Parlons MotoGP : Voici pourquoi Pedro Acosta est déjà un monstre

Le requin Pedro Acosta, monstre des profondeurs, vient de mordre pour la première fois. À l’occasion de sa première sortie en MotoGP, le double champion du monde Moto3/Moto2 2021 et 2023 vient de s’affirmer comme le meilleur potentiel depuis Marc Marquez. Dès les essais, il a montré à tous les pilotes qu’ils avaient du soucis à se faire, et cela n’a fait que se confirmer lors de la course dominicale. Analyse d’un week-end pas comme les autres.

 

À l’aise

 

J’ai essayé, sur ces derniers jours, de compiler ce qui rendait Pedro Acosta si spécial. J’avais évoqué sa précocité dans un article en deux volets le comparant directement à Marc Marquez ; je vous invite à le retrouver en cliquant ici. Mais il ne s’agit pas de cela aujourd’hui. Désormais, le conditionnel n’est plus obligatoire.

Premièrement, son aisance sur la machine est tout à fait déconcertante. Lors des essais, il nous a gratifié de deux sauvetages qui montrent à quel point il fait corps avec sa GasGas RC16, et ce en tellement peu de temps. Il semblerait que la KTM ne soit pas la plus difficile à appréhender, car Brad Binder, Jack Miller et même, dans une moindre mesure, Augusto Fernandez, ont réussi à rapidement trouver du rythme à son guidon. Dans le cas des sauvetages, cela montre à quel point il essaye de trouver la limite, mais aussi, qu’il peut la dépasser. C’est de très bon augure.

 

 

Deuxièmement, lors du Grand Prix. Je ne reviendrai pas trop sur son Sprint, car je l’ai trouvé très bon, bien sûr, compte tenu de son âge, mais pas aussi explosif que le dimanche malgré une 8e place synonyme de meilleur résultat. Le lendemain, donc, il a forcé volontairement sur ses pneus en sachant qu’ils allaient se détruire pour jouer devant. Ceci explique tout à fait sa descente dans le classement à mesure que les boucles s’égrenaient.

 

 

Mais sur ces 15 tours dans le bon groupe, il nous a proposé du très grand pilotage. À le regarder, il n’y a aucun moyen de le différencier d’un vétéran. Je ne vous cache pas que lorsqu’il s’est rapproché de Marc Marquez, mon sang est entré en ébullition. L’idée d’une bataille presque poétique entre deux génies m’enchantait au plus haut point. Bon, d’accord, elle n’a pas vraiment eu lieu car Acosta s’est raté et dut prendre large après l’avoir dépassé. Mais dans son approche, son freinage, sa vista et sa sélection de trajectoires – notamment en sortie du virage n°9 pour ne pas détruire la gomme arrière, il est était à sa place, cela ne fait aucun doute.

Ce point en rejoint un autre, qui concerne l’aisance dans le paddock. Depuis 2023, il parle comme quelqu’un qui a de la bouteille, avec une maturité, selon-moi, bien supérieure à des pilotes présents depuis plusieurs années en catégorie reine ! En conférence de presse, il est plus qu’à son aise, il est programmé, paramétré pour devenir une légende de ce sport. C’est très fort, et c’est beaucoup plus impressionnant, à mon sens, que sa 9e place.

 

Victime collatérale

 

Je crois qu’Augusto Fernandez n’a jamais été aussi tranquille depuis son arrivée en MotoGP. Rarement avais-je vu un pilote autant éclipsé par son coéquipier au cours d’un week-end. Et oui, je me rappelle de la saison 2017 de Sam Lowes chez Aprilia. Le problème, c’est que cela semble parti pour durer.

 

 

Même si Augusto a terminé 4e du Grand Prix de France 2023 au terme d’une prestation remarquable et remarquée, cette seule course dominicale de Pedro Acosta suffit à faire oublier la simple existence d’un autre pilote chez GasGas Tech3. C’est triste, mais c’est aussi le jeu. Augusto doit faire mieux s’il veut subsister au plus haut niveau, en particulier si la KTM continue de progresser comme c’est le cas. À la régulière, et encore, au vu de la stratégie auto-destructrice d’Acosta, Fernandez prend 13 secondes pleines à l’arrivée alors qu’il s’agissait de son 41e départ en MotoGP. Sur un tour, l’écart était de plus d’une seconde. Augusto Fernandez pourrait bien être la première victime du requin.

 

 

Un record qui va tenir ?

 

Vient la question de la plus jeune victoire en catégorie reine. Marc Marquez en est actuellement détenteur, suite à un succès lors du Grand Prix des Amériques 2013, acquis à l’âge de 20 ans et 63 jours. Pedro Acosta, 19 ans, a jusqu’au Grand Prix d’Allemagne (dans neuf courses) pour le battre. La question est limpide : peut-il le faire ?

Je pense que non. Aussi belle fut-elle, sa prestation n’était pas réaliste car la dégradation des pneus est un facteur absolument déterminant au Qatar. Tous les pilotes le savaient, lui y compris. Acosta fut le seul à délibérément cramer sa gomme pour en apprendre le plus possible. Sans cela, il aurait sans doute gravité autour de la 10e place selon ses propres dires. Je pense qu’il se rapproche inlassablement du podium, mais d’ici à gagner, il doit s’accrocher.

 

 

Binder l’avait fait dans son année rookie à Brno, mais lors de la saison 2020. L’opposition n’était pas la même. Ici, Pedro doit se défaire d’un Pecco Bagnaia taille patron, d’un Jorge Martin véloce, d’un Binder sérieux, d’un Marquez revanchard et d’un Aleix Espargaro, mine de rien, toujours dans le coup. Ça fait beaucoup, surtout si l’on ajoute à l’équation les tracés sur lesquels il n’a pas testé, le package, moins bon que la Ducati, et le peu de temps qui lui reste. S’il y a des chutes, un grand fait de course ou des conditions particulières, c’est possible ; mais à la « régulière », cela me paraît plus tendu.

Marquez, en 2013, jouissait d’un contexte beaucoup plus favorable en tant qu’officiel Honda. Je pense que ce record appartient au passé, mais comme tous les amoureux des Grands Prix, j’espère sincèrement me tromper. Ce n’est ici qu’un pronostic qui ne reflète que mon avis, rien de plus.

Votre avis m’intéresse grandement. Qu’avez-vous pensé de ce premier week-end de course pour Pedro Acosta ? Dites-le moi en commentaires !

Photo de couverture : Photo : GasGas Tech3