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En fin de saison dernière, nous avions découvert le partenariat mis en place entre Ducati et MegaRide, jeune société italienne napolitaine dirigée par Flavio Farroni, l’accord ayant pour but de mettre au point un logiciel de prédiction d’usure des pneumatiques Michelin MotoGP afin d’aider le team de Borgo Panigale à choisir au mieux la monte qui équiperait les GP 18 de Jorge Lorenzo et Andrea Dovizioso à chaque Grand Prix.

Quelques mois plus tard, devant le succès rencontré par les Rouges, le journaliste Carlos Domínguez a interviewé pour le site espagnol Motociclismo le PDG de la société transalpine pour tenter de savoir quel était l’avancement des travaux, et si MegaRide avait joué un rôle dans les derniers résultats des pilotes Ducati officiels.

Rappelons au préalable que Andrea Dovizioso a souvent évoqué le sujet des pneus, en général pour déclarer que sa moto s’y adaptait de façon imparfaite. Mais que semble en penser Flavio Farroni, au travers de cette interview ?

Tout d’abord, soulignons le, les réponses de l’ingénieur italien restent assez vagues et évasives, sous le motif de confidentialité de ses contrats et de ses travaux. On peut le regretter, mais on peut aussi le comprendre…

Voici néanmoins quelques extraits parmis les plus intéressants…

Flavio Farroni:  » Nos propres thèses et projets de thèse de doctorat se concentrent depuis des années sur le développement de méthodologies innovantes, d’outils et de procédures de caractérisation expérimentale capables de rendre le comportement d’un élément aussi complexe qu’un pneu, de le comprendre et de le simuler. De nombreuses entreprises et équipes de course, de la Formule 1 aux niveaux inférieurs, ont demandé des actions spécifiques pour améliorer leurs connaissances et leurs performances, et Ducati a été l’une d’entre elles « .

Quels étaient ou sont les besoins de Ducati ?

 » Je ne peux pas être très précis, mais la principale demande en sport mécanique est généralement la possibilité de reproduire la thermodynamique des pneus, leur adhérence et leur comportement d’usure dans des environnements de simulation en temps réel et de fournir à leurs concepteurs et ingénieurs des outils relativement faciles à utiliser pour analyser les informations du véhicule, en soulignant les effets physiques impliqués dans sa performance « .

Étant donné le succès, est-ce que d’autres constructeurs se sont manifestés ?

 » C’est en train de se produire, mais un contrat exclusif nous garde, fièrement, liés à Ducati, également pour la saison prochaine « .

Est-ce que ce contrat interdit la collaboration avec d’autres équipes ?

 » Je crains de ne pas pouvoir être aussi précis sur les détails de notre contrat « .

Quand il s’agit de prédire l’usure des pneus en temps réel, que voulez-vous dire exactement ? Pouvez-vous dire comment l’adhérence se dégradera dans les deux prochains tours ?

 » L’aspect fondamental d’un modèle prédictif et physique est l’adaptation aux mutations continues de l’environnement et de ses conditions. Il s’agit d’une gestion optimale des pneus en course, mais aussi du suivi de la rugosité de l’asphalte et de l’estimation de l’adhérence en temps réel. La demande principale est la reproduction de la thermodynamique du caoutchouc « .

Vous avez mentionné plus tôt que vous faites des versions spécifiques pour faciliter le travail des ingénieurs avec vos applications: est-ce que Ducati a besoin de la présence de travailleurs MegaRide sur des circuits comme Michelin ou Öhlins ?

 » Ces détails sont confidentiels mais notre philosophie, tant dans le monde académique que dans les collaborations de MegaRide, est basée sur la possibilité de fournir à nos partenaires tous les résultats qui proviennent de nos installations pour des expériences telles que notre TireLab et toute notre expérience en tant que groupe scientifique et en tant que professeurs ou ingénieurs qui suivent le développement de l’activité à la fois sur le site et sur la piste ».

Dans quelle mesure pensez-vous avoir aidé Ducati cette saison ?

 » Eh bien, les entreprises, les pilotes et les équipes réalisent enfin que l’optimisation des phénomènes qui se produisent dans la petite zone entre le caoutchouc et l’asphalte est cruciale pour le développement et la mise au point des véhicules. Nous espérons avoir apporté une contribution significative à la grande saison Ducati, mais les résultats sont principalement dus au travail des ingénieurs de Borgo Panigale, et en particulier ceux de l’équipe dynamique et de simulation du véhicule, qui a conçu cette grande machine « .

Lorsque vous analysez les différents composés Michelin, y a-t-il quelque chose de spécial qui attire votre attention ?

 » De telles informations sont hautement confidentielles et la connaissance de la même marque fait la différence dans la stratégie de développement. La viscoélasticité des composés, les transitions vitreuses et la définition claire de la plage thermique dans laquelle le pneu doit fonctionner, ce qui affecte le phénomène de dégradation et de chauffage, forment le Saint-Graal de l’optimisation « .

Après ces réponses volontairement évasives de Flavio Farroni , il reste difficile de juger quel est l’apport réel de MegaRide à Ducati.
Ce qui est sûr, c’est que l’on travaille dur, à grand renfort de capteurs et d’électronique (située dans la fameuse « Salad Box », placée sous la selle de la Ducati ?).

Cependant, il est évident que le travail n’est pas rendu facile par les derniers pneus arrière Michelin, qui ont quelque peu envoyé aux oubliettes les idées en provenance du passé, tel que par exemple, « un pneu tendre s’use plus vite qu’un dur et doit être utilisé quand il fait froid ».

Des principes qui sont restés vrais durant des décennies, mais qui ont laissé la place cette année à un état de fait reporté par Piero Taramasso:  » le pneu tendre est comme de la gélatine. Vous sentez l’adhérence supplémentaire car elle bouge. Lorenzo et Johann Zarco sont doux et en douceur avec la moto. Si le réglage est bon, ils peuvent extraire l’adhérence supplémentaire du tendre. Si ça bouge trop, on peut passer au médium. Le médium a moins d’adhérence mais il est censé être plus cohérent. Si le médium bouge encore, vous pouvez passer au dur, ce qui est censé vous donner plus de stabilité. Les pilotes agressifs comme Márquez et Cal Crutchlow peuvent utiliser le pneu dur. Lorsque la moto est stable, ils se sentent plus à l’aise et peuvent attaquer davantage « .

Ce rapport adhérence/stabilité semble donc devenir le critère de choix principal des pilotes MotoGP et la tendance est à ne plus parler vraiment de pneus tendres qui ne peuvent pas finir la course.

Dans ces conditions, l’apport des prédictions de MegaRide perd sans doute un peu de son attrait. De plus, ce qui est vrai pour les automobiles, F1 ou autres, ne l’est pas pour les motos: pas question de stratégie de course basée sur des données en temps réel obtenus par des capteurs, puisque la télémétrie en interdite en MotoGP.

 

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