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Dans la catégorie Moto3, voir des courses disputées à quatre ou six pilotes de front ne nous étonne plus, tout comme il ne nous étonne plus de comptabiliser 25 dépassements dans le même tour, ni compter 10 pilotes dans la même seconde à l’arrivée.

C’est aujourd’hui ainsi, et cette catégorie très spectaculaire, si elle a de quoi inquiéter même les plus aguerris comme Valentino Rossi, offre des spécificités et un spectacle inégalé, ainsi que, globalement, une grande maîtrise de ces jeunes pilotes sans cesse sur le fil du rasoir.

Par contre, ce qui nous a étonné au lendemain du Grand Prix de Catalogne, c’est le classement final qui non seulement n’est plus le même que celui que nous avons publié quelques secondes après que les protagonistes aient franchi la ligne d’arrivée, mais présente une particularité singulière : 10 pilotes en moins d’une seconde, Romano Fenati (Sterilgarda Max Racing Team) 11e à 3 secondes… et tous les autres à un tour, dans un ordre ne correspondant pas au passage sur la ligne !

 

 

Pourtant, nous avons bien vu Yuki Kunii (Honda Tean Asia), Daniel Holgado (CIP – Green Power), Elia Bartolini (Avintia Esponsorama) et Ryusei Yamanaka ( CarXpert Pruestel GP) terminer la course devant Lorenzo Fellon (SIC58 Squadra Corse), à environ 10 secondes de Romano Fenati

 

 

Que s’est-il passé ?
À l’approche du dernier tour, le leader Jeremy Alcoba (Indonesian Racing Gresini Moto3) se relève et ralentit volontairement le rythme pour ne pas entamer la ligne droite en tête. On connaît le phénomène d’aspiration avec ces motos légères, et celui qui rentre premier dans la ligne droite est quasiment assuré de s’y faire doubler. Darryn Binder (Petronas Sprinta) s’y colle pourtant en entamant le dernier tour en tête et, effectivement, passe le premier virage après la ligne droite en 10e position.

 

 

Dans le dernier tour, Ayumu Sasaki (Red Bull KTM Tech3), qui était dans le groupe de tête comprenant 15 pilotes quelques secondes auparavant, chute en perdant le contrôle de sa KTM au virage 8 juste devant Kaito Toba (CIP – Green Power). Les deux pilotes du Leopard Racing, Dennis Foggia et Xavier Artigas, sont les victimes collatérales de cet incident. Pendant ce temps, les autres pilotes terminent les six virages restants et franchissent la ligne d’arrivée, Sergio García (Solunion GASGAS Aspar Team) en tête devant Jeremy Alcoba et Deniz Öncü (Red Bull KTM Tech3).

Ayumu Sasaki ne se relevant pas tout de suite au virage 8, les drapeaux rouges sont agités alors que le groupe de tête composé de 10 pilotes en moins d’une seconde, ainsi que Romano Fenati trois secondes plus tard, ont déjà franchi la ligne d’arrivée.

Pourquoi ?
Sincèrement, on peut se poser la question, car à cet instant tous les pilotes en courses avaient déjà dépassé le virage 8. Soit ils avaient déjà franchi la ligne d’arrivée, soit ils étaient sur le point de le faire, dans la dernière partie du circuit.
On peut toutefois avancer l’hypothèse de la nécessité de faire rentrer sur la piste un véhicule médicalisé alors que les pilotes faisaient leur tour d’honneur, sans qu’aucune image permette de l’affirmer. On peut aussi bien sûr penser à une réaction de précaution, après le malheureux décès survenu une semaine plus tôt…

Les conséquences ?
L’article 1.25.1 du règlement est clair : en cas d’interruption de la course au drapeau rouge après l’arrivée de la course, les pilotes qui ont déjà franchi la ligne d’arrivée conservent leur classement, les autres sont classés suivant leur position au tour précédent. D’où cet écart d’un tour avec la réalité constaté dans le classement officiel.

Au final, seul le rookie Daniel Holgado est concrètement pénalisé par l’application du règlement, en ayant franchi la ligne en 13e position alors qu’il se retrouve finalement classé 15e. Au contraire, Elia Bartolini et Ryusei Yamanaka gagnent une place et un point dans l’opération.

Conclusion ?
Un tel fait de course arrive heureusement rarement, et si cela désavantage certains, cela en avantage d’autres. C’est toujours regrettable mais la solution idéale n’existe pas.
Peut-être, et sans doute, plus important, l’attitude de Jeremy Alcoba, ralentissant volontairement la tête de la course pour ne pas entrer le premier dans la ligne droite dans le dernier tour, est un précédent fâcheux : au moment où les qualifications Moto3 sont maintenant réduites à un seul tour, un phénomène que l’on commence malheureusement à entrapercevoir aussi en MotoGP, on n’aimerait nullement voir une course de 21 tours réduite à une stratégie de ralentissement dans l’avant-dernier tour…

La direction de course et le panel des commissaires FIM MotoGP ont bien conscience de la dérive actuelle des pilotes Moto3. Une énième réunion attend ces derniers au Sachsenring, mais il en faudra sans doute beaucoup plus pour endiguer cette tendance actuelle qui favorise clairement plus la stratégie que la performance et vient ternir le magnifique spectacle qui nous est offert !

 

Crédit classements et photos : MotoGP.com