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Depuis son retour en MotoGP en 2016, Michelin a révolutionné la catégorie en proposant pour les courses des choix de pneus très variés, ce qui n’était pas le cas auparavant. Le temps que les pilotes s’habituent aux Michelin avant et arrière, très différents des Bridgestone précédents, et les records du tour ont commencé à tomber sur presque tous les circuits du Monde, quand la météo le permettait. Nous avons fait le point sur la situation actuelle avec Piero Taramasso, Manager Deux-roues de Michelin Motorsport.

Auparavant en MotoGP avec Bridgestone, comme actuellement avec Dunlop en Moto2 et Moto3, presque tous les pilotes couraient avec le même choix de pneus. Michelin a choisi une option complètement différente en proposant à chaque Grand Prix trois pneus qui souvent peuvent tous gagner*. Pourquoi avez-vous choisi cette complexité ?

*Podium du GP d’Autriche : 1er Lorenzo avec un tendre à l’avant et à l’arrière, 2e Marquez avec un medium à l’avant et un dur à l’arrière, 3e Dovizioso avec medium à l’avant et à l’arrière.

« On a choisi cette option pour donner la possibilité à chaque pilote de trouver le pneumatique qui correspond le mieux à son style de pilotage et à sa machine. C’est évident que le besoin, en terme de pneumatiques d’un Marc Marquez n’est pas le même que celui d’un Andrea Dovizioso ou d’un Johann Zarco. De cette façon, on donne la possibilité à tous les pilotes et à toutes les machines de se battre aux avant-postes. »

Lors de séances d’essai humides toutes la journée, comme le vendredi du dernier GP de l’année à Valence, une moitié des pilotes choisit le pneu pluie tendre avant et l’autre moitié le médium (avec un arrière pluie médium pour tout le monde). Pourquoi ?

« C’est une question de feeling « pilote », le pneumatique avant c’est ce qui donne de la confiance au pilote, pour cette raison les choix peuvent être différents. L’avant pluie soft donne plus de grip sur les angles maxi et un meilleur retour d’informations. L’avant medium pluie en revanche est beaucoup plus stable et donne un meilleur support (convient aux pilotes agressifs, forts freineurs) ».

Marc Marquez a déclaré après le GP de Malaisie « J’ai trop forcé sur mes pneus, donc je les ai fait surchauffer. Quand on surchauffe les pneus, il est si difficile de les ramener à la bonne température, parce qu’on commence à patiner, puis on patine de plus en plus. Alors j’ai ralenti, puis pas à pas j’ai retrouvé mon rythme ». N’est-ce pas une tactique de course foncièrement différente de celles qu’on connaissait avant l’arrivée de Michelin ?

« Cela peut arriver quand la température de la piste est élevée, ou quand le setting moto n’est pas optimal ou le TC* « mal réglé ». Un choix pneumatique risqué (spécification soft) aussi peut amener à une telle situation. »

*TC : Traction Control, ou anti-patinage

Silvano Galbusera, chef d’équipe de Valentino Rossi, déclarait après qu’il ait été en tête à Sepang : « Les pneus plus souples convenaient particulièrement bien à Rossi parce qu’il a pris une nouvelle direction dans le choix des pneus. Nous essayons d’utiliser le pneu le plus souple de l’allocation. Valentino se sent généralement mieux avec un pneu dur parce qu’il lui donne plus de soutien et une meilleure stabilité, alors qu’avec un pneu tendre, il sent un peu de mouvement dans la moto, comme sur une moto de route, donc il ne se sent pas très bien. Mais c’est la seule façon d’être fort. » Quelle est ton point de vue par rapport à ce propos ?

« Je suis pleinement d’accord, la spécification souple (soft) est celle qui normalement a un plus haut potentiel (plus de grip) et si on arrive à la faire fonctionner on aura de meilleurs résultats, mais la moto doit être parfaitement réglée. C’est aussi vrai que Vale aime une moto stable et bien calée, chose qui joue en faveur de spécifications medium et/ou hard. »

Avec le nombre de Grands Prix qui augmente en Asie, ne serait-il pas judicieux pour Michelin d’installer sur place un dispositif de fabrication C3M pour y réaliser les pneus de MotoGP directement et économiser sur le transport (en temps et en frais) ?

« …..Mon cher Philippe, tu dois bien savoir que la stratégie industrielle est « confidentielle » Ahhhh

Ça n’empêche pas d’essayer, mon cher Piero, hé hé…

Avant la course, quel est le groupe de personnes qui décide du choix des pneus ? Qui prend la décision finale ?

« Cela est un choix « commun/partagé » entre l’équipe terrain (techniciens qui travaillent dans les box, en contact permanent avec les pilotes) et l’équipe de développement (ingénieurs qui font la conception des pneumatiques et qui suivent leur fabrications). »

Tu as déclaré : « Il serait facile pour nous de fabriquer des pneus plus durs pour permettre aux pilotes d’attaquer du début à la fin, mais vous verriez des courses ennuyeuses. Avant, vous voyiez toujours les mêmes pilotes qui attaquaient plus fort dans les premiers tours, puis s’éloignaient des autres. Ce que nous faisons maintenant est de donner plus de possibilités à plus de pilotes, donc la course est plus serrée ». Ça, c’était l’intention. Ce but est-il réalisé ?

« Oui, l’objectif est atteint. Depuis le retour de Michelin on a vu des courses spectaculaires (Celle de Phillip Island en 2017 ayant été la meilleure à mon avis) avec beaucoup de dépassements. On a vu 9 vainqueurs différents en 2016. 5 en 2017 avec un championnat qui s’est joué à la dernière course de Valence et souvent plusieurs/différentes marques de motos sur le podium. »

Photos © Michelin