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Aujourd’hui, on ne va vous parler ni de Sébastien Gimbert, ni de sa longue et fructueuse carrière, mais de son actualité, qui se concentre actuellement principalement sur celle de son fils Johan, champion de France Supersport 2023.

En effet, à ce point stratégique d’un parcours que l’on souhaite long à ce dernier, père et fils ont décidé de viser le plus haut niveau, c’est à dire les Grands Prix Moto2, délaissant ainsi la voie naturelle se dirigeant vers le Supersport mondial. Pourquoi ? Comment ? Avec quels risques ? On voulait tout savoir


Sébastien, bonjour. On va parler de ton fiston qui est champion de France Supersport : peux-tu commencer en retraçant son parcours pour le grand public qui ne s’intéresse qu’aux Grands Prix ?
Sébastien Gimbert : “Alors Johan a commencé la moto très très tard. Pourquoi ? Parce que moi, j’ai vraiment tout fait pour ne pas qu’il en fasse, parce que contrairement aux autres parents, après avoir passé mes 25 ans de carrière dans un Paddock, j’aurais souhaité pouvoir revenir sur un paddock plus pour voir les  copains avec un air de vacances. Là, en fait, je me retrouve aujourd’hui condamné et coincé à continuer à être impliqué dans les paddocks. Non, trêve de plaisanterie, en fait Johan nous a bien eus avec sa mère puisqu’il en a fait de la moto très jeune, comme ça, vite fait, parce qu’il avait des PW. C’était pour jouer mais à aucun moment on ne s’est dit qu’on allait le mettre à la compétition. Mais lui avait la passion, et comme il faisait un travail moyen à l’école, on lui a mis un peu une carotte en lui disant ”écoute, si tu travailles, si tu as des bonnes notes à l’école, on te paiera une course de moto”. Et on s’est fait avoir parce qu’en fait il était capable de bien travailler à l’école. On s’est donc retrouvé un peu coincé et il est allé à une petite course de motos en Espagne, une Copa où tout le monde avait la même moto. Johan arrive donc à la dernière course de l’année, et roule super bien, il est limite en train de faire podium. Moi, je ne pouvais pas être là car j’étais à Suzuka, et c’est Adrien Morillas qui s’en occupait. Adrien m’appelle et me dit “écoute, si tu ne veux pas t’en occuper, moi je m’en occupe”. Donc il m’a ouvert un petit peu les yeux sur le potentiel de Johan. C’était parti, l’année suivante il a fait la saison complète 300 Copa. Il a bien performé, il ne gagne pas le championnat mais il fait 2e. Ensuite, le team Palmeto, un bon team basé près de Madrid, m’a proposé de le mettre en Championnat d’Espagne 300 Supersport. Ca s’est très bien passé, même si tout le monde ne parlait qu’espagnol et son chef mécanicien ne parlait qu’Anglais. Johan a donc appris à parler anglais et espagnol, et aujourd’hui il parle très bien ces langues là. Sur la moto, il a évolué au fur à mesure jusqu’à finir sur le podium en fin d’année, 3e ou 2e à la dernière course. C’était très très bien et on était ravis avec sa mère, puis on a été contacté par un team en championnat du monde Supersport 300, le GP Project. Et en fait, ça s’est très bien passé. C’était une année compliquée et difficile pour lui parce que, forcément, des nouveaux circuits, un niveau très relevé par rapport au peu d’expérience qu’il avait, mais il a progressé tout au long de l’année, il a marqué des points plusieurs fois, il a fait 6e à Aragon. 

 L’année suivante, il a été avec le team Pedercini, chez Lucio avec qui je m’entendais très bien et pour qui je roulais à l’époque. Ce qui a été compliqué, c’est que Lucio a perdu pas mal de partenaires dans l’année, et on s’est retrouvé dans un truc qui était hyper intéressant en début d’année, mais plus que très moyen en milieu de saison, puisque le team n’avait plus du tout d’argent et faisait tout avec des bouts de chandelle. Donc en fait cette année-là Johan il a connu vraiment la galère, avec un manque de performance sur la moto et une équipe technique changeante. C’était très compliqué, mais c’était un mal pour un bien, parce que quand tu vis ça, ça te renforce aussi mentalement. 

 Du coup, en fin d’année, on s’est posé la question de ce qu’on allait faire : essayer de persister en 300 ou passer à autre chose ? Et à moment-là, Christophe Guyot est venu discuter un peu avec moi et m’a dit qu’il y avait des choses qui étaient en train de se mettre en place en France, avec une wildcard pour le premier du championnat, et que ça pourrait être peut-être intéressant pour Johan. Pour ma part, avec l’école, on était en train de passer Yamaha, donc du coup j’ai trouvé ça logique de tout basculer chez Yamaha et de monter ma propre structure, c’est à dire avec mes mécaniciens de l’époque, un petit camion, une structure familiale mais par contre avec une moto où on mettait les moyens d’avoir une très bonne moto, et surtout beaucoup d’entraînement pendant l’hiver. Il a découvert toutes les pistes du championnat et la première année il gagne le championnat Challenger, c’est à dire celui réservé aux enfants, parce que pour moi ça reste des enfants, de moins de 21 ans. Donc, il le gagne et il fait 3e au championnat. 

C’est très très bien, il a vite appris, et donc du coup l’année suivante on s’est dit qu’on allait tout faire pour aller gagner la wheelcard en Mondial de Christophe et être champion de France. Donc c’est ce qu’il a fait, il a gagné la wildcard à Magny-Cours et il fait une place de 11e et une place de 13e, de mémoire. Il a très très bien marché et puis en fin d’année il a été titré champion de France. Donc pour moi, c’est une très belle année, car aujourd’hui, grâce à la Fédération Française de Motocyclisme, grâce à Christophe Guyot et à Yamaha, on a un niveau en championnat de France qui n’a jamais été aussi bon ces dernières années. C’est à dire qu’aujourd’hui, grâce à Valentin Debise aussi qui est venu, ça a permis de pouvoir comparer et analyser ce qui a pu se faire ces 3 dernières années pour essayer de comprendre si un pilote était capable d’atteindre un bon niveau en championnat du monde. Ce qui a été le cas puisqu’on voit qu’aujourd’hui, quelqu’un comme Valentin gagne la wildcard l’années dernière et aujourd’hui est pilote titulaire au sein du GMT94.
Johan gagne la wildcard cette année et intéresse déjà des structures importantes, que ce soit en 600 Supersport pour aller sur le championnat du monde, ou que ce soit sur une catégorie comme le championnat d’Europe Moto2 FIM qui est l’antichambre des Grands Prix, ouais. Donc ça pour moi, c’est top parce que ce qu’on se rend compte que les acteurs majeurs du monde de la moto prennent conscience qu’aujourd’hui il y a du niveau en championnat de France. Je pense qu’aujourd’hui, que ce soit en Superbike et en 600, il n’y a jamais eu autant de niveau que ces 2 dernières années. » 

Mais alors surprise parce que bon, OK, champion de France, très bien, avec du niveau, parfait, et encore très jeune, il faut le rappeler…
« Oui, il a 18 ans, il est du mois de janvier. » 

Voilà, très jeune, et la suite logique aurait été de viser le Mondial Supersport et de prendre les patins de Valentin Debise, si on peut dire. Or, apparemment, ce n’est pas ce qui va se passer…
« Non, en fait, pour l’instant ce n’est pas encore complètement décidé, mais en tout cas pour ma part j’ai vraiment envie qu’il aille sur du Moto2. Pourquoi ? Parce qu’aujourd’hui, le rêve d’un enfant, quand on regarde la télé, c’est quoi ? C’est d’aller aujourd’hui sur le championnat le plus important au monde. Si tu parles aujourd’hui à un pilote de karting, il va te parler de Formule 1, et si tu parles aujourd’hui à un jeune pilote moto, il va te parler de Grand Prix, et ce qui te fait rêver quand tu es gamin, ce sont les Grands Prix. Moi, à ma propre époque, j’ai eu la chance de les faire. Ça n’a peut être pas marché comme j’ai voulu, mais en tout cas j’ai eu la chance de pouvoir les faire et ça m’a aidé dans ma carrière. Après pour pouvoir continuer à évoluer dans les différentes disciplines que j’ai pu faire. Aujourd’hui, je considère qu’un enfant de 18 ans, avec la nouvelle réglementation que la Dorna a créé ces dernières années, c’est à dire qu’aujourd’hui il faut avoir 18 ans pour aller en championnat du monde, on est poil dans l’âge. Aujourd’hui, on a le meilleur pilote français de 18 ans, alors qu’est ce qu’on en fait ? Ce serait dommage aujourd’hui de ne pas l’emmener ou en tout cas de ne pas essayer de l’emmener sur les Grands Prix !

J’ai la chance d’avoir des gens qui m’aident autour de moi, comme Hervé Poncharal avec qui j’ai échangé, pour ne pas le citer. Quand je l’ai appelé la première fois, c’était pour qu’il me donne son avis, et en fait, il m’a juste ouvert les yeux. Et pour moi c’est hyper important parce que Hervé, c’est pour moi le référent aujourd’hui dans le monde du Grand Prix, c’est le référent. Il a sorti d’excellents pilotes comme Olivier Jacque. C’est quelqu’un qui, quand il me donne son avis, il est très important. Et il m’a dit: ne te pose même pas la question, fonce !.
Je me rends compte qu’aujourd’hui je suis un peu la personne mal placée parce que je suis le papa, je suis en train de parler de mon fils, mais avant tout ça, je suis aussi son manager et je suis aussi son coach. Ce qui est compliqué pour moi, ça va être de réussir à réunir le budget qui va me permettre de le faire partir sur du Moto2 FIM CEV parce qu’il y a un niveau qui est quand même relativement important: si tu rentres dans les 3 premiers, l’année suivante, tu es en Grand Prix !”

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