pub

Après avoir recueilli le point de vue de David Dumain pour les Grands Prix et Canal+, voici aujourd’hui la situation vue par Éric Célis concernant la diffusion du Championnat du Monde d’endurance sur la Chaîne L’Équipe.

L’organisateur du Championnat François Ribeiro nous a expliqué comment Eurosport Events s’adaptait à la situation actuelle. Eurosport diffuse bien évidemment chaque course du mondial d’endurance, mais l’EWC bénéficie également en France d’une bonne couverture sur la Chaîne L’Équipe, avec aux commentaires Éric Célis assisté souvent de Christian Lavieille et William Costes.

Les concurrents des GP et du WSBK reçoivent un appui financier important de Dorna, résultat d’un partage des droits télé. Ce n’est pas le cas en endurance, et qu’est-ce que cela change pour les concurrents dans la situation actuelle ?

« Il est clair qu’aujourd’hui la situation économique mondiale est dans l’expectative. Alors forcément les budgets qui n’étaient déjà pas simples à trouver en endurance vont devenir encore plus difficiles à obtenir. Autant dire que beaucoup d’équipes vont souffrir, déjà pour finir la saison 2019-2020 et ensuite pour pouvoir trouver des partenaires pour la saison suivante. Je ne parle pas que des teams privés mais aussi des équipes officielles. »

« Il ne faut pas oublier que pendant deux mois aucun importateur n’a pu vendre de motos et il ne me semble pas illogique de penser que certains vont peut être consacrer les budgets compétition à soutenir les réseaux jusqu’à la fin de l’année, voire plus. »

« Quant à la redistribution des droits TV pour les concurrents du Championnat du Monde d’endurance c’est encore un autre problème. Il est bien trop tôt pour penser à cela. Eurosport Events a donné un coup de boost à la discipline, c’est indéniable, mais il ne faut pas aller plus vite que la musique. Avant de penser à la redistribution des droits TV il faudrait peut-être réfléchir à revoir les dotations. Quand on sait qu’un équipage victorieux d’une course de 24 heures reçoit moins de 2 000 euros de prime d’arrivée, on part de loin… »

Quelles vont être d’après toi les conséquences du problème sanitaire actuel sur le Championnat du Monde d’endurance et ses concurrents ?

« Comme je le disais, les effets de cette crise sanitaire vont perdurer à mon sens pendant un bon moment. De fait, financièrement parlant, les plus fragiles ne résisteront pas et je pense même que certains “sponsors” institutionnels vont prendre du recul par rapport à leurs investissements. »

« On peut logiquement s’attendre à une réduction des budgets sponsoring et à une concentration de ces derniers sur la discipline phare de la moto à savoir le Moto GP. Ce n’est pas une bonne nouvelle à mon sens pour l’endurance, ce qui est tout de même paradoxal. En effet, les budgets n’ont rien à voir, comparés à ceux du Moto GP, et je dirais que cette discipline peut pourtant permettre d’obtenir de la visibilité à moindre coût. Mais ça encore faut il que les décideurs l’intègrent. »

« Attention il ne s’agit pas de brader l’endurance, comme on a pu le voir ces derniers temps avec des contrats pilotes qui sont pour moi irrespectueux de leur implication. Je trouve totalement surréaliste par exemple qu’un pilote ne soit pas payé pour un contrat équipementier, quel qu’il soit. Ce sont des pilotes professionnels, il s’agit de leur métier. Donc il serait bon que l’on remette de l’ordre dans tout cela. »

Les 8 Heures de Sepang sont venues s’insérer avec bonheur dans le calendrier aux côtés d’épreuves classiques comme le Bol, les 24 H motos et Suzuka. Par contre les courses d’Öschersleben et de Slovaquie sont passées à la trappe. L’avenir de l’endurance est-il en Asie ?

« Eurosport Events voulait sortir l’endurance de son carcan franco français et c’est une très bonne chose. Donc l’arrivée de courses asiatiques est en ce sens dans la logique des choses. De là à dire que l’avenir de l’endurance est en Asie, je n’en suis pas persuadé. D’autant que la course de Sepang a été présentée comme une course de sélection pour les équipes japonaises en vue des 8 Heures de Suzuka. »

« Maintenant il ne faut pas se mentir, le berceau de l’endurance est en Europe et il est essentiellement constitué d’amateurs. Donc des courses à l’autre bout de la planète impliquent des budgets considérables pour eux, pour ne pas dire insurmontables. »

« Combien d’équipes font le déplacement à Suzuka ? Sans parler du problème des bénévoles que l’ont retrouve dans toutes les équipes, même les officielles, bien sûr. Il faudra donc trouver un équilibre entre les courses “ancestrales” et les nouvelles épreuves. Surtout avec la crise que nous venons de vivre et qui, encore une fois, aura des impacts non négligeables sur les prochaines saisons, selon moi. »

Il y a deux Bol d’Or dans le calendrier 2019-2020. N’est-ce pas favoriser les équipes françaises, et européennes, face aux teams asiatiques ?

« Je ne le pense pas pour la simple et bonne raison qu’il n’y a pas d’équipe 100% asiatique engagée sur la saison. En revanche, et c’est pour moi la solution d’avenir, pour les teams officiels notamment, un montage comme celui du Team FCC Honda France est certainement ce vers quoi il faudra tendre dans le futur. »

« Une base européenne pour les courses sur le vieux continent et une base japonaise pour les courses outremer. Pour la réduction des coûts cela me semble d’une logique évidente. »

Quelles sont pour une chaîne de télévision les difficultés rencontrées pour diffuser les courses d’endurance ?

« Tout dépend de quelle chaîne on parle. Une chaîne spécialisée n’aura pas de contraintes autres que de satisfaire ses téléspectateurs avec un dosage opportun entre vitesse ou endurance et tout terrain. Pour une chaîne sportive mais grand public comme l’est la Chaîne l’Équipe, il faut trouver la meilleure alchimie possible pour satisfaire le plus grand nombre. »

« Ensuite bien sûr il y a le format. On peut comprendre qu’un diffuseur n’ait pas forcément envie de “bloquer” son antenne pendant 8 heures ou même 24 heures sur une seule discipline. Il faut donc savoir faire de la place à chacun, même si ça peut être parfois frustrant de “rendre l’antenne” au moment où la course s’emballe et revenir à un moment où il ne se passe plus rien. Mais bon ça c’est pareil pour tous les sports… »

David Checa, Erwan Nigon et Jérémy Guarnoni, Champions du Monde en titre

Photos © Larivière Organisation, SERT, FCC TSR Honda, VRD Igol Pierret Expériences, Team 33 Accessoires