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Tout va pour le mieux chez Kawasaki, avec huit sacres mondiaux consécutifs, quatre titres pilotes pour Johnny Rea et quatre constructeurs pour la ZX-10R. Mais si gouverner c’est prévoir, on prépare avec soin l’avenir chez les Verts car, comme le déclarait dans une interview exclusive Biel Roda (un des deux frères patrons du Kawasaki Racing Team) « Tôt ou tard, ils vont nous battre, nous essayons juste de faire en sorte que ce soit le plus tard possible ».

Devant la menace à court terme de Yamaha et de Ducati, ainsi que celle à moyen terme de BMW et Honda, le KRT a décidé de prendre les devants. Plutôt que d’imposer à Johnny Rea un coéquipier avec lequel il ne s’entend pas, les frères Roda avaient décidé d’écarter Tom Sykes au profit de Michael van der Mark, l’Anglais échangeant sa place avec celle du Néerlandais chez Yamaha. Mais Rea préféra Leon Haslam, en qui il a entière confiance, et à qui Kawasaki ne pouvait pas refuser grand-chose en raison de sa récente victoire en BSB en 2018. Van der Mark resta donc chez Yamaha et Tom Sykes se retrouva sans rien, « comme Sylvain Guintoli avec Aprilia en 2014 », précisait le Britannique. Il est vrai que cette année-là le Français dut attendre très longtemps la concrétisation de son engagement par Aprilia, ce qui ne l’empêcha nullement de décrocher le titre mondial devant… Tom Sykes !

Cet hiver, il est resté une place chez BMW aux côtés de Markus Reiterberger, et ce poste fut fort logiquement proposé au Champion du Monde 2013 britannique. Biel Roda, cité au début de cet article, déclarait au sujet de l’effort munichois, « Quand on regarde le niveau de BMW, leur moto de base est incroyable d’un point de vue technique. Ils ont Mr. Sykes qui est un pilote super rapide et bon pour le développement de la moto. Mais l’équipe, la moto et les pilotes sont nouveaux les uns pour les autres, et on va voir s’ils sont capables d’aller chercher cette demi-seconde au tour ».

Lors des derniers tests à Portimão, Johnny Rea réalisait un tour exceptionnel en 1’40.855 avec un pneu de qualification. Les écarts étaient énormes, avec Alex Lowes à 0.9, Alvaro Bautista à 1.0, Leon Haslam à 1.2, puis Michael van der Mark et Tom Sykes à 1.3.

« Les sensations émanant de la nouvelle S 1000 RR ont été très cohérentes à Jerez et toute l’équipe a travaillé dans la bonne direction. Par conséquent, à Portimão, nous avons continué à travailler de la même manière. Après ces tests, je dois dire que je suis plaisamment surpris par de nombreuses choses, estimait l’Anglais, né le 19 août 1985 à Huddersfield. Nous avions déjà effectué quelques essais avant la pause hivernale et obtenu de bons temps au tour et de bonnes sensations. La S 1000 RR constitue un bon ensemble (« package ») et je remercie l’équipe qui travaille dur. A Portimão le roulage a bien commencé, puis l’arrivée du vent fort a compliqué la situation. Nous avons quand même testé de nombreux éléments et diverses stratégies électroniques.

Après avoir roulé pendant dix ans avec des freins Brembo sur sa Kawasaki, l’Anglais ne savait pas trop quoi penser en découvrant des Nissin sur la BMW. « C’était un peu nouveau pour moi, mais l’équipe et Nissin ont un contrat », a déclaré Tom Sykes. « Avec les freins, c’est comme avec les éléments de suspension, chaque pilote préfère une sensation spéciale qui lui est personnelle. J’utilise beaucoup le frein arrière, maintenant beaucoup plus que je ne pouvais le faire ces dernières années. Ce que je peux déjà dire, c’est que Nissin offre un très bon service. Après avoir testé avant Noël, j’ai demandé certaines choses et ils ont répondu immédiatement. Je suis un perfectionniste et tout le monde dans l’équipe l’a vite compris ».

« Nous en sommes encore au début du projet et j’estime que nos chronos sont bons par rapport à la phase de développement dans laquelle nous nous trouvons actuellement. Je suis assez confiant, j’ai de bons gars autour de moi. L’équipe est prête, le constructeur est prêt. Et l’ambiance dans l’équipe est excellente.

« La BMW est une nouvelle moto. Ce n’est pas un lifting, c’est une nouvelle machine. Trois séances d’essais libres le vendredi, comme avant, auraient été bien meilleures pour nous, car vous avez alors deux fois plus de temps pour travailler sur la moto. Mais maintenant, nous n’avons que deux séances d’essais libres. J’ai attrapé le téléphone et demandé aux gens de Dorna si cela ne serait pas réversible. De nombreuses personnes chez BMW et moi-même aurions préféré avoir trois séances le vendredi. C’est pourquoi j’ai appelé Dorna. Tout le monde sait que Kawasaki a une base fantastique. Et deux pilotes capables de travailler avec déjà beaucoup d’informations. Si vous voulez que le championnat soit plus disputé, plus serré, trois séances pour BMW ou Ducati seraient utiles.

« Nous avons vu l’an dernier que les plus petites équipes étaient plus proches du sommet lors de la troisième séance d’essais qu’après la deuxième. Donc, ils auraient dû garder cela, ce qui aurait augmenté les chances des autres. »

L’année dernière, pendant le week-end de Brno, début juin, de nombreuses informations laissaient croire que vous alliez chez Yamaha. A quel point étiez-vous proche de la signature ?

« Très proche.

Mais cela n’aurait marché que si Michael van der Mark était allé chez Kawasaki ?

« C’est exact. J’ai parlé à Yamaha de nombreuses fois ces dernières années, quand il y avait de la place. C’est une bonne équipe et leur moto a beaucoup de potentiel ».

Vous avez toujours été très positif sur le caractère de la BMW.

« Mes objectifs sont les mêmes que ceux avec Kawasaki. Nous devons travailler ensemble pour atteindre l’objectif ultime. La base de la BMW est excellente pour la course. Nous devons encore travailler sur la délivrance de la puissance du moteur et améliorer le châssis et la fourche. Avec cela, vous devez entrer dans la bonne condition de travail car le nouvel horaire nous dérange vraiment. »

Quelqu’un peut-il battre Kawasaki cette année ?

« Oui, ils sont prenables. Je connais les forces et les faiblesses des Kawasaki, elles ne sont pas invincibles. BMW a certains avantages, je sais où nous en sommes. Ducati a également une nouvelle moto. »

La version de Yamaha concernant ce recrutement manqué n’est pas inintéressante : « Notre moto s’améliore à chaque course, nous avons montré que nous pouvions gagner », a déclaré Andrea Dosoli, Directeur de la compétition WSBK et SSP chez Yamaha. « C’est pourquoi il est normal que de plus en plus de pilotes manifestent de l’intérêt pour nous. Nous en sommes fiers car ça signifie que nous faisons du bon travail. Concernant Tom Sykes, notre philosophie est d’élever les jeunes pilotes. Ce paddock est le lieu idéal pour mettre en œuvre cette philosophie. Bien sûr, il serait bien d’avoir un pilote capable de remporter des courses. Le fait est que nous avons maintenant un tel pilote (Ndlr : Alex Lowes). Nous ne sommes pas ici pour acheter des pilotes coûteux », a souligné l’Italien. « Nous sommes ici pour travailler avec des pilotes pour faire avancer notre projet ».

Photos © worldsbk.com, BMW Motorrad WorldSBK Team

Sources : worldsbk.com, speedweek.com, BMW Motorrad WorldSBK Team