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Suite à la douleur à l’avant-bras droit rencontrée par Fabio Quartararo lors du Grand Prix d’Espagne, Jean-Michel Bayle a publié un texte abordant à la fois le problème du syndrome des loges et le pilote français.

N’étant pas docteurs et les informations sur ce qui s’est médicalement passé dans la combinaison d’El Diablo étant quasiment inexistantes, nous ne pouvons que prendre acte et reporter le texte de « JMB », en attendant, peut-être, une explication plus officielle de la part de l’intéressé ou du monde médical…


Syndrome des loges.
Ce weekend j’ai entendu tout et n’importe quoi au sujet du mal de bras et du syndrome des loges…
Alors je vais vous dire mon point de vue.
il y a deux ans quand j’étais allé donner un coup de mains a Johann Zarco j’ai pu constater ce que je pensais depuis un petit moment, les motos de MotoGP progressent et vont de plus en plus vite (plus de puissance, plus de grip pneus, anti-patinage, plus de frein) et donc forcement les contraintes physiques sur les pilotes augmentent, c’est juste logique.
Ce n’est pas étonnant de voir arriver de plus en plus de problèmes physiques sur les pilotes, mal de bras, fatigues, essoufflements et j’ai un peu l’impression qu’ils découvrent tout ça depuis peu, venant souvent, de plus, des catégories Moto2 qui sont des motos beaucoup moins physiques que les MotoGP.
Je viens du Moto-Cross et du Super-Cross et je peux vous dire que le mal de bras je connais, le pilote de Cross est confronté a ce problème dès son plus jeune âge : Dès qu’il essaye d’aller vite sur une longue distance, il est sujet au mal de bras.
Bien sûr, certains pilotes ont plus de soucis que d’autres et il peut y avoir beaucoup de raisons a cela, la génétique, l’entrainement passé, l’entrainement actuel, la position, le stress, la pression de la course, l’enjeu, bref beaucoup de choses entrent en jeu dans le mal de bras.
Dans le Moto-Cross et le Super-Cross on apprend à vivre avec et surtout à gérer son effort, car si on insiste trop, le syndrome des loges arrive et après c’est incontrôlable.
Revenons donc sur le sujet du weekend où Fabio était en tête de la course MotoGP de Jerez et a dû ralentir pour pouvoir finir ce Grand-Prix avec une tétanisation complète de son avant bras. Je n’ai pas parlé avec lui ou ses proches mais de mon expérience et de ce qu’il a expliqué je suis certain d’avoir déjà ressenti cette sensation dans ma carrière de pilote de Super-Cross.
La phrase la plus simple que j’ai entendu est “Mal de bras donc syndrome des loges donc opération et tout sera OK…”
Maintenant prenons de la hauteur pour essayer d’ analyser cette situation.
1- le circuit de Jerez est un des circuits les plus difficile physiquement avec une Motogp, lignes droites très courtes, si courtes que ce n’est même plus des lignes droite car les pilotes se battent avec leur moto pour revenir sur la bonne trajectoire de freinage, beaucoup de virages rapides et trois virages très lents, donc gros freinages et grosses accélérations.
2- Fabio avait un rythme impressionnant en course pour essayer de faire le trou avec ses poursuivants, il essayait, je pense, de se mettre à l’abri en cas d’usure de son pneus arrière dans les 5 derniers tours. Mais il y a une grosse différence entre faire un ou deux tours très rapides et en faire 7 ou 8.
3- Le mal de bras survient généralement quand la contrainte est trop forte et trop longue, le muscle manque d’oxygènes et il gonfle et du coup le sang circule moins bien et  donc encore moins d’oxygènes, c’est un cercle vicieux dans lequel il ne vaut mieux pas rentrer.
Maintenant pourquoi cela arrive a certains pilotes et pas à d’autres ?
L’an passé durant le confinement on m’avait posé la question sur ce que je pensais de Fabio, ça m’avait valu un coup de fils de sa garde rapprochée pour me signaler que j’avais tort de dire ça… J’avais dit a ce moment la que Fabio avait deux gros point faible à travailler, le physique et le mental, car, lors de la saison 2019, j’avais remarqué que sur les circuits très physiques, il avait du mal à garder sa moto sous contrôle, surtout après quelques tours et que mentalement il avait tendance à abandonner l’effort quand il y avait des soucis techniques (usure pneu ou mauvais réglages).
Ne pensez pas que je critique Fabio, j’essaye toujours de comprendre les points forts et les points faibles des pilotes, j’ai toujours été perfectionniste et j’ai toujours essayé de comprendre le pourquoi du comment dans tous les domaines.
Donc j’étais très content de voir sa progression coté mental lors des 3 premières courses de la saison, là, je me suis dit, impressionnant le Fabio, il a pris beaucoup de confiance.
J’avais un petit doute sur le physique, car j’avais entendu quelques plaintes au sujet de ses bras.
La conclusion ?
L’opération du syndrome des loges n’est jamais la solution idéale car généralement le problème revient car la cause qui a provoqué le problème est toujours là.
Maintenant, l’opération peut permettre de reprendre une activité intense rapidement mais il faut absolument travailler ce qui provoque le mal de bras.
Si on améliore sa condition physique et ses capacités cardiovasculaires, le corps est capable d’amener plus d’oxygène dans les muscles et donc les bras.
Quand on a une meilleure condition physique et des capacités cardiovasculaires meilleures, le cœur bat plus bas pour le même effort. Cela nous donne une marge en cas de coup de stress durant la course ou une demande temporaire plus importante et donc toujours d’apporter plus d’oxygène dans les muscles.
On peut aussi grâce a l’entrainement constituer un muscle plus endurant et moins explosif, les fibres des muscles se travaillent et se spécialisent selon le type d’effort demandé à l’entrainement, fibres à contraction lente et rapide.
Il est possible aussi de travailler sa stratégie en connaissant ses points faible, il aurait été peu-être plus sage en sentant le problème arriver, de baisser un peu le rythme et se laisser doubler par Miller et de le contraindre à imposer le rythme de la course.

Voilà mon analyse. Je ne critique absolument pas Fabio, j’essaye de comprendre avec sincérité et objectivité ce qu’il s’est passé et je lui souhaite de trouver les solutions à ses problèmes pour pouvoir se battre pour le titre mondial.


Crédit photo : Roman Borák

 

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