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Interviewer Hervé Poncharal après les essais MotoGP à Sepang n’aurait pas eu beaucoup d’intérêt, puisque cela aurait fait l’impasse sur les trois jours de test qui se sont achevés sur le nouveau tracé de Mandalika, en Indonésie.

Mais, à moins de trois semaines du début de la saison 2022, il nous a semblé important de recueillir le bilan du patron du team Tech3, non seulement en ce qui concerne son équipe qui aligne les rookies Raul Fernandez et Remy Gardner, mais aussi plus globalement pour KTM, avant, cerise sur le gâteau, écouter la vision de ce qu’un professionnel plus qu’expérimenté du paddock anticipe pour la saison 2022…

Cette interview est donc publiée en trois parties bien distinctes.

Retrouvez la première partie ici


Hervé Poncharal: « Une chose est sûre aussi, c’est qu’il y a eu en interne chez KTM une restructuration qui ne paraît peut-être pas très importante vue de l’extérieur, mais qui l’est beaucoup dans la philosophie et l’appréhension de comment gérer une saison. En 2021, suite à la très bonne saison 2020, les objectifs étaient très hauts et il y a eu beaucoup de pression sur tout le monde pour amener des nouveautés, et dans tous les domaines, moteur, électronique châssis, aérodynamique, des évolutions, avec peut-être des objectifs qui étaient trop ambitieux.
Beaucoup d’évolutions, et je dirais même peut-être trop, parce que quand tu amènes des choses à tester dans la saison, c’est compliqué. Quand tu le fais le lundi, d’abord il n’y en a pas beaucoup et le pilote est fatigué de son week-end. De plus, si le week-end s’est bien passé, le pilote ne va pas trop remettre en cause ce avec quoi il a roulé et il va avoir tendance à dire qu’il veut garder ce qu’il a. Et si le week-end s’est mal passé, il va avoir le moral dans les chaussettes et il va dire qu’aller vite le lundi aux essais n’est pas très utile. Donc, c’est compliqué et il ne faut pas tout mélanger.
Il a donc été décidé chez KTM, et je supporte et je souscris, qu’une fois que le championnat commence, il faut se concentrer sur peaufiner ce qu’on a, et faire du mieux qu’on peut pendant la saison, et en même temps laisser l’équipe d’essais développer et voir.
C’est très compliqué parce que ça veut dire que c’est peut-être des fois se bloquer des potentialités d’évolution, mais si on regarde le champion du monde en titre, notre ami Fabio Quartararo, on se dit que si la Yamaha n’évolue pas beaucoup, n’empêche qu’elle est championne du monde ! Ce qui a fait la force de Fabio, c’est lui avant tout, mais c’est aussi sa régularité. Et une machine qui est très bien maîtrisée par le pilote, très bien maîtrisée par l’équipe technique, ça paye aussi.
Il y a deux options : Yamaha est peut-être le plus conservateur, et ce n’est pas du tout critique, au contraire, et Ducati est peut-être le plus innovateur. Il faut choisir, et chez KTM on a dit ” OK, fin 2021, on a un package. Essayons de bien le comprendre, de bien analyser, vraiment, ce qui n’a pas été fait en 2021, suffisamment bien en tout cas, et partons de là, tirons des analyses post-essais hivernaux pour comprendre là où notre package mérite d’être amélioré, et là où il va bien.”
Et de ce moment-là, on va commencer à travailler, mais pas tout azimut, en mettant beaucoup de pression parce qu’il en faut, mais il y a de la pression positive et de la pression négative. Et quand des choses arrivent comme étant à valider pour être potentiellement une évolution, il faut les tester dans des bonnes conditions avec les bonnes personnes. Des bonnes conditions de piste et des pilotes ouverts à ça.
Un pilote de course, c’est avant tout un pilote qui fait des courses, et quand il est au milieu de sa saison, il est moins enclin à vraiment s’appliquer dans ce genre de choses : il a le regard bloqué sur les compteurs, sur les points, sur la course précédente et la suivante. Donc ce n’est pas facile et c’est pour ça qu’aujourd’hui, il y a peut-être des machines, notamment la Honda, qui est radicalement nouvelle et qui a beaucoup beaucoup évolué, mais pour notre machine, c’est une optimisation de la machine qui a roulé fin 2021.
Il n’empêche que j’ai vu Brad Binder et Miguel Oliveira qui disaient ” on est 10 fois mieux qu’on était l’année dernière à pareille époque “.
C’est vrai que notre moto est assez proche, pour ne pas dire très proche, de ce qu’on avait fin 2021. Mais si on arrive à avoir une base de commentaires et de compréhension de où on se situe et de où on a besoin de travailler, à un moment donné il faut se regrouper et la réussite vient aussi de la confiance que les gens ont entre eux, que ce soient les gens qui sont à l’usine, au siège social, l’équipe d’essais, l’équipe de course. Tout le monde ensemble, on avance tous dans la même direction, et dans un certain calme : on va essayer de faire les choses de manière plus rationnelle et plus sereine. »


En filigrane de cette explication d’Hervé Poncharal, on comprend bien l’allusion cachée à la valse des cadres qui se succédaient chez KTM et repartaient aussi vite qu’ils étaient venus. Depuis la restructuration matérialisée par le retrait de Mike Leitner des circuits, seul le test team aura la charge de développer les RC16, avec Dani Pedrosa et Mika Kallio, alors que les équipes Red Bull KTM Factory Racing et Tech3 KTM Factory Racing se concentreront uniquement sur les courses du championnat.

A suivre….

 

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