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Davide Brivio

Dans son véritable discours sur la méthode où l’on trouve tous les ingrédients pour qu’un constructeur puisse réussir dans le MotoGP d’aujourd’hui, Davide Brivio s’est arrêté sur un cas qu’il connait très bien : Suzuki. C’est en effet lui qui a posé les fondations de cette équipe officielle qui a rapporté un titre mondial pilotes en 2020 à une firme qui a remercié ses troupes en leur donnant leur congé fin 2022. Un vrai gâchis et d’autant plus grand lorsque l’on écoute l’Italien. Car Suzuki avait tout pour continuer à faire de belles choses en Grand Prix, ayant réussi la synthèse entre le conservatisme du Japon et l’audace européenne.

Une synthèse qui est loin d’être acquise chez Honda comme chez Yamaha en vue d’une saison 2023 où les deux blasons joueront leur réputation. Mais elle est possible puisque le compatriote Suzuki avait compris, dès 2016, sous l’impulsion de Davide Brivio, que l’assumer était un impératif pour s’ouvrir la voie du succès. Dans son entretien fleuve et édifiant dont on a déjà parlé et que l’on trouve sur slick-magazine, il explique les tenants et les aboutissants lorsqu’il était en fonction dans le box de la marque d’Hamamatsu en Grand Prix.

Pour bien se faire comprendre, il fait clairement le distinguo entre Suzuki et ses compatriotes Yamaha et Honda : « permettez moi de souligner que Suzuki était différent » commence l’Italien. « Lorsque nous avons commencé à construire l’organisation, on était au début de ce changement de mentalité, et ça a marché. Par exemple, au moins deux fois par an, nos ingénieurs italiens se rendaient au Japon pour exposer leur point de vue sur certains problèmes rencontrés en piste. Évidemment, ils ne sont pas allés donner des ordres, mais à notre avis pour expliquer ce dont la meilleure moto avait besoin, en pensant également à l’année suivante ».

Concrètement, cela se passait ainsi : « on leur disait : « nous pensons que ceci ou cela est nécessaire », et les ingénieurs japonais du département course ont étudié la situation et les données que nous avons fournies. Au début, ils étaient sceptiques, mais ensuite ce sont eux qui nous demandaient toujours des données et les utilisaient tout le temps. Ensuite, bien sûr, ils ont fait ce qu’ils pensaient être juste, mais nous avons pu transférer des informations au Japon qui, autrement, avaient du mal à y parvenir. En fait, nous avons lentement grandi pour gagner en 2020… et nous n’avions pas le budget que les autres ont toujours eu. Disons donc que nous n’avons jamais été l’équipe classique à l’ancienne ».

Davide Brivio : « Ducati a été peut-être le premier à créer un Team Performance, puis suivi par nous chez Suzuki« 

Cette stratégie s’est articulée autour de la constitution d’un « team performance » que Davide Brivio présente ainsi : « c’est un groupe d’ingénieurs dédié à l’analyse des données. Et il fait partie de l’équipe, avec la tâche de soutenir l’équipe d’usine pendant le week-end de course. Avec les données qu’il analyse, il aide aussi le service course, pour le développement de la moto. En fait, si l’équipe en piste a évolué, c’est grâce à la sophistication de l’analyse des données, donc grâce au travail de l’équipe de performance ».

Une organisation dont Davide Brivio n’a pas été le précurseur, et il le reconnait volontiers : « Ducati a été peut-être le premier à la créer… Puis suivi par nous chez Suzuki. Nous l’avons déjà créé en 2016, notre deuxième année de course. Nous étions les premiers à l’avoir, parmi les Japonais, et nous étions donc les plus proches des Européens. Cependant, Suzuki est toujours une entreprise japonaise, certaines caractéristiques sont restées : disons que nous avons eu une mentalité qui est à mi-chemin ; c’est-à-dire très européen dans l’approche de la piste, très japonais dans le processus de développement de la moto, traditionnellement plus conservateur ».

Tous les éléments étaient donc en place pour poursuivre une belle aventure et défendre le Japon face à l’Europe. Mais un froid conseil d’administration en a décidé autrement : « le Conseil a fermé le programme de course, pour investir dans des produits motorisés électriques et de nouvelles technologies automobiles. Je ne peux pas me donner d’explication à cela, car à mon avis tout aurait pu être fait de toute façon, mais c’est comme ça » regrette Davide Brivio. Et il n’est pas le seul.

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