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Pat Hennen. Un patronyme qui ne vous dit sûrement rien, et c’est bien normal. De nos jours oublié, l’américain marqua le championnat du monde 500cc des années 1970. Une époque glorifiée, considérée comme l’âge d’or du « Continental Circus ». Pourtant, l’histoire de Pat affirme tout le contraire. Talentueux et précurseur, tout porte à croire qu’il deviendra l’étendard de tout un pays. Retour sur une histoire poignante.

La triste épopée débute au pays de l’oncle Sam. Né en Arizona, la terre est d’abord son terrain de prédilection. Au début des années 1970, âgé de dix-sept ans, il crève déjà l’écran.

La possibilité de changer pour l’asphalte ne tarde pas à se présenter. En 1974, il rejoint le championnat AMA persuadé que son expérience sur terre l’aidera à atteindre les sommets. Il ne s’y trompe pas. Le monde de la moto aux États-Unis prend conscience du potentiel du jeune homme.

Si la nation domina une partie de l’histoire des Grands Prix, cela mit relativement longtemps a démarrer. À l’époque de notre récit, seuls quelques élus parvinrent à se hisser sur un podium en mondial. Justement : Ronald Grant, l’un de ces précurseurs, vient en aide au jeune Pat.

Hennen se rapproche petit à petit d’un guidon officiel en championnat du monde. Durant le Daytona 200 1976, il impressionne le paddock en tenant têtes aux plus grands cadors. C’est durant cette année qu’il explosa aux yeux du grand public. Suzuki, qui suivait le prodige depuis un moment, l’engagea aux côtés de Barry Sheene et Teuvo Länsivuori.

Selon beaucoup d’observateurs, Hennen était l’un des plus talentueux de sa génération.

Une véritable dream team. Monté sur le podium à Assen, son premier succès ne tarde pas. En Finlande, Pat entre définitivement dans les livres d’histoire. Avant les Kenny Roberts, Eddie Lawson et autres Kevin Schwantz, il devient le premier américain vainqueur d’un Grand Prix en mondial, catégorie 500cc s’il vous plaît.

1977 est abordée de la plus sereine des manières. Mais en interne, les choses ne se passent pas comme prévu. Barry Sheene, star de l’équipe, ne voit pas d’un bon œil les résultats probants de l’américain. Pour rappel, Suzuki Grande-Bretagne joue un grand rôle au sein du département compétition.

Hennen savait qu’il disposait du meilleur matériel, mais pas pour combien de temps. Auteur d’une nouvelle victoire en Angleterre et de quatre autres podiums, il échoue à nouveau en troisième place du championnat. Un beau résultat, discret en comparaison de celui de Sheene, titré pour la deuxième année consécutive.

Cependant, le vent tourne en 1978. Cerise sur le gâteau : Un autre américain, Kenny Roberts, fait son apparition. La pression double sur les épaules de Hennen, qui ne fait que progresser. Il est le seul à pouvoir contenir le rookie en début de saison. Seulement trois points les séparent avant le Grand Prix des Pays-Bas, manche ô combien importante.

Pourtant, Pat ne s’y rendra pas. Ni aux autres d’ailleurs. Suzuki avait besoin d’être représenté en Grande-Bretagne, si possible au Tourist Trophy. Maurice Knight, responsable de Suzuki G-B, n’arrivait pas à convaincre Barry Sheene de prendre le départ. « Bazza » refusait catégoriquement pour d’évidentes raisons de sécurité.

Hennen avait pourtant signé une clause dans son contrat en début de saison, stipulant qu’il ne prendrait pas le départ de la mythique épreuve. Un peu avant noël, Knight passe un coup de téléphone à l’américain. Le manager avait promis du matériel supplémentaire, mais celui-ci ne pourrait arriver en temps et en heures… A moins que Pat décide de changer son avis sur le Tourist Trophy. Ainsi, il bénéficierait d’une prime et pourrait s’acheter ce qu’il désirait.

La mythique RG500, machine de Pat Hennen et Barry Sheene (entre autres) à la fin des années 1970. Photo : Rikita


Du chantage, purement et simplement. Hennen, fortement influencé, participa ainsi au TT. Alors qu’il mène l’épreuve, il réalise le premier tour sous les vingt minutes de l’histoire. À Bishopscourt, il croque un trottoir à 257 km/h. En résulte un accident effroyable dont il sortira vivant, c’est le principal.

Vivant oui, mais dans un sale état. L’infortuné subit des dommages au cerveau ainsi que de multiples blessures. Les médecins sont formels : Il doit arrêter sa carrière. Plus jamais Hennen ne pilota au plus haut niveau, lui qui était promis à un avenir brillant.

Kenny Roberts s’en alla remporter son premier titre devant Barry Sheene. Ce dernier n’est pas tout blanc dans l’histoire, mais l’affaire sera contée dans un prochain épisode. La retraite anticipée de son ex-coéquipier sacrifié n’avait pas l’air de tant le toucher pour rester poli. L’histoire retiendra ce pilote magnifique, qui ouvrit la voie des américains en Grand Prix. Même pas amer, Pat Hennen reconnaît aujourd’hui que rien n’est à changer dans son parcours. La grande classe.