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Il n’est pas besoin d’être fin analyste pour pouvoir énoncer et écrire que Jorge Lorenzo a dominé ces premiers essais 2016 à Sepang.
En clôturant ces trois journées avec une avance d’une demi-seconde sur un étonnant Danilo Petrucci, mais surtout une seconde sur son coéquipier et deux dixièmes de plus sur la première Honda, le Champion du Monde en titre se présente clairement comme l’homme à battre en ce début de saison.
 

Cependant, à la fois parce que rien n’est acquis et pour mieux comprendre les raisons de cette domination, il est loin d’être inutile de faire un petit retour en arrière sur ces trois journées.Lundi, Jour 1: En fait, le Jour 1 n’en était pas un pour tout le monde et ce fait se révèlera très important dans le déroulement de ces tests. En effet, depuis le samedi, la piste était occupée par les teams test de Ducati avec Michele Pirro et Casey Stoner, mais aussi de Yamaha avec Katsuyuki Nakasuga et de Honda avec Hiroshi Aoyama. Cela a permis à ces trois usines de découvrir le problème posé par le nouveau pneu avant Michelin qui, en se rapprochant considérablement de son homologue japonais, a à la fois perturbé la stratégie mise en place par les teams officiels, et profité à certains teams privés dont les machines n’avaient guère évolué depuis l’année dernière. Bref, c’était un peu le monde à l’envers lors de cette rentrée des classes et chaque équipe a un peu « bricolé » durant cette première journée…

Jorge Lorenzo, 1er / 2.00.684s / 37 tours : « Je suis très heureux et surpris par le feeling que j’ai eu aujourd’hui avec les pneus Michelin. Les temps au tour étaient relativement faciles à atteindre et, à chaque fois que nous sommes sortis la voie des stands, nous avons amélioré quelque chose sur la moto pour mieux comprendre l’électronique, et elle s’est très bien adaptée aux pneus Michelin. Je suis très heureux de ce changement, parce que Sepang a toujours été difficile pour moi. Aujourd’hui, je n’ai dormi que deux heures à cause du décalage horaire et un mal de gorge m’a contraint à prendre des antibiotiques. Ma condition physique n’est donc pas parfaite, mais j’ai pu tout à fait piloter durant des runs de deux ou trois tours,. Si j’avais été en meilleure forme, j’aurais pu faire de plus longues périodes. »

Valentino Rossi, 2e / 2.01.717s / 55 tours : « L’écart avec Lorenzo est trop grand, mais il est également vrai qu’il était plus fort que tout le monde, donc il a été en mesure d’avoir un meilleur rythme. D’un autre côté, ma position est pas si mauvaise et nous avons beaucoup travaillé sur la moto . Il s’agit juste du premier jour et le bilan se fera à la fin de la troisième, mais nous avons beaucoup de choses à faire. Je suis très heureux parce que l’électronique fonctionne déjà très bien. Nous ne sommes pas au même niveau que l’année dernière, mais c’est déjà suffisant pour piloter la moto et, surtout, le pneu avant Michelin s’est beaucoup amélioré, de sorte que le feeling se rapproche plus de celui de l’année dernière quand vous montez sur la moto. Ce sont deux points importants. Nous avons eu trois motos, mais l’une d’entre elles était juste destinée à faire quelques tours, il s’agissait de l’ancienne. Nous avons deux motos 2016 et j’ai fait mon meilleur temps sur la moto qui est plus semblable au modèle 2015. C’est donc un peu du pas-à-pas, mais c’est simplement parce que je n’ai pas eu assez de temps pour travailler sur la 2016. J’ai fait seulement un run avec elle et ce n’était pas si mal, nous continuerons demain et verrons bien. Notre premier travail pour ce test est de décider laquelle utiliser, donc nous allons essayer d’obtenir une meilleure compréhension demain ».

Il est significatif de constater que la première phrase du communiqué de Valentino Rossi fait référence à son coéquipier, mais, à ce point du débriefing, essayons de clarifier quel matériel Yamaha avait mis à la disposition de ses pilotes, même si la situation est encore très complexe du fait d’une multitude de nouvelles pièces à essayer faisant l’aller-retour entre les diverses machines…

Jorge Lorenzo et Valentino Rossi avaient trois motos dans leur box; une 2015 que tout le monde connaît, 2016 caractérisé par son démarrage sur l’arbre d’équilibrage qui permet d’éviter le retrait des couvertures chauffantes, avec le remplissage du réservoir dans la selle ou non, les pièces étant interchangeables, et ce que Valentino Rossi appelle la vraie 2016, c’est à dire une moto dont le châssis a été construit en fonction du pneu avant Michelin qui demandait plus de charge. Les pilotes officiels ont utilisé très majoritairement la 2016 « proche de la 2015 », sans réservoir arrière.

Sur le circuit, il y avait aussi une Yamaha M1 bien plus futuriste, avec son habillage carbone, une selle plus relevée et plus fine, un amortisseur profilé et une aérodynamique très travaillée par des flancs volumineux et toute une série d’ailerons aux profils différents. Mais elle était aux mains du team de test et nous n’avons aucune information comme quoi Jorge Lorenzo ou Valentino Rossi l’aurait essayée à un moment quelconque…

 

 

L’analyse des chronos (débarrassés des tours insignifiants) est tout à fait en accord avec les déclarations des pilotes; comme à son habitude, Valentino Rossi travaille méthodiquement et progresse en fin de séance, tandis que Jorge Lorenzo, du fait de sa condition physique, se cantonne dans des runs très courts… mais très rapides.

Jour 2 : La journée doit être scindée en deux parties puisque l’éclatement du pneu arrière de Loris Baz, dû à une pression trop faible, a entraîné le retraits des pneus tendres l’après-midi. Le pilote majorquin ayant réalisé son chrono en fin de journée, cela explique qu’il ait dû se contenter de la seconde position finale, derrière un Danilo Petrucci qui avait réalisé comme beaucoup son chrono le matin, quand la piste était rapide, et avec des pneus tendres.

Jorge Lorenzo, 2e / 2.00.155 / 32 tours : « Aujourd’hui, après l’accident de Baz, nous ne pouvions plus utiliser le pneu arrière tendre, donc j’ai dû adapter mon pilotage. Cela a été un peu difficile, mais nous avons continué à avoir un bon feeling à part lors de la chute que j’ai subie avec le pneu avant dur sur la piste chaude, ce qui semble être un peu moins bien pour moi. Avant l’après-midi (ndlr: le communiqué » comporte une erreur à ce point), lorsque nous avions mis le pneu tendre, j’avais retrouvé à nouveau le feeling que j’avais hier et j’ai été en mesure de rester le pilote le plus rapide en piste. Même avec le pneu dur, nous avons pu amélioré mon temps d’hier d’une demi-seconde, et cela est un bon point. Nous avons encore une grande marge sur le reste, ce qui est très encourageant « .

Valentino Rossi, 6e / 2.01.021 / 54 tours : « Je suis très heureux, ce fut une bonne journée. Au début, c’était difficile, car il y avait beaucoup de travail à faire, mais je suis tout à fait satisfait, surtout parce que nous avons beaucoup amélioré les réglages de la moto. Mon rythme et mon meilleur tour se sont très sensiblement améliorés, de sorte que pour cette raison cela a été une bonne journée. Nous avons beaucoup de nouvelles données importantes qui nous aideront à définir la voie que nous allons suivre. il est sûr que nous aurons beaucoup de choses à faire. J’ai essayé quelques pneus durant l’après-midi; certains étaient bons, certaines choses étaient mauvaises, mais je pense que Michelin a également fait un bon travail. En ce moment, j’utilise plus sur la moto qui est plus proche du modèle 2015. Demain, nous allons essayer les deux une nouvelle fois, et peut-être que nous allons également essayer l’autre moto sur une autre piste, comme à Phillip Island, et que nous allons décider après. »

L’analyse de la séance montre une fois de plus un Jorge Lorenzo qui tourne peu mais est tout de suite rapide et un Valentino Rossi plus laborieux qui a pris ses marques (tout comme Marc Marquez). Du fait du passage au pneu arrière dur après les premiers tours, symbolisé par les croix rouges, les progressions au fur et à mesure de la séance présentent logiquement une progression différente de la veille. Toutefois, on constate que les Yamaha se sont immédiatement adaptées à ce pneu dur, à l’inverse de Marc Marquez.

Jour 3 : Le dernier jour des premiers tests MotoGP de l’année 2016 a commencé lentement pour Jorge Lorenzo et Valentino Rossi, contraints d’attendre que la piste ne sèche le matin. Lorsque Lorenzo a quitté son stand, il a immédiatement pris le commandement avec un 2’00.882s. Après que son coéquipier ne se soit brièvement emparé de la tête, le pilote majorquin a repris la tête du classement avec un chrono de 2’00.016s, juste avant que l’eau ne recouvre à nouveau le circuit malaisien.

En fin de journée, avec seulement une heure à sa disposition, le champion du monde en titre a fait voler en éclat la barre des deux minutes avec un chrono de 1.59.580s, reléguant le reste du plateau à 0.976s. Valentino Rossi a peut-être été le dernier des pilotes MotoGP à rentrer en piste lors de cette dernière journée, mais cela ne faisait aucun doute qu’il était tout aussi désireux de prouver sa vitesse que son coéquipier. Après avoir réalisé un premier run rapide qui l’a porté au 4ème rang, le nonuple champion du monde s’est montré le plus rapide en milieu de journée avec un temps de 2’00.556s, avant de prendre une courte pause quand il a commencé à pleuvoir. Ressorti à 40 minutes du drapeau à damier, Valentino Rossi n’a pas pu suivre le rythme de son coéquipier.

Jorge Lorenzo, 1er / 1.59.580 / 105 tours / 1er au combiné : « Les temps au tour parlent d’eux-mêmes, c’étaient de très bons chronos établis avec de nouveaux produits électroniques et un pneu arrière dur, parce que nous ne pouvons pas utiliser l’arrière tendre à cause de ce qui est arrivé hier. Je suis très satisfait des Michelin, parce qu’ils ont fait un très grand pas concernant le retour d’information des nouveaux pneus avant. Ils ont fait un excellent travail, parce que maintenant le feeling est plus proche de ce que nous avions l’année dernière. Quoi qu’il en soit, je me suis senti très à l’aise et rapide au cours de ces trois jours, je suis toujours en convalescence de cette maladie que j’ai et, pour sûr, nous serons plus forts à Phillip Island et en mesure de faire une simulation de course « .

Valentino Rossi, 2e / 2.00.556 / 147 tours / 4e au combiné : « Je suis heureux à propos du test et d’aujourd’hui parce que, tout d’abord, nous avons fait un bon travail et nous avons essayé beaucoup de choses différentes qui ont donné de bonnes informations sur la façon d’améliorer la moto. J’ai également réalisé un 2’00.5s. Je pense que nous pouvons nous appuyer dessus et faire mieux, mais je suis à la deuxième place de telle sorte que ce n’est pas si mal, c’était un bon test. Nous devons encore beaucoup travailler car le point d’interrogation qui demeure est de savoir si nous allons utiliser la moto proche de la 2015 ou le modèle 2016. Nous allons les essayer à nouveau à Phillip Island, parce que la nouvelle n’était pas si mal à la fin. Je pense que tous les ingénieurs ont fait un bon travail avec l’électronique et Michelin a fait un bon travail avec les pneus avant. Nous avons essayé d’autres pneus qui ont également amélioré davantage, donc je suis satisfait de ce premier test. J’ai essayé les winglets, ils sont très intéressants, ils changent le flux d’air, mais je ne me sens pas de différence. Je préfère la moto sans les ailerons, c’est plus beau! « 

Une séance très progressive pour Jorge Lorenzo, plus erratique pour Valentino Rossi.

Pour rappel, Jorge Lorenzo s’était qualifié en 1.59.737 il y a quelques mois (1.59.544 en FP3), tandis que le record du circuit appartient à Marc Marquez, en 1.58.867, depuis les tests 2015. Ce seront volontairement les seules références au passé et comparaisons que nous ferons, puisque le circuit sera entièrement re-surfacé dès les jours qui viennent, rendant hasardeuse toute tentative d’anticipation supplémentaire pour le prochain Grand Prix.

Cependant, une approche plus précise semble judicieuse, car en recueillant les retours de personnes sur place, il semble que pour rendre un tant soit peu signifiant les chronos effectués, il convienne de se focaliser uniquement sur ceux réalisés en pneus durs, à partir de l’accident de Loris Baz. En effet, tout le monde a plus ou moins « bricolé » durant la première journée, pour mettre les choses en place et s’adapter aux pneus et à l’électronique, puis tout le monde a utilisé le pneu arrière tendre la matinée du second jour.

Conformément à cette démarche, on obtient donc une hiérarchie finale légèrement différente des classements officiels avec en particulier la disparition des Ducati de Danilo Petrucci et d’Hector barbera du Top5.

Notre classement éclaire donc encore davantage la domination des Yamaha avec 3 motos dans les 7 premières, un résultat qui aurait pu être encore amélioré si Bradley Smith n’avait pas été le seul pilote de la firme d’Iwata a faire une simulation de course le dernier jour.

L’optimisme semble donc de mise chez Yamaha en général et encore plus présent chez Jorge Lorenzo en particulier, suite à la seconde qu’il a pu mettre entre lui et ses plus proches poursuivants.

e fait est extrêmement rare et demande donc une explication…

Fin 2015, tous les teams, Yamaha compris, avaient quitté les essais de Valence (ou Jerez pour certains) avec une petite inquiétude concernant le pneu avant Michelin et la nouvelle électronique.

Durant l’hiver, tout le monde avait donc préparé et construit des motos spécialement adaptées à ce pneu, c’est à dire, comme nous vous en avions fait part, avec une augmentation du transfert de charge sur l’avant. Concernant l’électronique, sa mise au point semblait d’autant plus un travail gigantesque que les pneus, donc les motos, réagissaient différemment de celles équipées en Bridgestone.

Chaque équipe est donc arrivée à Sepang en pensant continuer dans ce sens après la trêve hivernale. Seulement, pendant l’hiver, Bibendum a beaucoup travaillé, et bien travaillé, à tel point que même Valentino Rossi, pourtant ambassadeur Bridgestone, n’a pas hésité à louer les progrès du manufacturier français. En résumé, Michelin a produit un pneu qui fonctionne quasiment comme le Bridgestone, permettant de forcer en confiance dans les entrées de virage. Un bel exemple du savoir-faire clermontois mais, du coup, tout le monde a été pris à contre-pied et même rendu un peu obsolète non seulement les réglages mécaniques, mais également les cartographies électroniques, voire même les motos 2016, cela expliquant pourquoi les pilotes Yamaha se sont essentiellement concentrés sur les motos « 2016 proches de 2015 » et non pas sur les « vraies » 2016 qui seront toutefois à nouveau testées à Phillip Island.

Dans ces conditions, quand l’électronique n’est pas encore parfaitement réglée, le style incroyablement pur et fluide de Jorge Lorenzo fait une grande différence, d’où la seconde avec le reste du plateau.

Le corollaire étant bien sûr que cet écart se réduira au fur et à mesure de la mise au point des motos 2016, qui seront sans doute finalement plus des évolutions des 2015 que de toutes nouvelles motos.

Et, paradoxalement, avec les progrès du pneu avant Michelin, faisons le pari que les complaintes concernant le pneu arrière, pourtant unanimement applaudi dès son introduction, ne sauraient tarder; ainsi sont les pilotes! Manufacturier pneumatique est souvent un métier ingrat…

Article à suivre très prochainement avec les débriefings Honda et Ducati…

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