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Les pilotes MotoGP subissent jusqu’à 1,9 g sur les plus gros freinages, ce qui, comparé à la F1, est peu, car ceux-ci peuvent subir jusqu’à 5 g. Mais un pilote de F1 est attaché dans sa monoplace avec un harnais à six points, similaire à ceux utilisés dans les avions de chasse. Un pilote MotoGP n’a que ses mains accrochées au guidon. 

En fait, pas seulement, car les pilotes utilisent leurs cuisses, leurs pieds et leur dos pour s’agripper à la moto, en saisissant le réservoir comme un étau avec leurs genoux, en appuyant leurs pieds sur les repose-pieds (sauf lorsqu’ils sortent la jambe au freinage, mais c’est un autre débat !).

C’est une des raisons pour lesquelles de petits ailerons apparaissent autour des réservoirs de carburant des prototypes MotoGP (on les a notamment revus cette année sur la Honda de Marc Márquez au Qatar). L’idée est d’améliorer le grip des genoux autour du réservoir lors de freinages appuyés (et en course, cela arrive environ 170 fois en 40min).

Jorge Lorenzo a lancé cette mode, tout d’abord chez Ducati, avec des pads adhésifs, puis chez Honda, avec des ailerons imprimés en 3D au HRC lors de sa visite au Japon après la course du Mugello. Il voulait un réservoir plus fin afin d’augmenter la maniabilité, et des protubérances au-dessus de ses cuisses qui l’empêchaient d’être projeté en avant. Johan Zarco avait également demandé cette modification à KTM :

 

 

Et la raison principale de l’apparition de ces nouveaux appendices est la puissance de freinage impressionnante qui est une conséquence de l’appui aérodynamique créé par les fameux ailerons en MotoGP, et de la vitesse que ces prototypes atteignent!

« La limite de la force g sur les freins est l’adhérence des pneus », explique Andrea Pellegrini, technicien de freinage Brembo. « La nouvelle aérodynamique augmente la force d’appui sur le pneu avant et pendant le freinage, ce qui donne au pneu plus d’adhérence, ce qui signifie que les pilotes peuvent freiner plus tard et plus fort. »

Le freinage est désormais l’aspect le plus exigeant physiquement du pilotage en MotoGP. Prenons l’exemple de Cal Crutchlow : le pilote britannique pèse 66 kilos et son équipement pèse environ 11 kilos, soit 77 kilos au total. Supposons qu’il encaisse 60% de cette charge à travers ses poignets à chaque freinage, le reste étant réparti entre ses cuisses, ses pieds et ses fesses. Cela signifie que ses poignets supportent une charge de 80 kilos sur les freins. À Catalunya, il y a au moins sept points de freinage majeurs, donc pendant la course, Crutchlow a développé 80 kilos environ 170 fois – sans compter ce qu’il encaisse aussi en courbe et à l’accélération.

« C’est pourquoi notre rythme cardiaque augmente si fort, parce que nous sommes en apnée dans la zone de freinage, comme lors d’un développé couché », explique Crutchlow. « Vous êtes aussi tendu que possible et retenez votre souffle pendant trois, quatre ou cinq secondes, puis vous expirez pendant la courbe, mais la courbe suivante peut être à seulement trois ou quatre secondes, vous devez donc répéter la même chose, encore et encore. »

« Vous tendez tout votre corps lorsque vous êtes sur les freins et je ne sais pas quand je recommence à respirer mais je sais que je le dois.  A Catalunya, vous freinez dans le virage un et je ne pense pas que vous recommencerez à respirer jusqu’à la sortie du virage deux, parce que lorsque vous changez de direction entre les 2 courbes, vous êtes aussi tendu que vous lorsque vous freinez. »

Crutchlow et son coéquipier LCR Takaaki Nakagami ont tous deux des découpes dans leurs réservoirs, mais c’est aussi le cas de Jack Miller et d’autres pilotes Ducati : « Lorsque vous freinez, vous utilisez vos pieds et vos genoux, c’est pourquoi nous avons ces appuis sur nos réservoirs, juste pour accrocher nos genoux », explique l’Australien. « Lorsque vous freinez, vous poussez dans les repose-pieds avec vos pieds et vous poussez vos genoux dans le réservoir et vous l’utilisez comme point de verrouillage pour le bas de votre dos. Ensuite, vos bras prennent le poids du haut du corps, plutôt que le poids de tout votre corps. »

C’est la spirale technique de course habituelle : les concepteurs de moteurs créent des moteurs plus puissants, donc les techniciens de pneus ont fabriqué des pneus avec plus d’adhérence, et alors les ingénieurs de châssis conçoivent des cadres et des bras oscillants avec plus de rigidité…