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Johann Zarco MotoGP

Ça y est ! Johann Zarco est un vainqueur en MotoGP, après sept ans en catégorie reine. À Phillip Island, son vœu s’est exaucé, au terme d’une course rondement menée. Maintenant que tout, ou presque, a été dit au sujet de son bonheur, essayons d’aller plus loin dans l’analyse. Car j’ai des choses à dire sur ce succès, qui, selon moi, est à relativiser. Je m’explique.

Johann Zarco et la victoire inattendue en MotoGP

 

Premièrement, je dois dire que j’ai été particulièrement surpris de le voir franchir la ligne en première position, et ce, sur deux plans bien distincts. Le premier, c’est celui qui concerne la forme récente de Johann Zarco. On le sait ; sur les deuxièmes parties de saison, il a tendance à peiner, comme l’illustre sa terrible fin d’exercice 2022. En réalité, tout, ou presque, jouait contre lui et c’est en cela que c’est déconcertant. En plus de ce facteur récurrent, il fut le « dindon de la farce » au Japon, après sa non-classification, puis, pénalisé par un problème mécanique en Indonésie. Il a signé chez Honda il y a peu, ce qui enlève cette part de faim qu’ont les pilotes avec un guidon à chercher (Fabio Di Giannantonio, pour le citer), et globalement, il n’existe plus face à son coéquipier Jorge Martín, qui joue le titre mondial à moto égale.

 

Johann Zarco MotoGP

Un nouveau vainqueur français en catégorie reine. Photo : Michelin Motorsport

 

Le deuxième plan de surprise est lié au déroulé du Grand Prix. Parti cinquième, il fallut attendre les trois derniers tours pour apercevoir une réelle opportunité. Avant cela, il était encore difficile d’imaginer Johann Zarco gagner cette course au vu de la forme de son partenaire de box. Car oui, je pense que le « Martinator » était le plus fort ce samedi, contrairement à ce que l’on pourrait penser. Cela n’enlève rien à l’effort de Johann Zarco ; heureusement, le plus fort ne gagne pas toujours. Mais l’imprévisibilité, voire l’illisibilité intrinsèque au Grand Prix d’Australie a joué en sa faveur. Il n’y a pas un seul autre circuit au monde sur lequel le choix des pneus a une si grande influence, et l’on se rappelle qu’en 2013, la direction de course avait imposé aux pilotes de changer de machine en plein milieu de l’épreuve car les gommes ne pouvaient pas tenir la distance.

Pour toutes ces raisons, le backflip du Français était inattendu, et, plus largement, contre le déroulé de la course. Cela enlève-t-il la beauté de sa victoire ? Certainement pas. En revanche, débloque-t-elle sa situation pour autant ? Je ne pense pas non plus.

Est-ce le début de quelque chose ?

 

Longtemps, on associait Johann Zarco et son absence de victoire à un blocage. Par ailleurs, lui-même a déjà évoqué cette idée par le passé. Maintenant, peut-on parler de renouveau à venir ? Selon moi, son succès, aussi grand soit-il, est à relativiser, et ce, pour son bien. Les médias sportifs français ont tendance à largement s’enflammer concernant les pilotes de l’hexagone ; l’exemple de Fabio Quartararo à son arrivée en mondial lors de la saison 2014 est criant.

 

 

Je pense qu’il ne faut pas nécessairement en attendre d’autres parce qu’il y a eu celle-ci. Pour plusieurs raisons, à commencer par la place qu’il occupe sur la grille. De fait, il monte l’une des meilleures motos de l’histoire des Grands Prix, et sans aucun doute la plus aiguisée actuellement. Avec, Jorge Martín fut capable de prouesses. Johann Zarco a sous-performé cette saison, c’est la simple réalité ; c’est exactement pour ceci qu’il faut éviter de voir cette course trop belle.

Je vois, ici et là, beaucoup de contre-arguments. On peut lire que la comparaison ne tient pas avec le « Martinator » en raison de son âge, mais pourtant, Zarco n’est pas si vieux ; il évolue juste dans une ère très jeune. Cela ne veut pas dire qu’il est moins en forme. Trente-trois ans n’est pas un âge avancé en sport de haut niveau, et les études, comme les exemples, le montrent : c’est souvent dans cette période que les sportifs réussissent le mieux, accomplissent le plus de choses. On sait également qu’il est l’un des plus physiquement affûtés de la grille, donc cet argument ne tient pas réellement.

 

Johann Zarco MotoGP

À la bataille avec un Bagnaia conservateur, ou plutôt, malin. Photo : Michelin Motorsport

 

Ensuite, on a longtemps évoqué ce « blocage psychologique » mais les faits montrent le contraire. À quel moment, exactement, un tel désavantage l’a empêché de gagner ? Je n’ai que Silverstone 2022 en tête, avec une chute en tête après s’être élancé de la pole. Dans ce cas, tous les plus grands ont eu des craquages. C’est difficile de rejeter la faute sur un paramètre aussi difficile à définir, sur lequel même les plus grands spécialistes sont en désaccord sur le sujet. Peut-on mettre « faiblesse psychologique/peur de la victoire » et « double champion du monde Moto2 » dans la même phrase ? Je ne pense pas. Oui, il a eu quelques difficultés sur les départs pendant un temps, mais ça ne l’a pas empêché d’être dans le rythme des meilleurs à de nombreuses reprises.

Toujours selon moi, la réalité est tout autre ; il n’est pas exactement au niveau des meilleurs de la catégorie, et il n’y a rien de mal à ça. C’est un très bon pilote, excellent même, mais les Pecco Bagnaia, Jorge Martín, Marco Bezzecchi et consort sont au-dessus. Par extension, je ne pense pas que cette première victoire « débloque » quoi que ce soit. Je ne vois pas pourquoi il deviendrait meilleur pilote maintenant qu’il a gagné dans des conditions particulières, on le rappelle. Je n’ai pas le souvenir d’un pilote devant à 3,5 secondes qui s’écroule de cette façon, hors chute, bien sûr.

 

Conclusion

 

Cette première victoire au bout de 120 Grands Prix est un accomplissement incroyable, une véritable preuve de persévérance et d’un grand esprit de compétition. Pour autant, et dans son intérêt, je pense que la performance en elle-même ne permet pas de s’enflammer et d’imaginer une mue.

Qu’en pensez-vous ? Dites-le nous en commentaires !

 

Colin Edwards reprend sa place de « loser magnifique » dans les livres d’histoire. Photo : Michelin Motorsport

 

Photo de couverture : Michelin Motorsport

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