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Marc Márquez Pedro Acosta

Si vous suivez les Grands Prix, et notamment les catégories inférieures, vous avez forcément déjà entendu cette phrase : « Pedro Acosta, c’est le nouveau Marc Márquez ! ». Est-ce réellement le cas ? C’est la question à laquelle nous tentons de répondre depuis hier. Ainsi, la lecture du premier volet est fortement recommandée : vous pouvez le retrouver en cliquant ici. Dans l’épisode précédent, nous évoquions les similitudes, parfois évidentes, parfois moins, qui lient les deux géniaux pilotes. Mais sans rappeler l’évidente unicité de chacun, des différences plus subtiles existent également. C’est l’objet de ce deuxième volet, et nous allons essayer de mettre en lumière pourquoi ils ne sont pas si proches.

 

Marc Márquez et Pedro Acosta, une différence de niveau rarement évoquée

 

Concernant les différences principales, la première, celle qui saute aux yeux, est le niveau des deux. C’est factuel ; au même moment de sa carrière, Marc Márquez était un bien meilleur pilote que Pedro Acosta.

Alors, oui, Acosta avait l’avantage dans la plus petite des catégories. Il a remporté le championnat Moto3 dès sa première saison en mondial, un fait absolument impressionnant nous direz-vous. C’est vrai, Marc Márquez dut attendre trois ans pour être titré en 125cc, l’équivalent en deux-temps. Vous auriez raison. Mais il faut prendre en compte le contexte. Marc Márquez a passé beaucoup moins de temps dans les catégories de promotion. Quand il réalisait une seule année CEV en 2007 avant d’accéder au mondial, Pedro Acosta, lui, comptait des apparitions dans six saisons différentes. Une en European Talent Cup, puis trois en CEV, et finalement, deux en Red Bull Rookies Cup, championnat qu’il remporta aisément en 2020.

 

Marc Márquez Pedro Acosta

Pedro Acosta tout en glisse. Très bon en Moto2, son titre Moto3 2021 est à relativiser malgré sa précocité. Photo : Red Bull KTM Ajo

 

Quand Pedro Acosta débarque en Moto3 lors de la saison 2021, il roule chez Red Bull KTM Ajo, la meilleure équipe, tout simplement. Marc Márquez a aussi débuté pour KTM, mais à l’époque, la firme autrichienne était à la ramasse, loin derrière Aprilia et Derbi. D’ailleurs, pour cette année rookie en 2008, il était meilleur pilote KTM à la 13e position du général. Maintenant, étudions aussi le titre de Pedro Acosta. Contrairement à ce qu’on entend souvent, il n’était pas si incroyable si l’on omet qu’il s’agissait de son premier exercice au plus haut niveau. Certes, son début d’année était spectaculaire, avec cette victoire au Qatar en partant de la pit lane, mais il ne faut pas oublier que Dennis Foggia, sur une Honda Leopard moins performante, a manqué de lui reprendre 97 points en une demi-saison ! Si Darryn Binder n’avait pas fauché l’Italien au Portugal, l’avant-dernier Grand Prix de la saison, qui sait ce qu’il serait advenu lors de l’ultime manche à Valence. Nous ne le rabaissons aucunement, mais il faut simplement prendre du recul avec cet exploit – car gagner dans sa première année représente un exploit.

Ainsi, nous pensons que son passage en petite catégorie est aussi impressionnant que celui de Marc Márquez, pas plus, pas moins. En 2010, Marc s’est imposé tout aussi jeune, à quelques jours près, et d’une manière beaucoup plus dominante, ce qui équilibre la discussion. Mais le véritable gouffre s’ouvre en Moto2.

 

Le passage en catégorie intermédiaire, juge de paix ?

 

C’est là que la comparaison ne tient plus, au moins à travers le seul prisme du niveau intrinsèque. Cette fois, les deux ont fait leurs premiers tours de roues en Moto2 sur la meilleure machine de la catégorie ; d’un côté, la Suter-Honda affûtée aux petits oignons par l’équipe Caixa Catalunya – Repsol d’Emilio Alzamora pour Marc Márquez (rien que ça). De l’autre, la Kalex-Triumph rebadgée KTM engagée par Aki Ajo et son équipe de sorciers – accessoirement championne et vice-championne du monde en titre avec Remy Gardner et Raúl Fernández – pour Acosta. Que du lourd.

 

L’équipe de Márquez en Moto2, c’étaient les Avengers, une équipe d’usine dédiée à un seul pilote. D’ailleurs, de nombreux soupçons de tricherie concernant l’ECU unique utilisé en Moto2 furent émis à l’égard de la formation espagnole. Imaginez seulement ; la quatrième banque espagnole sponsorisait un seul homme. Catalunya Caixa, ou CX, fut rachetée par le mastodonte BBVA en 2015. Photo : Box Repsol

 

Et pourtant, il n’y a pas photo. Oui, Pedro Acosta connut une très bonne saison rookie, remportant même trois courses avec une pole au Mans, mais aussi marquée par six résultats blancs. Marc Márquez, à 18 ans, soit au même âge, évoluait dans une toute autre dimension. Nous parlons ici de sept victoires et sept pole positions contre des adversaires du calibre de Stefan Bradl et Andrea Iannone. Il était le meilleur du monde, dans la course au titre jusqu’à la fin. D’ailleurs, il aurait pu marquer l’histoire si ce n’était pour une vilaine blessure aux yeux, la fameuse qui fit une nouvelle apparition en 2021.

Ensuite vient leur saison sophomore, soit la deuxième en Moto2 ; 2012 pour Márquez, et 2023 pour Acosta. Et là encore, pas de débat possible. Márquez s’est presque amusé face à la concurrence, avec neuf victoires en dix-sept courses, sept poles, et quatorze podiums (!). Oui, les deux se dirigent vers le titre car Pedro Acosta est bien lancé, mais la manière est loin d’être la même. Parfois, on le voit se faire remonter comme face à Celestino Vietti en Autriche, et même, peiner considérablement à suivre ses adversaires comme en Catalogne. Márquez ne connaissait pas de trous d’air.

 

 

Et au niveau du style ?

 

Ici encore, la différence est notable. Márquez avait un style affirmé en piste, déjà rude avec ses adversaires (rappelez-vous de Tom Lüthi au Qatar). Marc était capable de véritables coups d’éclats, d’éclairs de génie comme sa victoire en partant de la dernière place à Valence en 2012 ; fait rarissime en Moto2. Pedro Acosta est plus doux, plus en phase avec son temps, plus cérébral aussi. Comme beaucoup de la nouvelle génération, il est plus neutre dans son pilotage, mais c’est aussi ce qui marche. Il y a juste à observer Pecco Bagnaia pour s’en convaincre.

 

Conclusion

 

Il y a définitivement des similitudes entre Marc Márquez et Pedro Acosta, mais nous pensons que la nationalité et l’identité visuelle, deux facteurs étudiés dans le premier volet, sont majoritairement responsables de ces comparaisons. Si l’on exclut la précocité, commune à de nombreux autres pilotes par ailleurs, les deux et leurs accomplissements ne se ressemblent pas tant que ça. Mais ce n’est pas grave pour autant. Nous pensons que Pedro Acosta, talent générationnel s’il en est, peut réaliser une carrière magnifique ; peut-être même plus belle que celle de Marc Márquez, qui sait. En tout cas, c’est ce que nous lui souhaitons.

 

Honda et Repsol ont tout fait pour faire monter Marquez. Dès les premiers essais de Valence fin 2012, nous savions qu’on avait affaire à un alien. Cela sera-t-il le cas de Pedro Acosta sur une KTM/GasGas ? Rien n’est moins sûr. Photo : Box Repsol

 

Photo de couverture : Box Repsol

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