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Comme nous en avons très régulièrement le plaisir, Hervé Poncharal nous a partagé ses différents points de vue sur l’actualité de ses équipes en championnat du monde.

En attendant d’accueillir les gagnants de notre prochain jeu-concours à Misano, le boss du team Tech3 récapitule cette première demi-saison 2019, nous lâche un petit scoop sur la KTM RC16 et se projette dans l’avenir…

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Donc la motivation est plus que jamais de mise…

« Je l’ai déjà dit et c’est vrai que je reçois régulièrement des messages et des commentaires où on me dit que je suis politiquement correct et que j’ai un discours très positif pour faire plaisir à mes sponsors. J’ai 62 ans et ça fait 40 ans que je fais ce boulot, donc je ne vais pas dire le contraire de ce que je ressens et de ce que je pense. C’est un projet très intéressant techniquement pour nous, c’est un projet on travaille avec des gens qui sont excessivement motivés. Malgré tout, même si c’est un constructeur important, ce n’est pas un constructeur qui a la taille de Honda Motor ou Yamaha Motor, ou même Suzuki et Kawasaki Motor. Donc c’est un constructeur encore jeune qui s’implique dans beaucoup de championnats et de catégories sportives, qui a la course chevillée au corps, et pour moi ce sont des choses qui comptent et qui m’émeuvent. Je suis heureux d’avoir décidé de relever ce challenge et je ne cire les pompes à personne : ce que je dis, je le pense réellement. Ils ont décidé de s’engager avec leurs propres suspensions et je pense que c’est plutôt sympa pour la compétition. Ils ont envie de continuer de promouvoir leur châssis tubulaire en acier, et personne au monde peut dire que c’est perdu d’avance, même si je lis parfois des réactions d’internautes qui disent que ça ne marchera jamais. Personne ne peut dire que c’est perdu d’avance ! Personne ! Ce n’est peut-être pas la voie la plus facile, la plus rapide, la plus simple, mais personne ne peut dire que cela ne marchera pas. Donc on est en l’an 1 d’un programme de 3 ans et je dirais qu’on est dans les clous et content d’être là où l’on est. Last but not least, c’est quand même une boîte européenne. J’ai eu l’occasion de partir rouler une dizaine de jours à la montagne et on voit maintenant de plus en plus de motos européennes. Je pense que c’est bon et sain pour le monde de la moto d’avoir plusieurs offres et que la bonne vieille Europe redresse la tête et sorte des motos qui soient des alternatives valables aux constructeurs japonais »

Oui, mais vous étiez pilote et vous êtes toujours un compétiteur. Alors est-ce que par moment ce n’est pas difficile humainement de passer du firmament, avec par exemple Johan Zarco et Yamaha, à la dernière partie de la grille comme c’est assez souvent le cas ?

« Évidemment que de toute façon, quand on fait de la compétition, la chose qui nous rend le plus heureux et ce vers quoi on tend et ce pourquoi on travaille tous les jours, c’est pour performer et être devant. Donc dire le contraire serait une hérésie. Concernant l’aspect sportif, on sait aujourd’hui que ce sera très compliqué d’aller se battre dans un très proche avenir avec Márquez, Viñales, Quartararo, Dovizioso et consorts. Par contre, il y a aussi une dimension qui me concerne moi personnellement, Hervé Poncharal, c’est une dimension d’aventure de chef d’entreprise où on a une mission avec un constructeur européen, qui est de développer l’image de marque via des bons résultats en compétition. On travaille main dans la main pour que l’aura de la marque soit encore plus fort. C’est aussi quelque chose qui est excitant, y compris pour les techniciens. L’échange est beaucoup plus soutenu, beaucoup plus proche, beaucoup plus facile, avec tous les gens qui développent cette moto que ça pouvait être le cas dans l’aventure précédente, où là, on avait une machine qui était très performante mais qui était figée. Donc on utilisait un matériel très performant qui nous permettait de faire des pole, de faire des podiums. Peut-être même qu’une fois on aurait pu gagner une course, ce n’est pas passé loin. Mais là il s’agit quand même d’une aventure où on se sent impliqué dans le développement. Il y a des réunions à tous les Grands Prix, où tout le monde donne son avis, et c’est quelque chose qui te garde éveillé et qui te motive. Sincèrement, je pense que c’est plus dur pour le pilote que pour nous, même si, bien sûr, l’émotion ultime est d’arriver sur le podium ou de partir depuis la première ligne. Ce sont des moments d’intensité que tu ne peux pas avoir autrement. C’est vrai ».

« Quand je lis des commentaires, il y en a beaucoup qui sont liés aux contre-performances de Johann Zarco. C’est clair ! Il avait une grosse base de supporters, à juste titre, mais qui pensaient qu’il allait transformer la KTM en succès quasi immédiat. Ce n’est pas aussi facile que ça, et c’est certain que Johann a certainement plus de frustrations que je peux en avoir, ou que mon équipe technique. Oui, on a envie de progresser, mais il y a aussi un timing qui est moins stressant pour nous que celui d’un pilote. On est engagé sur un programme de 3 ans, donc en 2019, on se découvre, on débute, on commence. En 2020, il faut qu’on franchisse une marche et il faut qu’on soit beaucoup plus près. Là, on regardera surtout les temps et les écarts en fin de course, par rapport aux vainqueurs. Et en 2021, il faudra se rapprocher encore plus. Je ne vais pas dire qu’on va gagner en 2021, car tout dépendra aussi des pilotes. On sait aussi que le pilote est un élément prépondérant dans les résultats. On l’a déjà dit plusieurs fois, mais si on enlève Márquez, rappelez-moi où est la 2e Honda ! Donc je pense que Marc est un élément très important dans le binôme Repsol Honda–Márquez ».

« Donc on va voir : oui, il y a une frustration, mais d’un autre côté il y a tout un tas de choses qui sont excitantes et qui compensent. D’un autre côté, quand on a pris cette décision, on le savait. On pourrait avoir une énorme frustration si jamais on avait été suffisamment naïf pour se dire « on va signer chez KTM et on va faire les mêmes résultats qu’on faisait avec Johann et la Yamaha ». Non ! On savait que ce serait pas facile, on savait que c’était l’usine la plus récemment impliquée en MotoGP, donc quelque part que le travail était de continuer à bosser, bosser, bosser, pour réduire l’écart avec les meilleurs. Et on est dedans ».
« Alors oui, il y a des moments frustrants, mais on l’accepte car ça fait parti du plan qui était le nôtre quand KTM et Tech3 se sont engagés ensemble. Et moi, quand je m’engage, j’aime être à la hauteur de mes engagements. Les engagements, c’est « on va travailler ensemble pendant 3 ans pour essayer de faire en sorte que KTM en MotoGP, après 3 ans, grâce entre autres au fait qu’il y ait 4 motos au lieu de 2, soit beaucoup plus près ». Et on connaît la volonté, l’envie, et la détestation de ne pas gagner qui animent les gens de chez KTM au plus haut niveau, même si parfois c’est dit dans des termes un petit peu rugueux et passionnés ».

« Voilà, bien malin qui peut dire ce qui va se passer dans les 12 prochains mois ! L’avenir a toujours été incertain. Irma et la boule de cristal, j’y crois peu, donc on va voir comment les choses évoluent. Beaucoup de gens voyaient la Ducati dominer le championnat cette année, et Marc a 58 points d’avance. Un rookie nommé Fabio Quartararo tutoie les meilleurs et peut gagner un Grand Prix cette année alors qu’il a eu de la malchance et qu’il pourrait être le meilleur pilote Yamaha à la table de la pause estivale. Il y a plein de choses qui ne sont pas nécessairement des choses que l’on peut prévoir à l’avance, et qui se passe. Pol Espargaró a quand même fait des performances au-dessus de ce que l’on pensait pouvoir être fait sur le sec en début de saison. Alors je lis aussi des commentaires, mais quand un pilote va vite, qu’il pilote comme ci ou comme ça, il va vite ! Quand Pol Espargaró finit à 5,9 secondes derrière Márquez au Mans, il finit à 5,9 secondes ! On peut dire tout ce qu’on veut mais c’était la même piste, ils sont partis au même moment, ils ont franchi la même ligne d’arrivée, avec les mêmes pneumatiques, et la performance ne souffre pas de “oui mais il pilote comme un bourrin, oui ceci, oui cela !”. Ce que Pol a fait, il l’a fait ! Donc on est quand même avec un package technique qui, quand on le compare à 2018, est en nette progression par rapport à la concurrence, Honda, Ducati, Yamaha, Suzuki et Aprilia, qui elle-même cavale et qui progresse ! Il faut prendre en compte tous ces éléments là pour comprendre l’effort et, quelque part, la qualité des performances ».

A suivre…

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