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Après nous avoir entretenu dans la première partie de son interview des premières victoires de Michael van der Mark et de son coéquipier Alex Lowes en WSBK, ainsi que des titres mondiaux obtenus par Lucas Mahias et Sandro Cortese en Supersport sur leurs R6 en 2017 et 2018, Éric de Seynes, Président, Chief Executive Officer de Yamaha Motor Europe, et également Executive Officer de Yamaha Motor Co., Ltd, nous parle aujourd’hui de ses concurrents, du MotoGP, et de Johann Zarco.

Face à un adversaire comme Kawasaki qui concentre tout son budget sur la Superbike, sans présence  – donc sans dépense – en Grand Prix, la lutte n’est-elle pas inégale ?

« Non, je ne veux aborder l’engagement de Kawasaki comme cela. En compétition, si on commence à avoir des complexes, il vaut mieux rester à la maison ! Pour gagner ce n’est pas compliqué, il faut une moto performante, au moins au niveau des meilleurs concurrents, il faut un pilote qui sache exploiter 100% du potentiel de sa moto et enfin une équipe qui croit à sa victoire. Tout le reste n’est qu’accessoire. « C’est grâce à cette philosophie et à cette ambition simple, que nous partageons avec nos teams et nos pilotes, que pouvons être engagés dans autant de championnats avec des budgets qui restent supportables pour nous au niveau européen.

« C’est vrai que cela nous pose souvent en « challenger » mais j’aime cette position… Gagner ainsi rend la victoire encore plus belle, car elle est avant tout humaine ! Regardez au Dakar, en MX mondial, en Enduro, en vitesse, en Endurance, etc… vous retrouverez toujours cette même approche de la course, cette même intégrité dans l’utilisation de nos budgets, cette même fidélité aux hommes, ce même attachement à l’essence même des valeurs de la compétition. »

BMW et Honda accroissent leurs efforts en mondial Superbike pour la saison prochaine, sans pour autant engager – comme ce fut le cas autrefois – d’équipe officielle. Est-ce un signe encourageant pour le Championnat du Monde ?

« Oui, je pense que notre parcours a peut être inspiré d’autres constructeurs. Notre façon d’aborder ce Championnat du Monde SBK de façon distinctive de ce que nous faisons en MotoGP me semble juste et j’espère que l’arrivée de Honda et BMW va permettre de continuer à faire grandir le championnat. En SBK nous devrions avoir 36 pilotes sur la grille, ce n’est pas le MotoGP et tout ce qui peut contribuer à atteindre cet objectif me réjouit. »

On passe l’an prochain à 3 courses en SBK, avec la création en supplément d’un sprint de 10 tours qui attribue environ la moitié des points aux 9 premiers. Estimes-tu cette évolution positive ?

« Sincèrement, je ne suis pas super enthousiaste à cette nouvelle formule de courses. J’attends de voir comment cela va se passer pour porter un jugement plus formel. J’espère que cela ne va engendrer trop de risques supplémentaires, de chutes, de coûts liés à celles-ci.

« Je peux comprendre que cela apporte un plus pour le spectacle, les audiences TV et le public, mais il ne faut pas que cela fasse déraper les budgets des teams privés…Maintenant, si je considère nos pilotes, ils sont tous les quatre des attaquants qui s’affirment toujours mieux en course qu’aux essais, alors cela devrait être au moins intéressant ! »

Quels sont les objectifs de Yamaha en 2019, tant en Superbike qu’en Supersport ?

« En Superbike, nous devons faire mieux ! C’est à ce titre que nous devons aller chercher la couronne de Champion du Monde ou de Vice-Champion autant au niveau du classement Pilotes que Constructeurs. En Supersport 600, nous devons conserver nos titres pilotes et constructeurs. Enfin en Supersport 300, nous espérons que les ajustements du règlement technique vont permettre d’afficher un meilleur équilibre de performances entre les différentes motos du plateau et nous viserons là aussi les deux titres Pilotes et Constructeurs. »

Yamaha va-t-il rattraper son (tout petit) retard et jouer le titre en MotoGP ?

« Je sais que notre équipe Factory travaille extrêmement dur pour cet objectif et suis convaincu que les efforts poursuivis vont se concrétiser dans les résultats. On a déjà pu observer sur les derniers GP que nos motos et nos pilotes étaient là pour aller chercher la victoire, que cela soit Maverick Vinales ou Valentino Rossi.

« Les premiers essais hivernaux se sont aussi plutôt bien passés, y compris pour notre nouveau team satellite SIC Petronas. Il faut bien avoir en tête que depuis que nous avons une électronique commune entre les motos, et des pneumatiques uniques les écarts se sont extrêmement réduits entre les différentes équipes. Pour 3/10ème de seconde vous pouvez être au sommet ou considéré comme étant en perdition…

« C’est d’une violence extrême, et c’est vrai que nous avons eu plus de mal que nos concurrents, en 2018, à être homogène dans notre performance d’un circuit à l’autre. Notre sensibilité au grip, à l’asphalte du circuit et à la température de la piste nous a handicapés tout au long de cette année et c’est ce que nous devons corriger.

« La difficulté vient du fait que notre moto est fondamentalement bonne et que nous devons respecter ses qualités propres. Il suffit de voir les performances de Morbidelli et Quartararo pour leurs premiers tours de roues sur la M1 pour en rester convaincu. »

Après avoir soutenu Johann Zarco autant que possible, reste-t-il un espoir de le voir revenir un jour dans le giron de Yamaha ou sera-t-il remplacé par Fabio Quartararo dans votre cœur ?

« Quel que soit l’avenir, je resterai toujours un fan de Johann, de son talent et de ses qualités, de son palmarès. Je regrette de ne pas avoir pu le conserver dans le giron de Yamaha car j’avais fait le maximum pour obtenir pour lui un package encore plus performant pour lui en 2019. Je suis aussi déçu car notre histoire personnelle est longue depuis ses débuts en GP, et il nous aura fallu plusieurs années pour arriver à être enfin réunis sportivement grâce à Tech 3…

« Malgré tout, je respecte son choix qui est à la fois audacieux et justifié par le statut de pilote officiel qu’il mérite largement. Enfin, par fidélité et par conviction, Yamaha reste partenaire de la structure et des programmes de ZF Grand Prix School et j’en suis très heureux.  

« En ce qui concerne Fabio Quartararo, j’étais entré en contact avec lui par l’intermédiaire de notre concessionnaire de Nice, Jacques Onda, qui le suit depuis son enfance. Je lui avais proposé de lui fournir une R6 d’entrainement depuis ses premiers tours de roues en Moto2, comme je l’avais fait pour Johann à ses débuts dans la catégorie. De la même façon, il m’est arrivé plusieurs fois d’aller le féliciter au pied du podium ou dans son box à la suite d’une bonne qualification.

« C’est pourquoi, lorsque son nom à commencer à circuler pour le team SIC en MotoGP, j’ai poussé pour lui donner sa chance. Son parcours, ses résultats, son expérience et son âge sont des atouts indiscutables. Il a du temps devant lui pour se forger son expérience en MotoGP, et cela est peut être la première fois que cela arrive à un pilote français.

« Ses débuts ont été exemplaires et je sais qu’il a déjà fait l’unanimité au sein de son équipe.  Retrouver deux pilotes français en MotoGP en une excellente chose pour le rayonnement de notre sport auprès d’un large public non spécialisé. Je suivrai donc de très près la progression de Fabio et ferai toujours tout ce qui est en mon pouvoir pour l’accompagner de la façon la plus utile et efficace possible. »

Photos © Yamaha

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