dans le paddock.
En 2023, Zhang Xue, alors visage public de Kove Moto, avait déjà montré qu’il ne venait pas faire de la figuration dans le monde de la compétition moto. En propulsant la marque chinoise dans le championnat Supersport 300 et dans des rallyes tout-terrain, il affirmait une stratégie claire : le sport comme vitrine de la crédibilité technologique.
Mais un an plus tard, Xue quitte Kove après des conflits internes. Ironie du sort : son ancienne équipe se retire, tandis qu’un modeste team privé Kove mène la danse avec Benat Fernandez. Une erreur stratégique que Xue n’entend pas répéter avec ZXMoto, sa nouvelle marque, conçue comme une revanche industrielle.
Le prototype 820RR-RS de ZXMoto impressionne sur le papier : moteur trois cylindres en ligne, 150 chevaux en configuration standard, architecture pensée pour la course. Déclinée en trois versions, la moto se positionne déjà comme une alternative aux références européennes et japonaises.
Et ZXMoto ne compte pas partir seul à la guerre : depuis plusieurs mois, des négociations sont en cours avec l’équipe Evan Bros, structure prestigieuse et plusieurs fois titrée avec Yamaha (Krummenacher, Locatelli, Odendaal, Baldassarri). La stratégie est claire : associer une marque émergente à une écurie reconnue pour un atterrissage aussi crédible que redoutable.
La relation entre Evan Bros et Yamaha se tend. Dernier coup de tonnerre : le départ annoncé de Can Öncü, star montante et actuel dauphin au classement, vers Ten Kate Yamaha en 2026, pour remplacer Stefano Manzi.
Cette perte, mal vécue par Fabio Evangelista, patron d’Evan Bros, pourrait précipiter un divorce avec Yamaha. Surtout que la marque japonaise semble désormais concentrer son attention sur d’autres structures comme Ten Kate et GMT94.
La ZXMoto 820RR-RS : la première vraie Supersport chinoise de compétition et une chance pour Dominique Aegerter ?
ZXMoto, avec son appui financier et technologique, serait une porte de sortie idéale. Mais il y a un hic : le jeune Indonésien Aldi Mahendra, déjà sous contrat pour 2026, est lié à Yamaha. Pour que le projet ZXMoto voie le jour, Evan Bros devra casser son deal actuel et constituer une nouvelle paire de pilotes.
Ce changement de camp potentiel a des répercussions en cascade. Si Evan Bros rejoint ZXMoto, Andrea Quadranti, patron de MV Agusta Reparto Corse, pourrait enfin obtenir le soutien de Yamaha, qu’il réclame depuis des années. Il remplacerait ainsi Evan Bros dans l’écosystème officiel Yamaha.
Une aubaine pour Dominique Aegerter, double champion du monde Supersport, qui pourrait retrouver sa catégorie de prédilection tout en conservant le soutien stratégique de l’importateur suisse Hostettler (via le sponsor iXS).
Quadranti l’affirme : « la MV a 13 ans, sa marge de réglage est trop faible. La Yamaha est la meilleure moto aujourd’hui. » S’il n’obtient pas Yamaha, Triumph est envisagé comme alternative.
La volonté de Zhang Xue est limpide : placer ZXMoto sur les grilles internationales, que ce soit en Supersport ou au Rallye Dakar, en cours de préparation. À travers le modèle 820RR-RS, la Chine veut montrer qu’elle n’est plus seulement capable de copier, mais de rivaliser au plus haut niveau technique et sportif.
En un sens, le plan ZXMoto est un test grandeur nature : les Européens laisseront-ils la Chine s’infiltrer dans leur bastion le plus prestigieux ? Et surtout, le paddock Supersport est-il prêt à un big bang commercial et politique venu de l’Est ?
le Supersport 2026, un tournant géopolitique ?
L’arrivée de ZXMoto pourrait marquer un véritable tournant industriel dans l’histoire du championnat du monde Supersport. Ce n’est pas seulement un nouveau constructeur : c’est la Chine qui pousse les portes d’un bastion européen, avec de la technologie, de l’argent, une structure solide… et une vision à long terme.
La seule question restante : les instances oseront-elles valider ce bouleversement d’équilibre ?