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En ce dimanche 20 juin 2021, Marc Márquez a répondu aux questions des journalistes depuis le circuit du Sachsenring, à l’issue du Grand Prix d’Allemagne.

Nous sommes allés écouter (via un logiciel de téléconférence) les propos du pilote espagnol, qui est parvenu à signer une onzième victoire d’affilée sur le tracé allemand, signant ainsi son premier succès depuis le Grand Prix de Valence 2019.

Comme à notre habitude, nous reportons ici les paroles de Marc Márquez sans la moindre mise en forme.

 


 

Marc, vous restez le roi ici au Sachsenring. J’imagine que cette victoire suscite beaucoup d’émotions chez vous, avez-vous eu le temps de réaliser ce que vous avez accompli ?

« Je crois que je ne réalise toujours pas ce qui se passe… C’est vrai que nous avons passé un difficile moment dans ma carrière, et c’est toujours difficile d’ailleurs. J’espère que cette victoire va m’aider à poursuivre dans cette voie, car quand je suis arrivé ici alors que je sortais de trois résultats vierges liés à des chutes, ce n’était vraiment pas facile sur le plan mental, ni sur le plan physique d’ailleurs. »

« Dans ma position, c’était impossible de travailler tout seul : Il me fallait les gens, les docteurs, les physiothérapeutes, le manager, la famille, les amis. J’ai trouvé ce soutien parmi toutes ces personnes qui m’ont grandement aidé pour revenir. Maintenant il est temps de profiter, et de remercier tout le monde et en particulier Honda, car j’apprécie tout le respect dont ils m’ont témoigné à travers toutes ces années. C’est une victoire qui est certes importante pour moi, mais aussi pour toute la famille du HRC. »

Parlez-nous de votre course selon votre perspective. Dès le départ vous êtes parvenu à prendre l’intérieur dans le virage 1, puis vous avez pris le dessus sur Aleix Espargaró avant qu’il ne pleuve et que Miguel vous mette la pression…

« Je l’avais dit dès jeudi : Ce circuit allait être le premier où j’allais ressentir moins de limitations au niveau du physique, du fait qu’il y a bien moins de virages sur la droite. Dans les virages à gauche je ne peux pas dire non plus que je suis dans la meilleure position du monde, mais au moins je ne ressens aucune limitation pour être rapide. »

« Aujourd’hui j’ai pris le départ parfait, et mon premier tour a été parfait lui aussi. Et quand j’ai vu quelques gouttes tomber je me suis dit que c’était mon jour : J’ai continué à attaquer et c’est à ce moment-là que j’ai commencé à creuser l’écart. Après, Miguel a commencé à me rattraper et je me suis dit que ce serait finalement peut-être un peu plus difficile qu’escompté. J’ai cru en moi, même si c’était difficile d’attaquer et d’avoir la confiance, car j’avais en tête cette série de trois chutes en course. Donc au-delà de la victoire c’était aussi important de simplement finir la course. Et c’est ce que nous avons fait, de la meilleure des façons. »

 

 

On dit souvent que les pilotes de MotoGP sont de véritables extraterrestres, mais au final vous restez bien humains. Est-ce qu’il y a eu un moment l’an dernier où vous vous êtes dit que jamais vous ne vous retrouveriez dans cette position ?

« Quand j’étais blessé, j’ai toujours eu la conviction que j’allais être en mesure de revenir, mais quand je suis remonté sur une MotoGP pour la première fois à Portimão, je me suis rendu compte que je partais de très loin par rapport à mon niveau habituel, et cela a été très difficile à encaisser. Les courses ont d’ailleurs été encore plus difficiles sur ce point. J’ai alors pris le parti de faire abstraction de tout cela et de me concentrer uniquement sur moi. »

« J’ai arrêté de prêter attention aux commentaires, je me suis concentré avec mon équipe et avec toutes les personnes qui étaient en mesure de m’aider. En ce sens, mes appels téléphoniques avec Mick Doohan m’ont énormément aidé. Je l’ai même rencontré au Mugello, et il a vécu une situation très similaire sur la période 1992-93. Mais je me souviens d’un long appel où je n’ai fait que l’écouter, il parlait et moi je prenais les informations. Il m’expliquait la situation dans laquelle il s’était retrouvé, mais au final c’était exactement la même que la mienne. »

« Il s’est retrouvé exactement face aux mêmes problèmes, il ne comprenait pas la moto, il n’était pas en mesure de piloter comme il l’entendait, il faisait des erreurs stupides, sur certaines courses il était rapide mais pas lors des essais libres sans savoir pourquoi. Tout ce qu’il a traversé, je l’ai traversé. Ces conversations avec Mick Doohan m’ont donc grandement aidé. »

« Tout ce qu’a traversé Mick Doohan, je l’ai traversé aussi »

Votre retour est similaire à ce qu’a fait Ana Carrasco la semaine dernière. Pensiez-vous avant le weekend qu’un résultat ne serait-ce que sur le podium était possible ici en Allemagne ?

« Ana a fait un retour encore meilleur que le mien sachant qu’elle s’est imposée dès sa première course ! Ce qui est vrai c’est que cette victoire est importante pour toute l’équipe. Cela nous procure une motivation supplémentaire pour l’avenir. Ce type de résultat est important après une grosse blessure. Si je suis honnête, je pense qu’on va souffrir encore à Assen. Comme je l’ai dit en début de weekend, j’allais avoir moins de limitations physiques ici au Sachsenring. Le déroulé du Grand Prix a été complètement différent de d’habitude : Dès la première séance d’essais libres j’ai sorti la grosse attaque. »

« Je pense qu’on va encore souffrir à Assen »

 

 

A quel point cette nouvelle victoire au Sachsenring est-elle différente des dix précédentes ?

« Ce succès est différent des autres. Je ne suis pas plus heureux que d’habitude, mais je vais peut-être davantage réaliser lorsque je serai rentré au garage. Cela a été très difficile sur le plan mental, car comme je l’ai dit je sortais de trois courses ponctuées à chaque fois par une chute, et j’aurais très bien pu baisser de régime et me contenter d’un podium mais ce n’est pas ma façon de penser. J’ai suivi mon instinct. Mardi j’ai reçu un appel d’Alberto Puig, me disant que je savais quel résultat attendait de moi l’équipe sur ce tracé. La conversation s’est arrêtée là, il n’y avait rien à dire de plus. Du point de vue rationnel, j’ai pris un excellent départ, il y a eu ces gouttes de pluie et, malgré la pression de Miguel à la fin, j’ai été capable de répliquer, et c’est là que je me suis dit que c’était mon jour. »

Qu’en est-il de vos douleurs au bras ?

« La douleur est toujours là. Je dois dire que j’ai davantage souffert ici qu’à Jerez. Pour les autres courses je ne peux rien dire car je ne les ai pas finies… Je n’ai jamais dépassé dix tours. Je pense que je vais davantage souffrir la semaine prochaine à Assen, car c’est une piste qui est plus exigeante du point de vue physique. Je sens encore que ma situation n’est pas normale, mais cela nécessite du temps pour rentrer dans l’ordre. »

 

 

Vous avez fait un travail remarquable aujourd’hui, mais tout le monde sait que vous entretenez une relation particulière avec le Sachsenring. Que pouvez-vous attendre du reste de la saison suite à cette victoire ?

« Sur cette piste il se passe deux choses : D’une part je peux rouler avec moins de limitations physiques, et d’autre part les défauts de notre moto se font moins ressentir. Nous l’avons vu durant tout le weekend, toutes les Honda ont été mieux que d’habitude. C’est vrai qu’en course ce fut plus compliqué dans le sens où les autres motos doivent prendre garde essentiellement à leur pneu arrière, alors que nous nous devons également faire attention au pneu avant. »

« Lors de la première partie de la course j’étais relativement lent uniquement pour ménager le pneu avant, et aucunement le pneu arrière. Cela fait partie des choses que nous devons améliorer pour l’avenir. A Assen nous devrions de nouveau être en difficulté pour aller en Q2, et nous serons probablement dans la même situation qu’au Mugello ou à Montmeló. Nous avons besoin de temps, et le côté positif c’est que la motivation est là. Une chose importante a été la journée d’essais à Montmeló. C’est là que j’ai pu rouler à mon rythme, sans pression, c’était comme des essais de présaison pour moi. Cela n’a duré qu’une journée, mais j’ai pu couvrir de nombreux tours, et ça m’a beaucoup aidé à appréhender la bonne façon de piloter, les pneus. »

« La journée d’essais à Montmeló a été très importante »

Pensez-vous que la future trêve estivale va vous aider à remonter encore un peu plus la pente, et pensez-vous que vous auriez pu obtenir le même résultat avec des températures plus chaudes ?

« Je pense que la trêve estivale va aider, et j’espère progresser encore durant ce mois et demi qui s’annonce, mais je ne pense pas que je serai encore au même niveau qu’en 2019. Petit à petit je m’attends bien sûr à me rapprocher des pilotes en tête, mais je ne m’attends pas à être suffisamment dans le coup pour viser la victoire. On va donc voir, il ne faut pas non plus partir perdant, et continuer à travailler. »

« Concernant la météo, je me suis compétitif dès le début du weekend, et les variations de température n’ont finalement eu que peu d’effets. C’est vrai qu’il y a bien eu une petite dégradation des gommes, mais malgré cela j’ai tout de même pu continuer à attaquer et à conserver une bonne compréhension des pneus. »

Avez-vous eu peur de ne plus jamais être en mesure de gagner ?

« De septembre à novembre dernier, j’avais vraiment peur pour mon bras, car j’avais de moins en moins de force et de très mauvaises sensations, car il y avait une infection. Ce fut un vrai pas en arrière. Je n’étais même pas inquiet quant au fait de gagner de nouveau, mais à propos de mon état de santé. Cela mis à part, dès que j’ai été opéré ça a commencé à aller mieux. »

Comment avez-vous réussi à rester concentré lors des derniers tours ? Et concernant la trêve estivale, pensez-vous justement que vous allez pouvoir vous permettre de vraiment vous reposer, ou bien il va vous falloir continuer votre rééducation à marche forcée ?

« C’était bien sûr difficile de rester concentré en course, et de ne pas lâcher l’affaire. Il faut dire que sur certaines portions du circuit j’étais vraiment très tendu sur la moto car je ne voulais absolument pas chuter, ne faire aucune erreur. Ensuite je me suis dit qu’il fallait que j’oublie tout cela et que je me focalise sur mon pilotage. La pression que me mettait Oliveira, c’était comme celle que me met mon frère à l’entraînement : On met le pilote le plus rapide derrière. Donc là pour soutenir la pression j’ai essayé de me transposer mentalement sur cet entraînement et faire comme si c’était mon frère derrière moi. J’ai donc continué à attaquer et je n’ai rien lâché. »

« Concernant mon repos, je pense que je vais avoir besoin de deux semaines pour me reposer et couper, car déjà il y a deux ans je n’ai même pas pu me reposer durant l’hiver en raison de mon opération à l’épaule, quant à l’hiver dernier j’ai été très occupé avec ma récupération avec mon physiothérapeute. Du point de vue mental c’est important que je coupe pendant deux semaines, quitte à être moins prêt pour l’Autriche. »

« C’est important que je coupe pendant deux semaines, quitte à être moins prêt pour l’Autriche »

Parmi toutes les journées « spéciales » que vous avez connues dans votre carrière, où classez-vous celle-ci ?

« Difficile à dire, car toutes ces journées renvoient à des moments très différents. La situation que je vis est très difficile, mais ce que je vis aujourd’hui me rend plus fier de tout le chemin parcouru jusqu’ici. Dans la plupart des sports généralement vous devez vivre dans le présent et ne surtout pas songer au passé. Le présent aujourd’hui, c’est Fabio qui mène le championnat et Miguel qui était au final plus rapide que moi. Ce jour est bien sûr important, mais ce n’est pas pour autant ma finalité. Je veux piloter mieux que cela, c’est-à-dire comme avant, et ça je n’en suis pas encore capable »

 

 

Quand vous dites que vous ne vous sentez pas encore à même de vous battre à la régulière pour la victoire, faites-vous allusion à vos limitations physiques ou à votre compréhension de la moto ?

« C’est un mélange des deux. Je ne suis pas en mesure d’aider suffisamment sur la moto, et à l’inverse la moto ne m’aide pas non plus. Cela rend les choses plus difficiles, mais sur cette piste les points faibles de la moto sont occultés, hormis dans deux virages bien précis. Assen est le prochain rendez-vous, et je ne serai toujours pas à 100% et les points faibles de la moto seront toujours là. Il faut donc continuer à travailler. Mais en attendant, cette victoire m’apporte vraiment un surplus de motivation. »

Étiez vous plus inquiet à propos de votre carrière en 2011 suite à votre accident en Malaisie et vos troubles de la vision qui ont suivi ?

« Les deux événements sont différents. Il y a dix ans j’avais des problèmes au niveau de la vision, mais cela n’a duré que trois mois, et les docteurs m’avaient alors expliqué qu’ils n’étaient pas certains que je puisse un jour piloter de nouveau une moto. Mais après l’opération tout était fini. Mais en ce qui concerne mon bras, c’est vraiment long : Il faut travailler constamment avec le physiothérapeute, qui vit chez moi depuis quasiment un an. Depuis Montmeló j’ai dit aux docteurs que je voulais revenir à ma vie normale, c’est-à-dire reprendre l’entraînement avec mon frère. C’est quelque chose qui a changé depuis Montmeló. »

 

MotoGP Sachsenring – Résultats course :

Crédit classements : MotoGP.com

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