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Pilier historique et co-fondateur de l’équipe Tech 3, Guy Coulon en assure la Direction technique tout en étant le chef mécanicien de Johann Zarco. Après un début de saison éblouissant avec deux podiums et deux pole positions, les deux derniers Grands Prix en Toscane et en Catalogne ont été un peu moins étincelants, et nous avons demandé son point de vue à Guy.

Quel est ton bilan d’ensemble du Grand Prix de Catalogne pour Johann ?

« On aurait pu faire une bonne course mais on a eu, même si ça ne s’est pas beaucoup vu de l’extérieur, plusieurs petites vicissitudes pendant l’épreuve. En fait, on avait un très bon rythme, comparable à celui de Rossi. Mais au départ il y a eu un accrochage entre Vinales et Johann parce qu’un gars a coupé juste sous le nez de Vinales. Donc Johann se retrouve 14e au premier partiel, alors qu’il était 8e sur la grille.

« Il voit que devant ça se détache un peu, donc qu’il doit passer Vinales rapidement, ce qu’il arrive à faire dans le virage 4. Mais là, alors qu’il est en train de le doubler, un drapeau jaune est présenté (pour la chute de Dovi, mais je ne suis pas sûr). S’il passait, il recevait une pénalité, donc il a freiné sur l’angle, en manquant de chuter parce qu’il a vu le drapeau jaune très tard. Ça a été hyper chaud et il a perdu 2 secondes. Il lui a fallu 4 tours pour revenir et repasser. Ça a été un enchaînement de petits soucis de ce style. Pendant la deuxième moitié de la course, il a eu un problème d’équipement qui l’a bien embêté. »

Qu’appelles-tu un problème d’équipement ?

« Un problème d’équipement du pilote, mais je ne souhaite incriminer personne. Donc ça a été une succession de petits ennuis qu’il ne fallait pas avoir. Certes, mieux qualifié sur la grille, il n’y aurait pas eu le problème du départ.

« Pour se remettre de ça, lundi comme on n’avait pas grand-chose à essayer à part un pneu avant, Johann a décidé de lui-même de faire deux simulations de course d’affilée, qu’il a très bien réalisées d’ailleurs. Tout le monde était en pneus tendres en course, donc on a fait les deux simulations avec le médium et le dur. Avec le médium, il a fait une simulation extrêmement solide, sans chrono sur le panneau ni sur la moto, sans aucun repère. Il voulait rouler décontracté et voir ce que ça donnerait à la fin. On a confirmé que son potentiel et celui de la moto étaient bons.

« On n’a pas bien couru au Mugello et notre résultat a correspondu à notre semaine qui n’était pas bonne. A Barcelone, on n’a pas tiré la quintessence parce que ça s’est mal goupillé. »

La qualification a semblé plus difficile qu’en début de saison. Quelle en est la raison ?

« Ecoute, je n’en sais trop rien… C’est toujours difficile à expliquer clairement.

Il n’y a pas eu de raison particulière ?

« Le grip était plutôt moyen l’après-midi, ce qui n’est pas la tasse de thé de la Yamaha. Malgré tout, c’était rudement serré. On aurait pu faire mieux, mais pour une fois ses meilleurs partiels n’ont pas été bout à bout sur un tour. On était juste à côté de Rossi en qualif, il était 7, on était 8. Vinales était juste devant, les 3 Yamaha étaient en 1 dixième.

« Pour les meilleurs tours en course, les 4 Yamaha se suivent, y compris Syahrin. On a les 5e, 6e, 7e et 8e meilleurs temps en course. Il y a 8 centièmes entre Vinales 5e et Zarco 7e.

« En résumé, Johann et Vinales ont eu un mauvais résultat en fonction du tout début de la course, et le problème d’équipement de Johann a fait qu’il a terminé derrière Vinales. »

Les 16 derniers Grands Prix ont été gagné par un pilote Honda ou Ducati, depuis la victoire de Valentino Rossi à Assen l’an dernier. Pourtant au Championnat trois pilotes Yamaha – Valentino Rossi, Maverick Vinales et Johann Zarco – occupent les deuxième, troisième et quatrième positions. Comment expliques-tu cette situation paradoxale ?

« On a une bonne moto, la Yamaha n’a pas vraiment de point faible, mais il lui manque juste la pointe pour gagner. Si tu veux, elle ne gagne pas mais elle a une note moyenne intéressante. C’est comme un élève assez bon dans toutes les matières, mais qui ne fait pas 19 sur 20 en maths. Nous on se contente de 15 dans toutes les matières. C’est une moto qui n’est pas trop compliquée, qui n’a pas de gros défaut, mais qui n’a peut-être pas actuellement la petite pointe de qualité qu’il faut pour gagner assez facilement. »

Souvent sur un Grand Prix, une Yamaha domine nettement les autres, parfois celle de Johann, parfois celle de Valentino. Pourquoi leurs performances ne sont-elles pas régulièrement plus proches ?

« On essaie chacun dans notre coin de trouver non pas le réglage miracle, mais la petite recette qui va faire qu’on va être mieux. Parfois tu perds un peu le fil et tu te retrouves un poil moins bien. Souvent pas de beaucoup, mais 1 dixième au tour, tu es mort.

« Si on analyse le Mugello et Barcelone, ce qui manquait à Valentino pour gagner, c’était du moteur. Alors que le moteur d’usine, il est bien plus vif que celui que nous avons. Donc on se dit qu’à Assen on pourra avoir un bon résultat avec une bonne moyenne de notes, sans avoir une note qui déborde particulièrement du lot. »

On a vu à Barcelone la difficulté de choisir le pneu avant pour la course, puis de le gérer. Sur un tel circuit au tracé récemment modifié et au revêtement refait, les appendices aérodynamiques qui plaquent la roue avant au sol ne constituent-ils pas un problème supplémentaire ?

« Je ne crois pas. Au contraire, à Barcelone ils nous servent bien, même s’ils nous grappillent un peu de vitesse de pointe. Il n’était même pas envisageable de les enlever car avec la même moto sans les ailerons l’an dernier, on a galéré dans la ligne droite de manière infernale. Il ne faut pas oublier que les 4 Yamaha l’an dernier étaient en Q1 ! Folger et Vinales sont passés en Q2 miraculeusement, alors que Valentino et Johann ne s’en sont pas sortis et étaient 13e et 14e sur la grille. On a tenté un truc lors du warm up et on s’en est sortis. Pas eux. Donc une bonne partie des problèmes ont été solutionnés avec les ailerons pour nous cette année. »

Vous roulerez chez Tech 3 avec des KTM l’année prochaine, y compris en Moto2. Quel souvenir d’ensemble garderas-tu de l’époque Mistral en Moto 2 ?

« En clair c’est un échec puisqu’on n’a pas gagné. On aura appris des trucs, mais on n’a gagné qu’une course. C’est déjà pas mal d’avoir gagné un Grand Prix avec une moto qu’on a faite. Ensuite, ça dépend de l’analyse qu’on fait. Globalement, pour le spectateur standard, c’est un échec.

« Tu vois, ce que Fabio a fait avec la Speed Up le week-end dernier montre qu’il y a des solutions. J’étais doublement content que Fabio gagne car la Speed Up est de loin, de très loin, la moto la mieux construite et la plus aboutie du plateau moto2, voire de l’ensemble du plateau. »

C’est flatteur pour eux.

« C’est flatteur ? Ce qui m’étonne, c’est que personne ne s’en rende compte.

Tout le monde n’a peut-être pas ton œil.

« Si tu vas la voir, si tu te donnes la peine d’aller la voir, tu n’as pas besoin d’un œil averti pour voir la qualité de l’engin. Ça m’étonne. Notre moto avait aussi des qualités, et quand on regarde bien les pilotes qui sont passés chez nous, l’année d’après il y en a très peu qui ont fait de meilleurs résultats sur une autre moto. Marcel Schrotter en 2014 finit 10e du Championnat avec 80 points. On ne l’a jamais revu dans les 10 premiers. Isaac Vinales en 2016 a marqué 19 points chez nous, mais moins l’année suivante sur une Kalex, or il était en deuxième année et non plus rookie. Ce qui prouve que l’analyse, on la fait un peu comme on veut. »

Photos © Tech 3

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