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Dans cette rubrique, nous n’allons pas directement évoquer les Grands Prix motos. À la place, nous allons plonger dans l’histoire de la plus prestigieuse course au monde : Le Tourist Trophy. La simple évocation de ce nom donne des frissons à certains passionnés. Petit rappel, pour les nouveaux. Le « TT » est une course mythique, prenant place chaque année sur l’île de Man, une petite dépendance autonome située entre l’Angleterre et l’Irlande du Nord. Elle se déroule sur un circuit de plus de 60 km, tracé à même les routes, depuis 1907.

Dans la famille Dunlop, je demande le frère. Robert, dans l’ombre de Joey, n’était pas moins talentueux. À coup sûr, l’un des destins les plus incroyables de l’histoire de la moto.

Né en 1960 à Ballymoney, il baigne dans le monde des courses sur route depuis sa tendre enfance. C’est sur des circuits courts que se révèle son talent à la fin des années 1970, avant de passer professionnel au début des années 1980.

Rapidement, le Manx Grand Prix puis le Tourist Trophy lui tendent les bras. À la suite d’une incroyable chevauchée, il s’empare de la première place du classement « newcomers junior » (les rookies) avec le nouveau record en 125cc.

 

Bob Dunlop, au départ du TT 1992. Photo : Christof Berger


C’est l’explosion. Tout réussit au populaire Robert, sans doute plus à l’aise devant les caméras que son frère Joey. Pendant qu’il enchaîne les succès sur son tracé fétiche, celui de la Cookstown 100, il devient internationalement connu.

1989 marque un tournant dans sa carrière. Non content d’avoir remporté sa première « vraie » course au TT catégorie 125cc, ou « ultra lightweigh », il triomphe à l’occasion du Grand Prix de Macao, devant des machines plus puissantes.

On le sait : La vie, pour ces pilotes, ne tient pas à grand-chose. Ainsi, l’impitoyable loi du Tourist Trophy ne favorise personne, même les plus braves. Durant l’édition 1994, l’irlandais du nord est victime d’une effroyable accident au guidon de sa Honda RC45.

Certains l’ont vu mort, mais pas lui. Miraculeusement et au plus grand étonnement des médecins, Robert était bien vivant mais dans un sale état. Le diagnostic est sans appel : Avec une jambe en miettes, une pléthore d’os cassés et autres traumatismes, il ne pourra plus jamais piloter.

Ses fils William et Michael n’ont encore que neuf et six ans, mais doivent vivre avec un père handicapé à vie. C’était mal connaître le bougre. Deux ans plus tard, le revoilà déjà sur une moto. Dans la souffrance et l’incapacité de se servir de sa jambe, il court dans la douleur mais monte à nouveau sur le podium du TT en 1997, avant de remporter l’épreuve 125cc en 1998.

Le tour de force ne plaît pas à tout le monde, et son cas sera même discuté par l’Assemblée d’Irlande du Nord, à cause d’évidents problèmes d’assurances et d’éthique. Robert dit vouloir mettre un terme à sa carrière fin 2004, mais il n’en est rien.

Quelques nouvelles opérations plus tard (toujours en lien avec son accident de 1994), il remonte sur la plus haute marche du podium lors de la North West 200 2006. Sa 15e victoire sur le triangle sera la dernière.


Dunlop décida de prendre le départ de la course de trop. À 48 ans, il s’aligna à la North West 200 2008, aux côtés de ses deux fils en catégorie 250cc. Robert s’était interdit de reprendre le guidon d’un quart de litre, plus puissant et lourd qu’une 125cc.

 

Une statue en l’honneur de Bobby, à Ballymoney, la ville de la dynastie Dunlop. Photo : Ramllow


En qualifications, Robert serre son moteur et commet une erreur irréparable. Son levier d’embrayage est situé du même côté que le frein avant, car adapté à son physique diminué. Dans la précipitation, il se trompe de levier et chute lourdement à terre, à environ 300 km/h.

Darren Burns, juste derrière, ne peut l’éviter et percute le corps à pleine vitesse. Robert décède de ses blessures à l’hôpital le plus proche. Son deuxième fils Michael remporte tout de même la course à la suite d’une bataille légendaire, qui mérite un article à part entière.

Robert Dunlop fut enterré à côté de son frère, dans la terre de Ballymoney. Une terrible perte, qui met en avant le dévouement et la passion d’un homme. Peu importe les blessures, la souffrance, Robert courrait. Un drogué d’adrénaline, mort de sa passion. Une vie vécue, magnifique et respectable à tous points de vue.

 

Photo de couverture : Christof Berger